🔊 “Chantal Akerman” Travelling, au Jeu de Paume, du 28 septembre 2024 au 19 janvier 2025
“Chantal Akerman” Travelling
au Jeu de Paume, Paris
du 28 septembre 2024 au 19 janvier 2025
Jeu de Paume
PODCAST – Entretien avec Marta Ponsa, responsable des projets artistiques et de l’action culturelle – Jeu de Paume, et co-commissaire de l’exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 23 septembre 2024, durée 18’35,
© FranceFineArt.
Extrait du communiqué de presse :
Philippe Chancel, Chantal. © Adagp, Paris 2024.
Chantal Akerman, Photographie de tournage des films Portrait d’une jeune fille de la fin des années 60 à Bruxelles, 1993. © Jean-Michel Vlaeminckx / Cinergie. © Adagp, Paris, 2024.
Chantal Akerman, Photogramme du film Histoires d’Amérique : Food, Family and Philosophy, 1988. © Fondation Chantal Akerman / Capricci. © Adagp, Paris, 2024.
Chantal Akerman, Photographie de tournage de Jeanne Dielman, 23, quai du Commerce, 1080 Bruxelles, 1975. Collections CINEMATEK © Fondation Chantal Akerman / Photo : Boris Lehman. © Adagp, Paris, 2024.
Commissariat : Laurence Rassel, en collaboration avec Marta Ponsa
Cette exposition a été conçue par le Palais des Beaux-Arts de Bruxelles (Bozar), la Fondation Chantal Akerman et CINEMATEK, et réalisée en collaboration avecle Jeu de Paume pour sa présentation à Paris.
Le Jeu de Paume rend hommage à la cinéaste, artiste et écrivaine belge Chantal Akerman (Bruxelles 1950 – Paris 2015) à travers une exposition exceptionnelle, conçue par le Palais des Beaux-Arts de Bruxelles (Bozar), la Fondation Chantal Akerman et CINEMATEK, et réalisée en collaboration avec le Jeu de Paume pour sa présentation à Paris.
Au carrefour du cinéma, de l’art et de l’écriture, la voix singulière de Chantal Akerman n’aura jamais autant résonné qu’aujourd’hui. Sa sensibilité autodidacte, unique, la conduit à aborder sans détour les thèmes de l’intimité, de la solitude, du deuil et des injustices sociales, aussi bien que l’héritage familial et les traces de l’histoire dans le paysage. Parmi ses films, Jeanne Dielman, 23, quai du Commerce, 1080 Bruxelles, figure en tête du dernier palmarès décennal des meilleurs films de tous les temps établi par le British Film Institute.
L’exposition « Travelling » initie un voyage surprenant et bouleversant, et décrit un parcours d’art et de vie façonné par de multiples géographies : de Bruxelles aux zones frontières, de la cuisine au désert, du burlesque au tragique, des douleurs du monde à celles de l’intime. Réunissant une sélection d’installations et de films dont certains sont montrés au public pour la première fois, elle convoque la « matière vivante » qui accompagne l’oeuvre de l’artiste, en dévoilant des archives inédites : scénarios, notes d’intention et photographies de tournage.
En écho à l’exposition, la programmation culturelle de cet automne est entièrement consacrée à Chantal Akerman, en présentant certains de ses films en pellicule, ainsi que des performances, lectures et rencontres.
L’exposition #ExpoAkerman
Le parcours de l’exposition s’ouvre sur deux vidéos-installations intitulées In the Mirror (2007) et Woman Sitting after Killing (2001) qui plongent le visiteur dans l’intimité de portraits de femmes. La visite se poursuit avec D’Est, au bord de la Fiction (1995) : 24 moniteurs et un 25ème retracent en son et en images un voyage en travelling de l’Allemagne de l’Est jusqu’à Moscou, en passant par la Pologne, la Lituanie, l’Ukraine, de l’été à l’hiver.
Ă€ mi-parcours, une salle entière est dĂ©diĂ©e aux archives, la matière « vivante » qui accompagne l’oeuvre de l’artiste. Les archives contiennent une sĂ©lection de documents textuels et audiovisuels issus majoritairement des archives de la Fondation Akerman, de l’INA, de la SONUMA et de la VRT. Au sein de ce lieu de lecture, de consultation et de travail, une bio-filmographie accompagnĂ©e par des citations de la cinĂ©aste, tĂ©moigne de ses rĂ©flexions sur le cinĂ©ma et de ses processus de travail aux cĂ´tĂ©s de rushes, photos de tournages, casting, scripts, dialogues, lettres… En dialogue avec les archives, plusieurs films, notamment ceux rĂ©alisĂ©s en 1967 pour l’entrĂ©e Ă l’école de cinĂ©ma bruxelloise l’INSAS, ainsi que les films de tĂ©lĂ©vision, sont diffusĂ©s sur moniteurs.
