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🔊 “Judith Hopf” Bétonsalon – centre d’art et de recherche & Le Plateau Frac Île-de-France, Paris, du 22 septembre au 11 décembre 2022

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“Judith Hopf“ Énergies

Bétonsalon – centre d’art et de recherche & Le Plateau Frac Île-de-France, Paris

du 22 septembre au 11 décembre 2022

Frac Île-de-France
Bétonsalon


Interview de Émilie Renard, directrice de Bétonsalon - centre d’art et de recherche, de Xavier Franceschi, directeur du Frac Île-de-France, et de François Aubart, commissaire d'exposition indépendant, éditeur et enseigne à l’École nationale supérieure d’arts de Paris-Cergy (ENSAPC), commissaires de l'exposition, par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 20 septembre 2022, durée 20’57. © FranceFineArt. (Émilie Renard, Judith Hopf, Xavier Franceschi et François Aubart)

PODCAST –  Interview de Émilie Renard, directrice de Bétonsalon – centre d’art et de recherche,

de Xavier Franceschi, directeur du Frac Île-de-France,

et de François Aubart, commissaire d’exposition indépendant, éditeur et enseignant à l’École nationale supérieure d’arts de Paris-Cergy (ENSAPC), commissaires de l’exposition,


par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 20 septembre 2022, durée 20’57.
© FranceFineArt.
(Émilie Renard, Judith Hopf, Xavier Franceschi et François Aubart)

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©Anne-Fréderique Fer, présentation presse – Frac Île-de-France & Bétonsalon – avec Judith Hopf, le 20 septembre 2022.
Judith Hopf, LESS, 2022, Film, 3’. Production Frac Île-de-France, Le Plateau. © Adagp, Paris, 2022 / Judith Hopf. Courtesy de l’artiste.
Judith Hopf, LESS, 2022, Film, 3’. Production Frac Île-de-France, Le Plateau. © Adagp, Paris, 2022 / Judith Hopf. Courtesy de l’artiste.

Extrait du communiqué de presse :

 

Judith Hopf, Untitled (Grashalm), 2020. Béton, métal,298 x 49,5 x 122 cm, 13 x 49,5 x 49,5 cm (base). Photo : Ulrich Gebe! © Adagp, Paris, 2022 / Judith Hopf. Courtesy de l’artiste et de la galerie Deborah Schamoni, Munich.
Judith Hopf, Untitled (Grashalm), 2020. Béton, métal,298 x 49,5 x 122 cm, 13 x 49,5 x 49,5 cm (base). Photo : Ulrich Gebe! © Adagp, Paris, 2022 / Judith Hopf. Courtesy de l’artiste et de la galerie Deborah Schamoni, Munich.
Judith Hopf, Some End of Things- the Conception of Youth, 2011. Film, 3’. © Adagp, Paris, 2022 / Judith Hopf. Courtesy de l’artiste et de kaufmann repetto Milan / New York.
Judith Hopf, Some End of Things- the Conception of Youth, 2011. Film, 3’. © Adagp, Paris, 2022 / Judith Hopf. Courtesy de l’artiste et de kaufmann repetto Milan / New York.
Judith Hopf, Phone User 2, 2021. Argile, socle de béton, 182 x 60 x 56 cm / 71.6 x 23.6 x 22 in. Photo : Andrea Rossetti. © Adagp, Paris, 2022 / Judith Hopf Courtesy de l’artiste et de kaufmann repetto Milan / New York.
Judith Hopf, Phone User 2, 2021. Argile, socle de béton, 182 x 60 x 56 cm / 71.6 x 23.6 x 22 in. Photo : Andrea Rossetti. © Adagp, Paris, 2022 / Judith Hopf Courtesy de l’artiste et de kaufmann repetto Milan / New York.

Commissaires de l’exposition : 

François Aubart, commissaire d‘exposition indépendant, éditeur et enseigne à l’École nationale supérieure d’arts de Paris-Cergy (ENSAPC)

Xavier Franceschi, directeur du Frac Île-de-France

Émilie Renard, directrice de Bétonsalon – centre d’art et de recherche




Le Plateau s’associe à Bétonsalon pour accueillir une exposition en deux volets de Judith Hopf, du 22 septembre au 11 décembre 2022. Depuis les années 2000, l’artiste allemande réalise des sculptures et des films alimentés par des réflexions sur les relations que les êtres humains entretiennent avec la technologie. Pour cette première exposition monographique en France, orchestrée par trois commissaires : François Aubart, Xavier Franceschi et Émilie Renard, Judith Hopf réunit des oeuvres existantes et inédites. Son titre, Énergies, désigne ce qui alimente chacun de nos appareils électriques au quotidien, envisagé selon un point de vue autant technique que philosophique.



