🔊 “Ilya Répine (1844-1930)” Peindre l’âme russe, au Petit Palais, Paris, du 5 octobre 2021 au 23 janvier 2022.
“Ilya Répine (1844-1930)“ Peindre l’âme russe
au Petit Palais, Paris
du 5 octobre 2021 au 23 janvier 2022
PODCAST – Interview de Stéphanie Cantarutti, conservatrice en chef des peintures du XIXe au Petit Palais, et co-commissaire de l’exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 4 octobre 2021, durée 16’59.
© FranceFineArt.
Extrait du communiqué de presse :
Commissariat :
Christophe Leribault, directeur du Petit Palais.
Stéphanie Cantarutti, conservatrice en chef des peintures du XIXe au Petit Palais.
Tatiana Yudenkova, cheffe du département des peintures (seconde moitié du XIXe siècle – début du XXe siècle), Galerie nationale Trétiakov, Moscou.
Du 5 octobre 2021 au 23 janvier 2022, le Petit Palais présente la première rétrospective française consacrée à Ilya Répine, l’une des plus grandes gloires de l’art russe. Peu connu en France, son oeuvre est pourtant considéré comme un jalon essentiel de l’histoire de la peinture russe des XIXe et XXe siècles. Une centaine de tableaux, prêtés notamment par la Galerie nationale Trétiakov de Moscou, le Musée d’État russe de Saint-Pétersbourg et le musée d’art de l’Ateneum d’Helsinki, dont certains très grands formats, permettront de retracer son parcours à travers ses chefs-d’oeuvre.
Figure incontournable du monde de l’art de l’époque, Répine s’intéresse aux différents aspects de la vie culturelle : littérature, musique, sciences… Il est très proche de nombreuses personnalités russes comme l’écrivain Tolstoï, le compositeur Moussorgski, ou encore le collectionneur Trétiakov. Témoin de tous les bouleversements de la Russie de son temps, Répine est particulièrement attentif aux profondes mutations historiques et sociales que connaît son pays et en fait l’écho à travers ses oeuvres.
Répine débute sa carrière à l’Académie impériale des Beaux-Arts de Saint-Pétersbourg. Associé au courant réaliste, il rejoint ensuite le groupe des Ambulants, qui prônent une peinture qui s’inspire de la vie du peuple russe. Sa première oeuvre majeure, Les Haleurs de la Volga (1870-1873) assoit immédiatement sa réputation. Artiste, mais aussi professeur, théoricien de l’art et écrivain, son travail s’étend au-delà même des frontières russes. Grand voyageur, il découvre l’art français dans les années 1870 et participe avec succès aux Expositions universelles parisiennes.
Dès les années 1860, Répine réalise un grand nombre de portraits de sa famille et de son entourage proche, qu’il peint avec tendresse et réalisme. Portraitiste prolifique, il va représenter la plupart des figures artistiques majeures de son temps, comme les compositeurs du « Groupe des Cinq », Ivan Tourgueniev ou encore Léon Tolstoï, dont il fréquente les résidences de Moscou et d’Iasnaïa Poliana. L’ancienne Russie lui inspire plusieurs grands tableaux spectaculaires, à l’instar des Cosaques zaporogues écrivant une lettre au sultan de Turquie (1880-1891), l’une de ses oeuvres les plus célèbres. Fasciné par les mouvements populistes qui remettent alors violemment en question le régime tsariste, il accepte néanmoins plusieurs grandes commandes du pouvoir : il se voit notamment confier la composition monumentale Alexandre III recevant les doyens des cantons (1886), le Portrait de Nicolas II (1896) ainsi que d’autres commandes officielles importantes. Les Révolutions de 1905 et de 1917 lui permettent aussi de saisir l’actualité et d’interroger l’histoire de la Russie.
Professeur puis recteur de l’Académie impériale des Beaux-Arts de Saint-Pétersbourg, il observe la scène artistique et forme de nombreux élèves. En 1903, Répine s’installe définitivement dans sa maison des Pénates, à Kuokkala (actuellement Répino), dans l’ancien grand-duché de Finlande alors rattaché à l’Empire russe. Là, il continue à peindre, à expérimenter et à recevoir de nombreuses visites. En 1918, avec la proclamation de l’indépendance de la Finlande, Répine devient un exilé malgré lui. Il refuse néanmoins toutes les invitations du régime soviétique pour tenter de le faire rentrer. C’est là, à quelques kilomètres de Saint-Pétersbourg, devenue Léningrad, que Répine finit ses jours, en 1930, à l’issue d’une carrière qui aura épousé tous les bouleversements de son temps.
