🔊 “Pierres prĂ©cieuses” Ă la Grande Galerie de l’Évolution – MusĂ©um National d’histoire Naturelle, Paris, du 16 septembre 2020 au 14 juin 2021 (prolongĂ©e jusqu’au 22 aoĂ»t 2021)
“Pierres prĂ©cieuses”Â
Ă la Grande Galerie de l’Évolution – MusĂ©um National d’Histoire Naturelle, Paris
du 16 septembre 2020 au 14 juin 2021 (prolongĂ©e jusqu’au 22 aoĂ»t 2021)
MusĂ©um National d’Histoire Naturelle
PODCAST – Interview de François Farges, professeur au MusĂ©um national d’histoire Naturelle, spĂ©cialisĂ© en minĂ©ralogie environnementale et patrimoniale, et co-commissaire scientifique de l’exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 15 septembre 2020, durée 16’02, © FranceFineArt.
© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 15 septembre 2020.
Extrait du communiqué de presse :
Commissaires scientifiques :
François Farges, professeur au Muséum national d’histoire Naturelle, spécialisé en minéralogie environnementale et patrimoniale
Lise MacDonald, directrice du patrimoine et des expositions, Van Cleef & Arpels
Pierres précieuses embrasse l’histoire plurimillénaire des minéraux tout en révélant l’adresse que l’Homme déploie, depuis des siècles, pour servir leur éclat. Cette approche — tant scientifique qu’esthétique — plonge aux origines de la Terre, s’appuie sur les récentes découvertes minéralogiques et souligne l’intérêt, la passion voire la fascination que minéraux, gemmes et bijouxsuscitent depuis toujours dans la plupart des civilisations.
Suivant un parcours à la fois chronologique et thématique, bâti en trois sections, Pierres précieuses brosse en premier lieu une histoire de la Terre et des savoir-faire, explorant la formation originelle des minéraux et leur emploi par l’Homme dont le geste habile se perfectionne au fil du temps.
Puis une deuxième partie — des minéraux aux bijoux— explique les phénomènes naturels que subissent pierres, roches et cristaux, dans les profondeurs de la Terre, avant que la main de l’Homme ne les métamorphose en joyaux. Leur transformation est mise en lumière grâce à une quarantaine de vitrines-écrins, accompagnées de stèles thématiques, de dispositifs audio-visuels et tactiles, qui ponctuent la visite et présentent chaque espèce — diamants, topazes, saphirs, aigues-marines… — sous trois aspects : minéraux bruts, gemmes façonnées et bijoux de haute joaillerie, offrant ainsi une constante mise en perspective de la nature à l’oeuvre.
Dans sa troisième partie, l’exposition rappelle l’importance historique, scientifique et artistique que tient Paris, lieu de savoirs, dans l’avancée et la diffusion des connaissances en minéralogie dont se sont emparés esthètes et artistes jusqu’à nos jours.
Suscitant une déambulation immersive et un dialogue constant entre science et création, Pierres précieuses met en regard quelque 360 minéraux, gemmes et objets d’art issus de la prestigieuse collection du Muséum et plus de 250 créations joaillièrespuisées dans la collection patrimoniale de la Maison Van Cleef & Arpels.
1. Histoire de la Terre
Météorites, roches, cristaux, fossiles… sont autant de témoins de la naissance de la Terre et de son évolution. Formée de matière cosmique, il y a environ 4,56 milliards d’années, puis bombardée de météorites, notre planète constitue le creuset d’une immense variété de minéraux. À ces flux célestes s’ajoutent des mouvements souterrains, tels que la dérive des continents. La collision des plaques tectoniques qu’elle engendre a fait surgir des chaînes montagneuses, abritant des cristaux que l’activité tellurique transporte parfois en surface. De même, au coeur des océans, se forment aussi des minéraux issus d’organismes fossilisés. Dans ce contexte, qu’ils soient porteurs d’une mémoire stellaire, géodynamique ou marine, les minéraux sont témoins et acteurs des mouvements géologiques constants qui habitent la planète.
Une première vitrine, consacrée au rubis, en offre une lecture et une mise en perspective inédites en confrontant grâce à trois pièces emblématiques, trois états différents du minéral — le cristal d’origine, la gemme (pierre taillée), le bijou. Le rubis « brut », datant d’environ 30 millions d’années est présenté tel qu’il fut découvert, dans la vallée de Mogok, au Myanmar. Enchâssé dans sa gangue de marbre blanc, le minéral est mis en regard de gemmes façonnées dans le but d’être montées en bijou. Puis à un troisième stade de sa transformation, par la main de l’Homme, le rubis inspire une création de haute joaillerie, le clip Fuchsia, signé Van Cleef & Arpels. Cette présentation en triptyque, accompagnée d’une vidéo, sera déclinée tout au long de la deuxième partie de l’exposition.