Alors qu’à Bétonsalon les oeuvres tournent autour de la consommation d’énergie, au Plateau c’est de sa production dont il est question. Judith Hopf réalise pour l’occasion plusieurs oeuvres qui évoquent la transformation des phénomènes météorologiques que sont la pluie et le soleil en électricité. Cette maîtrise de l’environnement s’exprime également dans des sculptures réalisées à partir de panneaux solaires grignotés comme un gruyère ou troués pour que l’on puisse voir à travers et observer ce qu’ils cachent, ce qu’il y a derrière. L’instrumentalisation du paysage que l’artiste nous donne à voir, anime par ailleurs les sculptures d’animaux qui évoquent à leur tour une nature devenue production sérielle, déshumanisée, un monde où la rationalité l’emporte sur l’attention au vivant.



Cette exposition s’appuie sur des oppositions entre évolution naturelle et croissance bornée pour composer des mises en scène cinglantes et d’autant plus corrosives que c’est notre quotidien qu’elles représentent. Pétrie de réflexions sur la consommation énergétique, Énergies nous rappelle que nombre de nos actions et de nos activités dépendent de la conversion de ressources naturelles en puissance et qu’en outre, en cette période de communication par visioconférence, il en faut de grandes quantités, électriques et humaines, pour monter des expositions. Les Phone Users, des sculptures de personnages occupés à consulter leurs téléphones, qui se répondent de Bétonsalon au Plateau, peuvent en être la métaphore. Ils continueront de communiquer jusqu’à devoir annoncer à l’autre : « je n’ai plus de batterie. »

Judith Hopf, Flock of Sheep, 2014. Béton, panneaux de polystyrène, bois, armature en fer, dessin au fusain, dimensions variables. © Adagp, Paris, 2022 / Judith Hopf. Courtesy de l’artiste et de la galerie Deborah Schamoni, Munich.
Judith Hopf, Flock of Sheep, 2014. Béton, panneaux de polystyrène, bois, armature en fer, dessin au fusain, dimensions variables. © Adagp, Paris, 2022 / Judith Hopf. Courtesy de l’artiste et de la galerie Deborah Schamoni, Munich.
Judith Hopf, Dem Kirschbaum ähnelnde Essigbaumast, 2021. Dimensions variables. Vue d’installation, Haubrok Foundation, Berlin, 2021. © Adagp, Paris, 2022 / Judith Hopf. Courtesy de l’artiste et de la galerie Deborah Schamoni, Munich.
Judith Hopf, Dem Kirschbaum ähnelnde Essigbaumast, 2021. Dimensions variables. Vue d’installation, Haubrok Foundation, Berlin, 2021. © Adagp, Paris, 2022 / Judith Hopf. Courtesy de l’artiste et de la galerie Deborah Schamoni, Munich.

Édito – Avis de tempête



Il n’est pas rare que le travail de Judith Hopf déclenche un léger sourire, voire un rire franc. Très tôt, ses œuvres suscitent ce type de réaction bien que pour l’artiste l’humour ne soit pas une fin en soi. Son travail est plutôt nourri d’interrogations sur les relations entre les êtres humains et leurs outils. L’artiste explore ainsi les modes de production et de consommation que les technologies initient autant que les dépendances qu’elles engendrent et l’expansion qu’elles alimentent. Depuis les années 2000, Judith Hopf réalise des sculptures et des films qui mettent en scène des situations et utilisent des matériaux marqués par ces préoccupations. Citons à titre d’exemple sa série de sculptures Laptop Men (2018) : ces figures géométriques en métal qui évoquent d’étranges mobiliers urbains ou des sculptures modernes, s’avèrent représenter un corps au travail, fléchi, tenant un ordinateur portable. Faits du même matériau, le corps et l’ordinateur ont fusionné en une seule entité dont on ne sait laquelle contrôle l’autre. Chez Judith Hopf, cette réflexion sur l’aliénation aux nouvelles technologies est souvent accompagnée d’une attention aux outils et processus qui permettent de réaliser ses pièces. Ainsi, Trying to Build a Mask (Tentant de construire un masque, 2012-2019) est une série de masques réalisés à partir d’emballages d’appareils électroniques qui ont été pliés, scannés puis reproduits à l’imprimante 3D. Son titre indique une activité et laisse entendre la possibilité d’échec que toutes les technologies prétendent éradiquer. En utilisant ces emballages jetables pour pratiquer ce qui ressemble à un passe-temps, Judith Hopf approche la technologie par son versant fétichiste et met en doute la course à la réussite et à l’accomplissement, tant vantée par l’esprit du capitalisme.

