đ âAll the Messages Are Emotionalâ 25e Prix Fondation Pernod Ricard, Ă la Fondation Pernod Ricard, du 10 septembre au 31 octobre 2024
âAll the Messages Are Emotionalâ
25e Prix Fondation Pernod Ricard
Ă la Fondation Pernod Ricard, Paris
du 10 septembre au 31 octobre 2024
Fondation Pernod Ricard
PODCAST – Entretien avec ArlĂšne Berceliot Courtin, chercheuse, enseignante, curatrice et autrice indĂ©pendante, et commissaire de lâexposition,
par Anne-FrĂ©dĂ©rique Fer, Ă Paris, le 9 septembre 2024, durĂ©e 18â00,
© FranceFineArt.
Extrait du communiqué de presse :
Mona Varichon, L’interdit, Libre photographiĂ© avec l’Olympus Stylus Zoom,75011 Paris, DĂ©cembre 2021, 2022. 10 x 15 cm. Tirage pigmentaire dans cadre postal Photop’s. Vue de l’exposition Tourismus (avec Naoki Sutter-Shudo), Alienze, Vienne, Autriche. Courtesy de lâartiste. ©ADAGP, Paris, 2024.
Madison Bycroft, Waterlogue â Four to the floor, 2024. VidĂ©o numĂ©rique 4k Ă quatre canaux, son 5.1, 28 minutes. Courtesy de lâartiste.
Lenio Kaklea, Sonatas and Interludes, Bourse de Commerce, 2021. Photo : LĂ©onard MĂ©chineau. Courtesy de lâartiste.
HaYoung, Guardian Angels: Hunt, 2023. Parfum, verre souffle, systÚme de diffusion, arduino, acier. Production Cirva et Frac des Pays de la Loire, réalisation Cirva, Marseille. © Corentin Laplanche-Tsutsui.
Commissaire : ArlÚne Berceliot Courtin, chercheuse, enseignante, curatrice et autrice indépendante
Avec Clémentine Adou, Madison Bycroft, Charlotte Houette, Lenio Kaklea, HaYoung, Paul Maheke et Mona Varichon
Conçu en 1999, avec la complicité du Centre Pompidou, le prix de la Fondation
Pernod Ricard cĂ©lĂšbre aujourd’hui son vingt-cinquiĂšme anniversaire. NĂ© de lâenvie de ne pas constituer de collection privĂ©e, mais plutĂŽt de jouer un rĂŽle de catalyseur et de promotion pour la jeune crĂ©ation, ce prix pionnier en France a Ă©tĂ© lancĂ© Ă une Ă©poque oĂč aucun dispositif similaire n’existait. Depuis maintenant un quart de siĂšcle, il assure un soutien continu Ă la jeune crĂ©ation artistique, portĂ© par un engagement sans cesse renouvelĂ© qui assure un rĂ©el accompagnement sur le long terme.
Quâelle permette la possibilitĂ© pour le.la laurĂ©at.e dâentrer dans les collections du
Centre Pompidou ou engage des expositions Ă lâinternational, lâexposition du Prix est un moment phare et lâoccasion pour nous de dĂ©couvrir de nouveaux·elles artistes qui bĂ©nĂ©ficieront par la suite de notre soutien. Chaque annĂ©e, cette exposition est confiĂ©e Ă un curateur·rice ou un·e artiste qui porte un regard prospectif sur lâactualitĂ© de lâart en France.
Pour cette 25e Ă©dition du Prix de la Fondation Pernod Ricard, nous avons choisi la chercheuse, curatrice et enseignante ArlĂšne Berceliot Courtin. Sa connaissance de la scĂšne artistique Ă©mergente et son approche transdisciplinaire de lâexposition, au croisement des sciences humaines, de la littĂ©rature, du cinĂ©ma, de la performance et des arts visuels, rejoint notre volontĂ© dâouverture et de mise en Ă©cho des champs de la crĂ©ation entre eux.
All the Messages Are Emotional proposera ainsi dĂšs le 10 septembre une multiplicitĂ© de regards et dâaffects, Ă travers les oeuvres de ClĂ©mentine Adou, Madison Bycroft, HaYoung, Charlotte Houette, Lenio Kaklea, Paul Maheke et Mona Varichon.