Passée cette entrée en matière, une friseinvite le visiteur à découvrir d’un seul coup d’œil l’histoire de la Terre à la manière d’une généalogie des minéraux. Deux météorites ouvrent ce vaste panorama, suivies d’un zircon australien, cristal datant de 4,4 milliards d’années, alors que la Lune n’existait pas encore. Ainsi, remontant aux origines, une trentaine de spécimens retracent l’histoire de la planète mais aussi des pierres précieuses dans la nature, au sein des mouvements géodynamiques de la Terre, avant que l’homme ne poursuive leur transformation par la création d’un objet ou d’une oeuvre d’art.
… Histoires de savoir-faire
Soulignant la proximité entre minéralogie, gemmologie et joaillerie, Pierres précieuses invite le visiteur à découvrir dans cette section une trentaine d’objets et bijoux d’exception principalement issus des collections du Muséum. Tous illustrent la virtuosité et l’intelligence de la main, témoignant aussi de l’évolution des savoir-faire lapidaires. Parmi les plus remarquables témoins de cette évolution figure un coquillage vieux de 90 000 ans, trouvé en Algérie et considéré comme l’un des trois plus vieux bijoux connus au monde. S’il indique que dès la préhistoire, les techniques du débitage, du perçage et du polissage des pierres s’affinent sur les cinq continents, il signale aussi que la transmission des savoirs s’accélère grâce à la sédentarisation et au développement des échanges. Ocres pariétales, coquillages percés, pierres débitées, polies, perforées ou enfilées accompagnent les cultures naissantes à travers le monde. Toujours plus ornemental, rituel et symbolique, leur rôle évolue au fur et à mesure que les sociétés s’organisent. Bientôt, dans les cultures de l’Antiquité, la mosaïque sert un art figuratif qui rapproche l’objet décoratif de l’oeuvre d’art à part entière. Cette dynamique ne s’interrompra pas, au contraire. Traversant les goûts, les modes et les courants artistiques — comme l’attestent le coffret d’ambre et d’ivoire dit d’Anne d’Autriche ou le savant sertissage d’un collier indo-mogol — le travail des pierres précieuses illustre puissamment l’histoire des cultures, de leurs origines à nos jours.
2. Des minéraux aux bijoux
La deuxième partie de Pierres précieuses entraîne le visiteur au coeur de la Terre, dans la « fabrique » des minéraux, à la découverte de leurs cycles géodynamiques et des phénomènes naturelsqui les forment jusqu’à les métamorphoser.
Quelque 36 vitrines confrontent minéraux ou métaux précieux, gemmes et bijoux, sept écrins joailliers mettent en lumière les pièces patrimoniales de la Maison Van Cleef & Arpels et trois alcôves présentent plus particulièrement l’or, les cristaux monumentaux et le bois fossile. Ainsi peut-on vérifier, exemples concrets à l’appui, que la gemmologie vient s’immiscer en trait d’union entre science et création artistique. Levier pour décloisonner les disciplines, clé pour mieux comprendre des temporalités duelles, la gemmologie évolue dans un univers où la vie d’une pierre se chiffre en millions d’années et les étapes de sa croissance résultent d’un ensemble de conditions particulières et favorables.
Ces phénomènes naturels sont ici dévoilés dans le détail, regroupés sous sept chapitres explicites : la pression, la température, les fluides, l’eau, l’oxygène, la vie et le métamorphisme. Ensemble, ils forment un cycle au sein des profondeurs jusqu’à la surface de la Terre. S’excluant rarement, ils s’avèrent, au contraire, interdépendants. Outre leur influence sur l’évolution d’une espèce minérale, ces principes géologiques détermineront également la maîtrise lapidaire du tailleur comme l’inspiration et la créativité du joaillier qui travaillera ces pierres.
Le visiteur suit ces cycles géologiques au travers de 34 gemmes différentes et deux métaux précieux, or et platine, dans une suite d’espaces circulaires soutenus par des couleurs évocatrices allant du rouge sombre — symbolisant les entrailles de la terre — aux tons clairs et transparents, liés aux thèmes de l’air ou de l’eau régnant plus en surface. Un voyage au coeur des lents mouvements et des fulgurantes convulsions de la Terre.
3. Paris, lieu de savoirs
Achevant le parcours de Pierres précieuses, cette dernière étape explore l’alchimique relation qu’entretiennent à Paris, savoir et création, recherche et innovationdans l’univers du minéral.
D’expérimentations en études de pointe, les minéralogistes du Muséum interrogent notre perception des pierres précieuses ; des laboratoires aux ateliers de joaillerie, les regards se croisent au-delà des disciplines. Et, depuis le XVIIe siècle lorsque s’effectuèrent les premières collectes pour le droguier du Jardin royal des plantes médicinales — l’ancêtre du Jardin des Plantes —, l’étude des minéraux a nourri la quête scientifique, comme les collections du Muséum, faisant évoluer le regard qui est porté sur eux. Cette promenade inédite dans le Paris des pierres précieuses souligne la perméabilité et la transversalité que suscitent les minéraux, gemmes et bijoux. Ici science, art et haute joaillerie font cause commune pour servir in fine la beauté minérale. Ainsi, cette dernière partie croise en les déclinant différents regards : actuels sur la recherche en minéralogie, pluriels sur les gemmes et mutuels sur la création joaillière.