À travers l’installation A Voice in the Desert (2002), Akerman prolonge son film From the other side qu’elle réalise sur la frontière qui sépare les États-Unis du Mexique.
L’installation rarement présentée Selfportrait/Autobiography: A work in progress (1998) achève ce parcours. Elle se décline à travers 6 moniteurs et contient des images de plusieurs de ses films qui ont jalonné sa carrière : Hôtel Monterey (1972), Jeanne Dielman, 23 quai du commerce à 1080 Bruxelles (1975), Toute une nuit (1982) et D’Est (1993).
Soulignant à la fois l’héritage de Chantal Akerman dans le travail d’artistes de disciplines diverses et des relations qu’elle a tissées au fil de sa carrière, la publication, réalisée en coédition avec Bozar, et la riche programmation d’évènements qui complètent l’exposition invitent à (re)découvrir une oeuvre dont la radicalité poétique continue d’exercer une profonde influence sur les générations contemporaines.
Chantal Akerman
Chantal Akerman est née à Bruxelles en 1950. Elle se révèle dès son premier court-métrage, Saute ma ville (1968-1970), que l’artiste tourne à Bruxelles, sa ville natale, à l’âge de 18 ans seulement. Bientôt, dans le New York du début des années 1970, elle se lie au cercle des cinéastes underground et expérimentaux, dont elle retient l’approche contemplative, par la caméra, de l’espace physique et temporel.
De retour en Europe, elle dirige un premier long-métrage aux échos très personnels, Je tu il elle (1974), avant d’installer son camp de base à Paris, sans toutefois jamais se départir de ses attaches bruxelloises. L’année suivante, elle réalise Jeanne Dielman, 23, quai du Commerce, 1080 Bruxelles.
Chantal Akerman n’a de cesse d’élargir son champ d’exploration de l’image et du récit, procédant librement à des va-et-vient entre les genres cinématographiques : le drame, la comédie (Golden Eighties, 1985-1986 ;
Un divan à New York, 1995-1996), l’adaptation littéraire (La Captive, 1999-2000 ; La Folie Almayer, 2010-2011), le documentaire. Ainsi D’Est (1992-1993), Sud (1998-1999) et De l’autre côté (2001-2002), tournés en Europe de l’Est, aux États-Unis et au Mexique, forment-ils une trilogie hantée par les murs et les frontières, tout à la fois témoignage de la fin d’un monde et présage de désastres à venir.
Chantal Akerman est en outre l’une des premières réalisatrices à opérer le passage au « jeu de l’art » — selon sa propre formule —, avec la création, entre 1995 et 2015, de près de vingt installations vidéo présentées dans de nombreuses institutions à travers le monde, parmi elles le Jeu de Paume en 1995 (anciennement La Galerie nationale du Jeu de Paume). L’écriture occupant une place centrale dans son oeuvre, elle est aussi l’autrice de plusieurs textes, dont Hall de nuit (1992), Une famille à Bruxelles (1998) et Ma mère rit (2013).
ActualitĂ©s – Le Jeu de Paume fĂŞte ses 20 ans ! 2004-2024 – #20ANSJEUDEPAUME
Le Jeu de Paume, en quelques mots…
Lieu d’inspiration, d’expérimentation et de rencontres, le Jeu de Paume est un centre d’art qui invite à une réflexion sur l’histoire visuelle, à l’ère de la démultiplication exponentielle des images.
Le Jeu de Paume programme chaque année des expositions temporaires montrant la diversité et la richesse de la photographie depuis ses fondements historiques jusqu’aux oeuvres numériques en passant par le cinéma expérimental, la vidéo et la création contemporaine. En 20 ans, il a présenté des grands noms tels que Diane Arbus, Richard Avedon, Robert Capa, Dorothéa Lange, Sally Mann, Vivian Maier, Martin Parr, Cindy Sherman, et plus récemment Thomas Demand et Julia Margaret Cameron comme des figures plus émergentes.
Offrant un riche programme de rencontres, confĂ©rences, cours et journĂ©es d’Ă©tudes, le Jeu de Paume se veut aussi une plateforme d’Ă©change et de dialogue entre le public et les artistes, photographes, cinĂ©astes et Ă©crivains invitĂ©s tout au long de l’annĂ©e. Depuis 2007, il soutient Ă©galement la crĂ©ation en ligne via des projets monographiques et thĂ©matiques conçus spĂ©cialement. En 2010, une antenne au Château de Tours est inaugurĂ©e. En 2024, il ouvre une salle de cinĂ©ma labellisĂ©e Art & essai.