Grâce à une scénographie immersive et des prêts exceptionnels, le parcours de l’exposition plongera les visiteurs dans la Russie des tsars et des révolutions, et présentera la diversité des sujets et des styles développés par Répine au cours de sa carrière : un vaste panorama pour mieux découvrir ce peintre de l’âme russe.
Parcours de l’exposition
Salle 1 – Saint-Pétersbourg
Ilya Répine naît en 1844 dans une famille de serfs. Il se forme à la peinture d’icônes dans son village natal de Tchougouïev (Ukraine), puis commence ses études à l’école de dessin de la Société d’encouragement des artistes. En 1864, il entre à l’Académie impériale des beaux-arts de Saint-Pétersbourg, où il fait la rencontre déterminante du peintre Ivan Kramskoï (1837-1887), le chef de file des Ambulants. Ces artistes, eux aussi passés par l’enseignement académique, pratiquent, depuis leur « révolte des Quatorze » en 1863, une peinture réaliste, reflet de la vie du peuple et de ses préoccupations. Ils organisent, dans toutes les grandes villes de l’empire, des expositions artistiques itinérantes qui présentent la nouvelle peinture du groupe. Si Répine ne devient membre des Ambulants qu’en 1878, il partage très tôt leur vision. Il est également proche de l’influent critique d’art Vladimir Stassov, qui cherche aussi à remettre à l’honneur des sujets issus de la vie du peuple russe. En 1873, Répine présente à l’exposition annuelle de l’Académie son grand tableau Les Haleurs de la Volga, immédiatement perçu comme une oeuvre majeure, qui assoit sa réputation.
Salle 2 – Paris
En 1871, Répine obtient une bourse de l’Académie des beaux-arts de Saint-Pétersbourg qui lui permet d’aller étudier à l’étranger. Il choisit la France qui, entre 1860 et 1900, attire une centaine de peintres russes. Le jeune artiste quitte la Russie en 1873 et séjourne durant trois ans à Paris, où il s’installe à Montmartre avec sa famille. Ce nouvel environnement stimule sa créativité et ses recherches. Il se met en quête de sujets inédits pour des toiles de grand format et annote ses carnets de quantité d’idées. Il est séduit par la modernité des peintres français et par le courant impressionniste qui émerge. Sur place, il peint de nombreux portraits, pour gagner sa vie. En dépit de l’interdiction formelle d’exposer au Salon à Paris, édictée par l’Académie de Saint-Pétersbourg, il y présente une série de toiles en 1875 et 1876. À Paris, Répine fréquente une colonie russe importante composée de peintres, de sculpteurs, d’écrivains et de réfugiés politiques. La figure centrale du groupe est Ivan Tourgueniev (1818-1883), dont les romans annoncent les mutations sociales à venir en Russie. Sous la houlette du paysagiste Alexeï Bogolioubov (1824-1896), lui aussi installé à Paris, Répine découvre la Normandie et expérimente la peinture de plein air. Après ce séjour riche en nouvelles expériences, il rentre en Russie pour y poursuivre une carrière féconde. Répine reviendra ensuite à Paris à plusieurs reprises entre 1883 et 1900, en voyage d’agrément ou à l’occasion des Expositions universelles dont il est à la fois un exposant et un membre du jury. Un espace de projection adjacent est spécifiquement dédié à la présence de la culture russe à Paris au XIXe siècle.
Salle 3 – Le cercle familial
Portraitiste prolifique, Répine prend souvent pour modèles les membres de sa famille qu’il peut faire poser à loisir. Dans ce cercle restreint, il donne libre cours à son approche novatrice, à ses expérimentations sur la lumière et les couleurs qui renouvellent le genre du portrait en Russie. Soucieux de rendre ses modèles avec véracité, l’artiste n’hésite pas à les représenter dans des attitudes ou des poses audacieuses – travail, méditation, sommeil… Sa première épouse, Véra, et ses enfants, la petite Véra, Nadia et Youri, figurent parmi ses modèles de prédilection. Leurs représentations au fil de l’enfance donnent lieu à de charmantes compositions empreintes de naturel.
