🔊 “Jochen Lempert” au Centre Pompidou, galerie de photographies, Paris, du 11 mai au 4 septembre 2022
“Jochen Lempert“
au Centre Pompidou, galerie de photographies, Paris
du 11 mai au 4 septembre 2022
PODCAST – Interview de Julie Jones, conservatrice, cabinet de la photographie – Centre Pompidou et co-commissaire de l’exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 10 mai 2022, durée 15’21.
© FranceFineArt.
Extrait du communiqué de presse :
Commissariat :
Florian Ebner, conservateur, chef de service, et Julie Jones, conservatrice, cabinet de la photographie, Centre Pompidou.
Cette exposition rétrospective présente trois décennies du travail de Jochen Lempert (né en 1958, vit et travaille à Hambourg). Biologiste de formation, spécialiste de libellules, ce n’est qu’en 1989, à 31 ans, qu’il débute sa carrière de photographe après une période fructueuse au sein du collectif de cinéma expérimental Schmelzdahin [Dissous-toi]. Cet héritage scientifique reste au fondement de sa pratique artistique, empreinte d’images de la nature, où l’animal côtoie le végétal. Ces images délicates, poétiques, toujours en noir et blanc, rendent hommage aux explorations photographiques des plantes par Anna Atkins et Karl Blossfeldt ; elles résonnent tout autant avec l’iconographie surréaliste d’un Jean Painlevé comme avec l’oeil objectif des photographes modernistes allemands, présentés parallèlement dans le cadre de l’exposition « Allemagne / Années 1920 / Nouvelle Objectivité / August Sander » (Galerie 1).
L’exposition « Jochen Lempert » fait se côtoyer quelques-unes des toutes premières oeuvres de l’artiste avec des oeuvres plus récentes, sans hiérarchie chronologique. Le choix des oeuvres et leur disposition dans l’espace – sur les cimaises ou en vitrine – sont pensés comme une installation unique, in situ, au sein de la Galerie de photographies.
Les trois sections qui rythment le parcours éclairent, tour à tour, des leitmotivs dans l’oeuvre de Jochen Lempert. Réflexion sur le dialogue entre nature et culture, une première partie, Physionomies / Morphologies, rassemble des études de formes et de corps, issus des mondes végétal, animal et humain ; dans la seconde partie, intitulée Bioluminescence, des photographies d’organismes vivants absorbant et/ou générant de la lumière rappellent l’obsession de l’artiste pour la captation des épiphanies lumineuses ; enfin, une troisième partie intitulée Perception, révèle le « presque » (in)visible, offert à notre oeil grâce au regard attentif, patient, et humble de l’artiste.
Jochen Lempert réalise le plus souvent ses photographies avec un objectif 50 mm, qui lui permet de rester au plus près de la vision humaine. Ainsi, ce que livre l’artiste est davantage une invitation à mieux regarder ce que la nature nous offre, en ouvrant les yeux et en prenant le temps, plutôt qu’une plongée dans le spectaculaire instantané de la macrophotographie. Avec une innocence et une curiosité retrouvées, on s’émerveille devant des tours d’éponges naturelles, la force herculéenne d’une fourmi, le tissage parfait d’une toile d’araignée, l’ombre d’un papillon sur l’asphalte, la trajectoire frénétique d’une mouche en plein vol ou encore la constellation de tâches de rousseur sur une épaule dénudée. Jochen Lempert s’autorise, parfois, un basculement vers une iconographie presque magique, lorsqu’il joue des qualités fantasmagoriques du photogramme, cette image obtenue sans appareil, par simple contact avec la matière photosensible. Ainsi, l’artiste fixe les traces éphémères de quatre minuscules grenouilles sur le papier sensibilisé, enregistrant leur comportement entre mouvement et immobilité.
Observateur inlassable du vivant, Jochen Lempert porte tout autant d’attention à la réalisation de ses tirages. Parfait laborantin, il prépare lui-même ses révélateurs et ses fixateurs et il privilégie souvent des papiers texturés ou mats, qui accentuent la sensualité de ses images. Alternant grands, moyens, jusqu’aux minuscules formats, il construit ensuite de complexes récits visuels, en travaillant avec soin les rapports des images entre elles : analogies formelles ou conceptuelles, ces compositions d’images prennent vie dans l’espace d’exposition.
L’exposition « Jochen Lempert » s’inscrit dans une programmation du Centre Pompidou révélant les filiations artistiques en Allemagne. Au même moment, l’exposition « Allemagne / Années 1920 / Nouvelle Objectivité / August Sander », première grande exposition sur l’art et la culture de la Neue Sachlichkeit (Nouvelle Objectivité) en Allemagne, offrira en Galerie 1 un panorama inégalé de ce courant artistique.
En contrepoint à ces expositions, le Centre Pompidou vivra à l’heure berlinoise jusqu’à l’été avec l’événement « Ça c’est Berlin ! » pour faire découvrir au public cette capitale résolument cosmopolite, foyer des créateurs et des artistes, ville en profonde mutation, à travers tous les arts et toutes les disciplines. Pendant plusieurs semaines, artistes et intellectuels berlinois seront le coeur d’une programmation embrassant tous les champs de la vie culturelle de la capitale allemande. Depuis Hambourg, distant de la vibrante Berlin, Jochen Lempert réalise une oeuvre poétique et méditative complétant ce tour d’horizon de la scène allemande.
#JochenLempert – biographie
Jochen Lempert est né en 1958 à Moers (en Rhénanie-du-Nord-Westphalie/Allemagne), il vit et travaille à Hambourg. Entre 1980 et 1988, il étudie à la Friedrich Wilhelms-Universität de Bonn où il obtient un diplôme en biologie avec le projet de recherche « Études sur la faune, l’écologie et la reproduction des libellules (Odonota) dans les eaux de la forêt tropicale humide au Libéria, Afrique de l’Ouest ». En même temps, entre 1978 – 1989, il forme, avec Jochen Müller et Jürgen Reble, le collectif de cinéma expérimental Schmelzdahin [Dissous-toi]. Ensemble, ils explorent les possibilités offertes par les procédés de traitements chimiques et la pellicule celluloïd, y compris la culture de bactéries. À la fin des années 1980, Jochen Lempert se tourne vers la photographie pour développer une oeuvre singulière, saluée pour la première fois en 1990 par la Bourse pour la photographie contemporaine de la Fondation Alfried Krupp von Bohlen und Halbach, une des distinctions les plus renommées en Allemagne depuis 1982. Il est également lauréat du prix Ars Viva – Photographie en 1995 (avec Thomas Demand, Barbara Probst et Wolfgang Tillmans), et reçoit, en 2017, le Camera Austria Award for Contemporary Photography par la ville de Graz, en Autriche.