Il propose de multiples activitĂ©s de mĂ©diation Ă destination de tous les publics (enfants, familles, jeunes, public empĂŞchĂ©, public du champ social, scolaires…) et met Ă disposition en ligne, pour les professionnels, Ă©tudiants ou tout simplement passionnĂ©s, un très grand nombre de ressources pĂ©dagogiques et scientifiques.
EngagĂ© et soucieux de prĂ©server l’environnement, il conçoit des scĂ©nographies d’exposition rĂ©utilisables et durables et hĂ©berge un auditorium, une librairie de rĂ©fĂ©rence et un cafĂ© bio et Ă©coresponsable avec une terrasse dans le jardin des Tuileries aux beaux jours.
L’histoire du Jeu de Paume est indissociable de celle de Paris. Au dĂ©part lieu de pratique sportive inaugurĂ© sous NapolĂ©on III (1862), il est transformĂ© en galerie d’expositions (1909) puis en annexe du musĂ©e du Luxembourg (1922), avant de devenir, pendant la Seconde Guerre mondiale, lieu de stockage des oeuvres spoliĂ©es par les nazis. Rose Valland, attachĂ©e de conservation au musĂ©e durant cette pĂ©riode et hĂ©roĂŻne discrète de la rĂ©sistance, jouera un rĂ´le dĂ©cisif pour la sauvegarde et la rĂ©cupĂ©ration de ce patrimoine. Pour lui rendre hommage, les terrasses qui entourent le Jeu de Paume portent aujourd’hui son nom.
Après la guerre et jusqu’en 1986, il abrite le musée des Impressionnistes, avant d’être entièrement réhabilité par l’architecte Antoine Stinco pour devenir en 1991 un centre d’art
contemporain, la Galerie nationale du Jeu de Paume. Depuis 2004, le Jeu de Paume, est une association privée loi 1901.
ÉDITO, par Quentin Bajac.
Pour cĂ©lĂ©brer ses 20 ans en 2024, le Jeu de Paume organise un week-end d’anniversaire gratuit sur trois jours offrant un programme riche et festif accessible Ă tous. Tandis que le samedi 28 septembre invite tous les publics Ă participer Ă des visites « flashs » des nouvelles expositions, ateliers, concerts, projections d’oeuvres vidĂ©os et visites en nocturnes… Le dimanche 29 septembre est rĂ©servĂ© aux familles ; parents et enfants sont invitĂ©s Ă participer Ă des ateliers, visites, et sĂ©ances de cinĂ©ma, spĂ©cialement conçues pour cet anniversaire.
C’est aussi l’occasion pour les visiteurs de découvrir deux expositions de grande envergure consacrées à des artistes femmes ; Chantal Akerman et Tina Barney, qui sont à l’honneur pour cette saison d’automne exceptionnelle.
La réalisatrice belge Chantal Akerman est célébrée aujourd’hui comme l’une des meilleures cinéastes de tous les temps. Cet événement au format hybride est l’occasion pour le Jeu de Paume de revenir sur une œuvre engagée, féministe, sous la forme d’une biographie éclatée et fragmentaire, oeuvre qui navigua entre salles de cinéma et circuit des galeries d’art, entre films et installations vidéo.
Tina Barney est une importante figure de la photographie américaine. Centrée sur son travail de portraitiste, mêlant images de commande et personnelles, modèles connus, anonymes et proches, couleur et noir et blanc, clichés anciens et productions inédites, l’exposition est la première rétrospective de l’artiste en Europe.
L’année de son vingtième anniversaire, nous replaçons le cinéma au coeur de son activité en inaugurant cet automne une nouvelle salle de cinéma, en soutien à la création indépendante.
Le Jeu de Paume, qui a traversé plus d’un siècle et demi d’histoire, depuis sa construction en 1862 à l’année de son vingtième anniversaire en tant que centre d’art, s’affirme aujourd’hui plus que jamais comme un lieu d’inspiration et d’expérimentation qui n’a de cesse d’interroger l’histoire des images. Nous espérons que l’anniversaire permettra à chacun de se réapproprier ce lieu emblématique situé au coeur de Paris.
Ă€ voir Ă©galement – #ExpoTinaBarney
Tina Barney, Â Family Ties
Commissaire : Quentin Bajac
Le Jeu de Paume met à l’honneur l’oeuvre vibrante et singulière de Tina Barney, grande figure de la photographie américaine, dont le travail, principalement autour des relations de famille, a été très peu montré en France. Tina Barney. Family Ties, qui retrace 40 ans de la carrière de l’artiste, est la plus grande rétrospective européenne à lui être consacrée à ce jour.