Salle 4 – La vie en Russie
Répine ne rejoint officiellement la Société des expositions artistiques ambulantes qu’en 1878. Pourtant, il partage très tôt les idées de ses membres, celles d’une peinture nouvelle, en prise avec la Russie de son temps et qui puise son inspiration dans la réalité d’alors. Il peint de nombreux épisodes tirés de la vie du peuple dans un monde encore majoritairement paysan. Le thème de la procession religieuse traverse ainsi son oeuvre jusque dans les années 1920, traité parfois simultanément dans plusieurs tableaux de grand format. L’artiste illustre la persistance des traditions russes et la ferveur de ses contemporains pour les événements collectifs, comme les fêtes ou les rites religieux. C’est également l’occasion pour lui de brosser de puissants portraits de figures du peuple, prises isolément ou placées à l’intérieur de leur groupe social. Mais Répine témoigne aussi des changements introduits par la lente modernisation de la Russie, tels l’essor du chemin de fer ou les progrès de la médecine.
Salle 5 – Répine portraitiste
Répine est l’un des portraitistes les plus courus de son temps. Il brille dans ce genre durant toute sa carrière, réalisant près de 300 portraits marqués par une forte intensité psychologique. Fasciné par l’âme humaine, il portraiture les célébrités de l’époque : hommes politiques, auteurs, scientifiques, écrivains, femmes du monde et personnalités influentes des milieux artistiques. C’est le collectionneur Pavel Trétiakov, désireux d’honorer les gloires de la Russie, qui passe à l’artiste ses premières commandes importantes de portraits alors que celui-ci se trouve à Paris. Grand amateur de musique, Répine a également immortalisé les compositeurs du « groupe des Cinq » de Moussorgski à César Cui. D’une certaine manière, la démarche de ces musiciens, qui faisaient le choix de privilégier les traditions populaires russes, n’était pas sans rapport avec la sienne.
Salle 6 – L’ancienne Russie
À l’instar d’autres peintres russes de son époque, comme Vassily Sourikov ou Viktor Vasnetsov, Répine s’intéresse aussi à la Russie historique, celle des boyards et des streltsy. Grand peintre d’histoire, il excelle à donner à ses personnages historiques (la tsarevna Sofia, le tsar Ivan le Terrible, les cosaques zaporogues) une présence exceptionnelle. Soucieux d’exactitude historique, il effectue des voyages documentaires ou réalise des recherches historiques sur les costumes et accessoires qui contribuent au décor et à l’atmosphère des scènes qu’il dépeint. Ses tableaux historicisants font parler d’eux et suscitent parfois de violentes controverses, alors même que le pouvoir autocratique du tsar et son héritage sont de plus en plus contestés : en 1885, Alexandre III interdit un temps l’exposition du tableau Ivan le Terrible et son fils Ivan, le 16 novembre 1581, qui montre le tsar venant de tuer son fils aîné et héritier du trône, l’oeuvre étant jugée trop subversive.
Salle 7 – Ivan le Terrible, une oeuvre iconique
Le tableau Ivan le Terrible et son fils Ivan, le 16 novembre 1581 (1885, Galerie nationale Trétiakov, Moscou) est une oeuvre iconique de Répine. Elle est victime d’une attaque en 1913, du vivant de Répine. En 2018, un nouvel acte de vandalisme impose son retrait des collections permanentes de la Galerie nationale Trétiakov pour une restauration qui se poursuit encore aujourd’hui. L’histoire mouvementée de ce tableau est retracée dans cette salle annexe dotée d’un dispositif numérique.
