🔊 “Picasso Iconophage” au Musée national Picasso, du 11 juin au 15 septembre 2024
“Picasso Iconophage”
au Musée national Picasso, Paris
du 11 juin au 15 septembre 2024
Musée national Picasso
PODCAST – Entretien avec CĂ©cile Godefroy, responsable du Centre d’Études Picasso au MusĂ©e national Picasso-Paris, et co-commissaire de l’exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 10 juin 2024, durée 16’36,
© FranceFineArt.
Extrait du communiqué de presse :
Amphore chalcidienne à figures noires. Face A, panse : Thésée tuant le Minotaure en présence de trois femmes.Vers 510 av J.-C. E805. Groupe des Amphores à panse (6e siècle av J.-C.) Localisation : Paris, musée du Louvre © GrandPalaisRmn (musée du Louvre) / Tony Querrec.
Commissariat :
Cécile Godefroy, responsable du Centre d’Études Picasso au Musée national Picasso-Paris, docteure en histoire de l’art et membre de l’Association Internationale des Critiques d’art.
Anne Montfort-Tanguy, conservatrice au cabinet d’Art graphique du Musée national d’art moderne et professeure en histoire de l’art moderne à l’École du Louvre.
Le Musée national Picasso-Paris présente sa nouvelle exposition temporaire intitulée « Picasso Iconophage » du 11 juin au 15 septembre 2024 dans les espaces du rez-de-chaussée. L’exposition analyse la modernité de la conception de l’image de Pablo Picasso en explorant les sources artistiques et extra-artistiques de son oeuvre et leurs modes d’appropriation.
Pablo Picasso, L’Ombre, 1953. Musée national Picasso-Paris. © GrandPalaisRmn (musée national Picasso-Paris) / Mathieu Rabeau. © Succession Picasso 2024.
Nicolas Poussin, L’enlèvement des Sabines, 1637-1638. Musée du Louvre, Département des Peintures. © GrandPalaisRmn (musée du Louvre) / Tony Querrec.
Pablo Picasso, L’enlèvement des Sabines, 1962. © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. GrandPalaisRmn / Christian Bahier / Philippe Migeat. © Succession Picasso 2024.
Parcours de l’exposition
Multiréférencée, l’oeuvre de Pablo Picasso frappe par la richesse de sa culture visuelle. L’artiste, célébré par les avant-gardes comme le pourfendeur de l’académisme, n’a eu pourtant de cesse de se présenter comme l’héritier d’une longue tradition picturale. Son rapport ambigu à l’histoire de l’art pose à la fois la question des sources et celle de leurs modes d’appropriation. Visiteur assidu du Louvre, Picasso a accumulé sa vie durant photographies, cartes postales, reproductions, affiches, revues et livres illustrés auxquels il faut encore ajouter les oeuvres de sa collection personnelle. Cet amoncellement qui constitua pour l’artiste un riche répertoire iconographique est symptomatique d’une nouvelle façon de penser l’image, affranchie du champ artistique et du temps historique. Il n’existe néanmoins aucune citation littérale dans son oeuvre : ses variations sur les tableaux des grands maîtres sont avant tout des déconstructions ; ses formes et ses compositions sont toujours hybrides. L’exposition propose de mettre en évidence l’inscription des peintures, des sculptures et des dessins de Picasso dans un réseau complexe d’images sources à travers quatre thèmes qui traversent son oeuvre : le héros, le Minotaure, le voyeur, le mousquetaire.
Salle 0.2 – HĂ©ros
Le héros de Pablo Picasso ne s’illustre pas par ses exploits légendaires mais endure un sort cruel. Face aux drames collectifs ou personnels, l’artiste puise son inspiration dans la peinture d’histoire. Les « formules du pathos » des scènes religieuses, mythologiques ou révolutionnaires conservent, pour lui, leur actualité. Il conjugue ainsi L’Enlèvement des Sabines de David au présent, croisant au besoin l’Antiquité rêvée des classiques avec les cultures extraoccidentales. Les sujets tirés de l’actualité dépeints par Eugène Delacroix, Francisco de Goya ou Édouard Manet s’inscrivaient dans leur époque, par leur costume moderne. Tout en s’y référant, Picasso fait de la représentation de Massacre en Corée un archétype.