Née en 1945, Tina Barney entreprend à la fin des années 1970 de photographier ses proches et amis. Fine observatrice des rituels familiaux, elle s’intéresse particulièrement aux relations entre les générations dans le cadre domestique. Ses portraits colorés, souvent de groupe et de grand format, qui semblent à première vue tenir de l’instantané familial, sont pour la plupart soigneusement mis en scène par l’artiste, créant des tableaux composés qui établissent un dialogue avec la peinture classique. D’autres capturent avec spontanéité des moments insaisissables d’interaction entre les sujets. Tina Barney a par ailleurs souvent photographié sur commande : ses portraits de célébrités pour la presse, magazines de mode et marques de luxe témoignent de la même complexité, sensibilité et parfois humour que dans sa pratique artistique.
L’exposition, produite par le Jeu de Paume, dévoile une sélection de 55 tirages à grande échelle mêlant images en couleur et noir et blanc, clichés de ses débuts et productions inédites, oeuvres de commande et personnelles, modèles connus telle Julianne Moore ou anonymes et proches de l’artiste.
Ses modèles posent Ă la manière d’acteurs dans une scène de théâtre ou de cinĂ©ma, l’artiste n’hĂ©sitant pas Ă demander de refaire certains micro-gestes et Ă donner quelques directives informelles. Dans The Reception [La rĂ©ception] (1985) par exemple, Tina Barney dirige avec soin les invitĂ©s d’un mariage de sa soeur tout en conservant la spontanĂ©itĂ© d’un instantanĂ©.
Entre 1996 et 2004, elle voyage en Italie, au Royaume-Uni, en Autriche, en France, en Espagne et en Allemagne, s’intéressant aux types sociaux et aux coutumes plutôt qu’aux individus. Dans ces oeuvres, les motifs traditionnels sont souvent combinés à des caractéristiques plus contemporaines, les personnages de l’aristocratie et de la haute bourgeoisie européenne posant d’une manière picturale, dans une certaine tradition du portrait de groupes qui n’est pas sans rappeler les conversation pieces anglaises du XVIIIème siècle.
C’est Ă la fin des annĂ©es 1970 que Tina Barney Ă©labore son approche photographique singulière. En 1981, elle passe d’un appareil photo Pentax 35mm, tenu Ă la main, Ă une chambre photographique Toyo 4×5 montĂ©e sur trĂ©pied. Tout au long des annĂ©es 1980, ses premières images rĂ©vèlent un monde rarement vu en photographie, offrant au public un regard intime sur la vie intĂ©rieure de la classe aisĂ©e de la cĂ´te est des États-Unis.
Sur divers lieux de vacances, à l’occasion de fêtes d’anniversaire (The Children’s Party [La fête des enfants], 1986), de mariages (Bridesmaids in Pink, [Demoiselles d’honneur en rose] 1995), de barbecues (Tim, Phil and I, [Tom, Phil et moi] 1989) et de déjeuners en famille dans sa maison de Rhode Island et aux alentours, Tina Barney explore les habitudes sociales de ses sujets entre absorbement intense des uns et agitation oisive des autres.
Le grand format permet à la photographe de magnifier les détails des textures et des couleurs, des vêtements, du mobilier, des tissus et des décors de ses sujets en mettant l’accent sur la culture visuelle et matérielle qui sous-tend les choix et les goûts de ses modèles.
Le parcours met Ă©galement en lumière la dimension théâtrale, au coeur de son travail – une dimension qui accorde une attention particulière Ă la mise en scène de ses sujets et Ă la construction de l’espace. Synthèse originale d’une rigueur hĂ©ritĂ©e de l’utilisation de la chambre photographique, de l’observation de la peinture de chevalet comme d’une pratique de l’instantanĂ©, l’oeuvre de Tina Barney est parcouru par une tentation narrative. Au dĂ©but des annĂ©es 1990, elle commence Ă travailler pour de nombreux magazines et journaux parmi lesquels : Daily Telegraph, W, Arena Homme plus, Hommes Vogue International, Vogue US…
Cette pratique éditoriale l’a amenée à concentrer son attention sur la composition de ses images, dans un contexte où costumes, décors et environnements sont généralement déjà définis.
S’Ă©cartant d’une approche strictement chronologique, l’exposition est organisĂ©e autour de certains thèmes qui ont traversĂ© l’oeuvre de Barney au cours de 40 ans de carrière parmi lesquels la famille, un sujet clĂ© depuis le tout dĂ©but de sa pratique photographique en 1976, comme l’illustrent Jill and Mom [Jill et Maman](1983), une scène d’intimitĂ© oĂą la soeur et la mère de l’artiste regardent l’appareil photo avec sĂ©rĂ©nitĂ©. Près de vingt ans plus tard, The Daughters [Les Soeurs] (2002) revisite la dynamique mère-fille dans le portrait d’une famille française.