Salle 8 – Le régime tsariste
Lecteur des grands écrivains russes dans les années 1860 (Dostoïevski, Tourgueniev, Tolstoï), Répine puise comme eux son inspiration dans l’histoire bouillonnante de la Russie contemporaine. La fracture entre l’ancien monde et le nouveau, illustrée par Tourgueniev dans ses romans Pères et fils ou encore Terres vierges, irrigue son oeuvre. Répine consacre ainsi plusieurs toiles au mouvement populiste des Narodniki (« Ceux qui vont vers le peuple »), qui s’attaquent au régime tsariste, et illustre le sacrifice des victimes de ces luttes révolutionnaires. Se sentant le devoir d’éduquer les masses populaires, ces intellectuels, issus pour la plupart des classes sociales cultivées, avaient en effet quitté la ville pour la campagne, dans le but de convaincre les paysans de se dresser contre le tsar. Paradoxalement, ils ne rencontrèrent qu’incompréhension et méfiance, certains paysans allant parfois jusqu’à dénoncer ces jeunes gens dont ils ne comprenaient pas les objectifs. Après les violents attentats anarchistes, sévèrement réprimés, et l’assassinat du tsar Alexandre II en 1881, l’artiste tire de l’échec du mouvement des oeuvres d’une grande force suggestive. En parallèle, Répine travaille aussi pour la couronne : il réalise en 1886 ce qu’il appelle avec affection « mon tableau tsariste », le très grand format Alexandre III recevant les doyens des cantons, qui présente le tsar en grand rassembleur de son peuple.
Salle 9 – Léon Tolstoï, le « comte-moujik »
Répine et Léon Tolstoï (1828-1910) se rencontrent pour la première fois en 1880, dans l’atelier du peintre. L’auteur de Guerre et paix (1864-1869) et d’Anna Karénine (1873-1877) est déjà mondialement célèbre. Il vit cependant une grave crise morale, rendue publique dans Ma confession (1879-1882). Issu d’une ancienne famille de la noblesse russe, il y décrit son dilemme et son profond dégoût pour sa vie de nanti. Soucieux de donner un nouveau sens à son existence, il envisage de renoncer à ses biens, pour vivre à l’unisson du peuple, parmi les moujiks (paysans). Entre 1885 et 1887, Tolstoï et Répine se soutiennent lorsqu’ils rencontrent des difficultés similaires avec la censure : le peintre au moment de la polémique liée à son tableau Ivan le Terrible en 1885 et l’écrivain après l’interdiction de sa pièce Le Pouvoir des ténèbres en 1886. Par la suite, les deux hommes se côtoient fréquemment. Répine rend régulièrement visite à Tolstoï et sa famille, à Moscou, rue Khamovniki, et à Iasnaïa Poliana, à 200 kilomètres de là, dans sa résidence familiale d’été. Fasciné par cette légende vivante, Répine réalise pas moins de soixante-dix portraits peints ou sculptés du « comte-moujik ». Même s’ils ne partagent pas toujours les mêmes vues en matière artistique, les deux hommes entretiennent un dialogue qui ne sera rompu que par la mort de l’écrivain en 1910.
Salle 10 – La gloire et les doutes
Au tournant des XIXe et XXe siècles, Répine est un artiste en pleine gloire. Professeur à l’Académie des beauxarts de Saint-Pétersbourg en 1892, il prend la direction de l’atelier de peinture de 1894 à 1907. Toute une jeune génération de peintres gravite autour de lui. Il dispose d’une assez belle fortune : ainsi, la vente du tableau Les Cosaques zaporogues lui rapporte-t-elle suffisamment d’argent pour acquérir en 1892 une propriété à Zdravnievo, dans la région de Vitebsk (aujourd’hui en Biélorussie). En dépit de ses succès, l’artiste traverse des phases de doutes. Plusieurs fois il est tente de renoncer à son enseignement à l’Académie. La publication de ses « Lettres sur l’art » dans les années 1890, déclenchent des polémiques qui l’affectent. Ces années sont également assombries par des difficultés familiales.