Salle 0.3 – Minotaure
Apparue en début d’année 1928 dans le corpus du peintre, la figure du Minotaure occupe une place centrale dans l’oeuvre de Pablo Picasso des années 1930. Les fouilles gigantesques du palais de Minos à Cnossos conduites par Arthur John Evans au début du XXème siècle apportèrent un nouvel éclairage à la légende, qui fascina nombre d’artistes surréalistes et donna son titre à la revue d’Albert Skira et Tériade pour laquelle Picasso réalisa la couverture du premier numéro en 1933. Tour à tour triomphant et transi d’amour ou jeté à terre et agonisant, le Minotaure renvoie à la symbolique multiséculaire de Mithra convoquant les aurochs de la préhistoire, aux ex-voto de l’Antiquité ibère, aux scènes sacrificielles du monde gréco-romain, jusqu’au cycle de La Tauromachie de Francisco de Goya, aux couples enlacés d’Auguste Rodin, aux danseurs des Ballets russes et aux affiches de corridas contemporaines.
Salle 0.4 – Atelier
Près de deux cent mille pièces d’archives, précieusement gardées par l’artiste au gré de ses déménagements successifs, sont aujourd’hui conservées au Musée national Picasso-Paris et documentent l’oeuvre et ses processus créatifs : cartes postales et reproductions photographiques reçues et acquises par Pablo Picasso, revues et ouvrages complètent la connaissance que nous avons aujourd’hui de ses ateliers. Inscrits dans le temps de la préhistoire, de l’Antiquité et de la Renaissance, du Siècle d’or flamand et espagnol, du classicisme, du néoclassicisme et du romantisme, les nus et les portraits dominent le corpus d’images. L’ensemble de ces sources forge le catalogue de Picasso, son « musée imaginaire », témoin d’une culture visuelle immense et d’un état d’être au monde éternellement curieux et tourné vers les civilisations du passé, savantes et vernaculaires, occidentales et extra-européennes.
Salle 0.5 – Voyeur
Dans la tradition des peintres de l’interdit, Pablo Picasso donne à voir ce que les convenances ont voulu invisible : maison close, accouplement, fonction corporelle. Le pouvoir subversif de ces images ne réside pas tant dans leurs sujets que dans l’affirmation de la liberté absolue de l’artiste. La représentation du nu féminin est traditionnellement acceptée comme une métaphore de la beauté, mais pour peu que Picasso montre le corps dans sa réalité ou la scène dans son intégralité (le modèle s’offrant au regard du peintre), elle se dote à nouveau d’une tournure licencieuse. À la suite d’Édouard Manet dont il réactive Le Déjeuner sur l’herbe, Picasso s’attache à montrer l’artifice à l’oeuvre dans la peinture, et le spectateur, convié à partager la vision du peintre, assume à son tour la position du « voyeur ».
Salle 0.6 – Mousquetaire
Ce personnage, omniprésent dans les dernières oeuvres de l’artiste, doit autant aux portraits du peintre flamand, du Greco ou de Diego Velázquez qu’au Don Quichotte de Miguel de Cervantes. Remis au goût du jour par les films de cape et d’épée, il rejoint le panthéon des grandes figures masculines, constitué entre autres de matadors et de musiciens, avec lesquels il se confond parfois. Ultime personnification de l’artiste, l’image du mousquetaire offre un équivalent aux valeurs chevaleresques qu’il incarne, dans la vivacité des traits et l’exubérance des couleurs.
#catalogue : Picasso Iconophage – CoĂ©dition MusĂ©e national Picasso-Paris / GrandPalaisRmn