Les préoccupations de Judith Hopf pour les modes contemporains de production et de consommation se manifestent à la fois dans les matériaux qu’elle utilise et les formes qu’elle produit. Les objets qu’elle réalise semblent pris entre deux états, entre le sublime qu’ils évoquent et le ridicule ou la déception qu’ils engendrent réellement. Si l’oeuvre de Judith Hopf nous fait souvent sourire, c’est pour cela. C’est parce qu’elle représente des situations ou des objets toujours prêts à basculer d’un état à un autre, entre ce qu’ils sont factuellement, ce qu’ils pourraient être et ce qu’ils prétendent être ; entre leur état et la fiction à laquelle ils voudraient nous faire croire. L’oeuvre de Hopf est gorgée des paradoxes qui tapissent notre quotidien. Ils apparaissent là avec toute leur étrangeté. Peut-être est-ce pour cela que son travail est parfois qualifié de cartoonesque, parce que les pires violences humaines y apparaissent dans toute leur stupidité.

Cette exposition à Bétonsalon et au Plateau est l’occasion pour Judith Hopf de présenter des oeuvres anciennes et récentes ainsi que des productions inédites. Son titre, Énergies, désigne ces flux invisibles et continus qui traversent aussi bien nos appareils électriques que chacun·e d’entre nous, qui dépensons tant d’énergie à les utiliser, faisant bien souvent corps avec eux. Judith Hopf métamorphose ces éléments qui alimentent notre quotidien pour nous inviter à les observer plus qu’à les consommer. L’artiste nous rappelle à quel point nos activités dépendent de la conversion de ressources naturelles en puissance, et à quel point nos représentations de la nature la réduisent à une ressource disponible.

Au Plateau, on découvre l’imposante sculpture en métal d’un brin d’herbe réalisée avec une précision industrielle. Cette qualité monumentale invite à contempler un élément unique extrait d’un ensemble : la pelouse, une plante autant qu’un décor, largement exploitée à la ville comme à la campagne, dans les parcs et les jardins, ces paysages culturels, autant que dans les champs pour le pâturage. Dans les deux cas, elle a une fonction précise, indispensable mais galvaudée. En représentant de façon majestueuse un élément unique parmi une foule de semblables auxquels on ne porte aucune attention, Judith Hopf renverse les valeurs, celles des matériaux, de l’importance, de la grandeur et de la signifiance. Elle rappelle également que l’herbe, comme toutes les plantes, croît grâce à l’eau et à la lumière ; deux sources d’énergie figurées dans des peintures murales de pluie et de soleil, des évènements climatiques l’un comme l’autre convertibles en électricité, des traits de pluie, des rayons de soleil bien alignés, parallèles et tout à fait ordonnés. Cette possibilité de les rendre productifs et de les maîtriser s’exprime dans une troisième peinture murale qui représente un champ de panneaux solaires, un motif géométrique répétitif qui orne nos paysages. C’est également avec des panneaux solaires que Judith Hopf réalise une nouvelle sculpture qui fait basculer ce matériau dans un monde fantasmagorique où il est percé de larges cercles. Il est peut-être devenu un objet dysfonctionnel, un matériau malléable, grignoté comme un gruyère, pour que l’on puisse voir le ciel à travers.