Salle 11 – Vers la révolution
Au tournant du siècle, le régime autocratique du tsar peine à contenir les révoltes de la population et à proposer les réformes attendues. À cette époque, Répine répond à la commande du pouvoir d’un immense tableau destiné à mettre en avant le gouvernement éclairé de Nicolas II : La Réunion commémorative du Conseil d’État du 7 mai 1901 (1901-1903, musée d’État russe, Saint- Pétersbourg). Le peintre réalise également des portraits des grands hommes politiques de son temps, à commencer par le tsar lui-même. Cependant, la Russie connaît bientôt des bouleversements majeurs : les révolutions de février et d’octobre 1905 secouent l’ancien monde. La couronne est ébranlée, face à un peuple russe qui réclame la mise en place d’institutions démocratiques. En dépit de ses promesses, Nicolas II continue néanmoins d’exercer son pouvoir de véto sur le Parlement. Le fossé se creuse entre le tsar et son peuple, jusqu’au renversement brutal de la dynastie des Romanov en 1917. Répine trouve une nouvelle fois, dans les événements dramatiques du moment, matière à interroger
Salle 12 – Départ pour la Finlande
En 1899, Répine achète, au nom de sa nouvelle compagne l’écrivaine et photographe Natalia Nordman, un terrain à Kuokkala (aujourd’hui Répino), à 30 kilomètres de Saint-Pétersbourg, sur le territoire du grand-duché de Finlande, alors annexé à la Russie impériale. Il y fait construire une maison pourvue d’un atelier, « Les Pénates », entourée d’un grand parc. En 1903, Répine y emménage définitivement. Il y reçoit un cercle de proches et de nombreux visiteurs, tout en continuant à peindre. Natalia Nordman crée une atmosphère favorable à l’activité de l’artiste. Afin d’éviter les visiteurs imprévus, un jour par semaine leur est dédié. « Les Pénates » deviennent un véritable centre artistique. Les écrivains Maxime Gorki, Léonid Andréïev et Korneï Tchoukovski, le neurologue Vladimir Bechterev, l’acteur Piotr Samoïlov et plusieurs autres personnalités viennent poser pour lui. Les déjeuners végétariens de Natalia Nordman, connue pour ses idées progressistes, deviennent célèbres. Répine établit des relations chaleureuses avec les Finnois, à l’instar du poète Eino Leino ou des peintres Albert Edelfelt et Akseli Gallen-Kallela. Il est également sollicité pour plusieurs expositions à Helsinki, au Salon Strindberg, une grande galerie d’art finlandaise, ou au musée d’art de l’Ateneum.
Salle 13 – La Révolution russe
Répine vit difficilement les années de la Première Guerre mondiale. Avec la proclamation de son indépendance en décembre 1917, le grand-duché de Finlande, où se trouve la maison de l’artiste, cesse d’appartenir à l’Empire russe. Répine devient ainsi un exilé par le coup du sort. La station balnéaire de Kuokkala est désertée, les datchas sont laissées à l’abandon. La guerre civile finlandaise fait rage dans les villages voisins et les échos des combats parviennent jusqu’aux Pénates. De sombres nouvelles arrivent également de Pétrograd, le nouveau nom de Saint-Pétersbourg, où des proches sont installés. Pour autant, Répine continue à se sentir russe et concerné par les développements politiques du régime bolchevique. Il poursuit ainsi son travail inspiré par la révolution de 1917 et la guerre.
Salle 14 – Les dernières années
Les dernières années de la vie de Répine sont marquées par l’isolement, les deuils et les difficultés matérielles. Son regard sur la révolution change. La Russie soviétique le surveille, ce qui le place dans une situation délicate mais ne l’empêche pas pour autant d’exposer partout dans le monde. Invité à se rendre à ses expositions personnelles qui se tiennent à Moscou en 1924, puis à Léningrad l’année suivante, il décline cependant la proposition. Paradoxalement, ces années difficiles sont pourtant riches de nouvelles expérimentations plastiques. Souffrant de douleurs articulaires, Répine peint désormais à coups de larges touches très colorées. Avec cette nouvelle manière, il n’hésite pas à reprendre certaines de ses anciennes compositions qu’il juge essentielles à la compréhension de son art. À l’écart de sa terre natale, il revient dans la dernière décennie de sa vie sur certains sujets religieux (Golgotha, 1922-1925), ou s’emploie à revivifier des thèmes russes traditionnels auxquels il donne un souffle et une expressivité aux limites de l’hallucination (Gopak, 1927-1929).
Répine meurt en Finlande en 1930, à l’âge de 86 ans. Il est enterré dans son domaine des Pénates, selon ses dernières volontés. En 1948, en hommage à Répine, la ville de Kuokkala, intégrée à l’Union soviétique depuis 1944, prend le nom de Répino.