L’instrumentalisation du paysage qui s’exprime dans ces oeuvres anime également ses sculptures d’animaux. Flock of Sheep (Troupeau de moutons, 2014) réunit un petit attroupement de blocs de béton sommairement moulés dans des cartons d’emballage, certains montés sur quatre tiges métalliques à la manière de pattes. Leurs têtes, brossées d’un geste sommaire, leur confèrent une humeur, un sourire ou un air morose, sans qu’ils ne se distinguent pour autant les uns des autres. Leurs corps, composés en série avec des matériaux industriels, rappellent plus l’architecture brutaliste et la planification que des singularités. Ils évoquent une nature devenue production sérielle, désincarnée, un monde où la rationalité l’emporte sur l’attention au vivant. Depuis 2015, Judith Hopf réalise également des serpents, ces animaux dont Gilles Deleuze évoque la souplesse exemplaire dans « Post-scriptum sur les sociétés de contrôle », pour exprimer un état d’asservissement qui prône l’adaptabilité comme moyen de répondre à toutes les demandes sociales (1) . Ceux-là sont constitués de barres de béton, toutes de même section, jointes les unes aux autres selon des angles différents : produits d’un système rigide aux variations infinies, leur souplesse est figée. Leurs dents sont constituées de fines bandes de papier sur lesquelles des e-mails sont imprimés, ils semblent pris dans des correspondances possiblement perfides. La forme de consommation inconsidérée qui teinte l’exposition à Bétonsalon résonne avec la transformation de la nature en énergie au Plateau. On aurait tort cependant de voir dans cette double exposition un programme clairement énoncé. Les nombreux retournements et déplacements que Judith Hopf opère, en représentant des scènes si communes qu’elles en deviennent étranges ou sarcastiques, ou encore en utilisant des matériaux pour manipuler leurs sens, sont autant d’invitations à penser des alternatives, à percevoir autrement les énergies environnantes plutôt qu’à les consommer toujours plus et plus vite. Énergies s’appuie sur des oppositions entre évolution naturelle et croissance bornée pour composer des mises en scène cinglantes et d’autant plus corrosives que c’est notre quotidien qu’elle représente. D’ailleurs, on trouvera également en creux de cette exposition en deux volets une réflexion sur l’art et sa production, dans un choix de matériaux qui cherche des alternatives à la production effrénée. Énergies n’est pas sans rappeler qu’en cette période de communication par visioconférence, il en faut de grandes quantités, électriques et humaines, pour monter des expositions. Les Phone Users qui cherchent probablement à se joindre entre Bétonsalon et Le Plateau peuvent en être la métaphore, ils tentent peut-être de communiquer sans pouvoir s’annoncer les uns aux autres : « J’ai presque plus de batterie. » 

François Aubart, Xavier Franceschi, Émilie Renard, commissaires de l’exposition

1 Gilles Deleuze, « Post-scriptum sur les sociétés de contrôle ». Pourparlers. 1972-1900, Paris, les Éditions de Minuit, 1990, p. 240-247.

Judith Hopf (née en 1969, Karlsruhe, Allemagne) vit et travaille à Berlin. Ses oeuvres ont été exposées dans de nombreuses institutions internationales : à SMK – National Gallery of Denmark, Copenhague (2018); KW Institute for Contemporary Art, Berlin (2018); Hammer Museum, Los Angeles (2017); Museion, Bolzano (2016); Neue Galerie, Kassel (2015); PRAXES, Berlin (2014); Kunsthalle Lingen, Lingen (2013); Studio Voltaire, Londres (2013); Fondazione Morra Greco, Naples (2013); Schirn Kunsthalle Frankfurt, Francfort (2013); Malmø Konsthall, Malmø (2012); Grazer Kunstverein, Graz (2012); Badischer Kunstverein, Karlsruhe (2008); Portikus, Francfort (2007); Secession, Vienne (2006); Caso Institute for Art and Design, Utrecht (2006). Elle a participé à de nombreuses biennales et expositions collectives, telles que Lenbachhaus, Munich (2018); Mudam, Luxembourg (2017); La Biennale de Montréal (2016); 8th Liverpool Biennial, Liverpool (2014); Sculpture Center, New York (2014); Triennale for Video Art, Mechelen (2012); dOCUMENTA13, Kassel (2012); Kunsthalle Basel (2011); Kunsthall Oslo, Oslo (2010). Judith Hopf enseigne à l’école d’art supérieure de Francfort, la Städelschule.