Antonia Scintilla, Directrice de la Fondation Pernod Ricard
ClĂ©mentine Adou, PAQUET NEUTRE, 2018. â, 6 X 9 X 3 cm, Paquets de cigarettes avec lâimage de lâ« oeil aveugle ». Peint Ă la main, peinture acrylique extra-mate vert pantone 448c, (dimensions variables selon le paquet). Courtesy de lâartiste.
Charlotte Houette, Untitled (yellow,pink), 2024. 75 X 60 cm. Acrylique sur toile. Courtesy de lâartiste et de la galerie High Art. ©ADAGP, Paris, 2024.
Paul Maheke, To Be Blindly Hopeful, vue dâinstallation, Mostyn Gallery, Llandudno, Wales, 2024. Photo : Rob Battersby. Courtesy de lâartiste. ©ADAGP, Paris, 2024.
La premiĂšre image qui mâest apparue Ă la suite de lâinvitation afin dâassurer le commissariat du vingt-cinquiĂšme Prix Fondation Pernod Ricard, câest une Ă©moticĂŽne inscrit sur un mur du mĂ©tro new-yorkais. Il sâagit dâun smiley avec un sourire vers le bas et des yeux en spirale annonçant la fin des conflits Ă©motionnels Ă travers ces quelques mots : « Emotional conflicts, last day here! » Dans quelles mesures, lâĂ©tude des conflits et plus gĂ©nĂ©ralement des Ă©motions au coeur de ces tensions permettraient de mieux apprĂ©hender notre monde en mutation. Si le conflit nâest pas une agression(1), alors comment dĂ©faire ce noeud qui se forme Ă chaque fois que nous rencontrons une dissonance affective ou que nous devons affronter une aggravation brutale de notre Ă©tat chronique perpĂ©tuellement en crise ? VoilĂ en partie les questions qui mâont traversĂ© lâesprit Ă ce moment-lĂ et qui continuent de mâhabiter en ce dĂ©but dâannĂ©e.
Selon Ann Cvetkovich (CA, 1957), le terme « affect » dĂ©signe autant un problĂšme conceptuel quâune chose tangible. En tant que tel, il est mieux compris comme un terme gĂ©nĂ©rique qui inclut des mots apparentĂ©s et plus familiers tels que « sentiment » ou « Ă©motion », induisant par ailleurs le mouvement ainsi que les efforts dĂ©ployĂ©s pour Ă©tablir une distinction entre eux(2). LâĂ©motion impliquerait donc lâidĂ©e de mouvement et ce dĂšs son origine linguistique jusquâĂ sa rĂ©alitĂ© plastique. Pour autant, elle semble Ă©chapper Ă toute tentative de dĂ©finition institutionnelle ou acadĂ©mique afin de circuler librement entre les corps. Lâaffect comme lâĂ©motion nâest Ă lâintĂ©rieur de rien, il nâest pas non plus Ă lâextĂ©rieur. LâĂ©motion comme lâaffect repose sur une exploration sociale qui efface la distinction privĂ©/public et annonce Ă travers cette disparition, une forme dâĂ©locution voire dâĂ©mancipation Ă venir. Les affects tout comme les Ă©motions et mĂȘme les sentiments sont des faits(3). Ils sont par-lĂ mĂȘme aussi denses que complexes, car toujours situĂ©s, interpersonnels et incarnĂ©s. De telle sorte quâils existent Ă travers un phĂ©nomĂšne de transmission ou plutĂŽt un ensemble de transferts opĂ©rĂ©s dâun corps Ă un autre, dâun mouvement Ă un autre, dâun objet Ă un autre.
Figure incontournable de la phĂ©nomĂ©nologie queer, Sara Ahmed (UK, 1950) hĂ©site Ă utiliser le terme « affect » tant celui-ci est au coeur dâun tournant scientifique Ă la fin des annĂ©es 1990. Elle sâintĂ©resse davantage Ă lâĂ©motion en tant que synonyme de mouvement mais aussi en tant que mot largement utilisĂ© au quotidien(4). Elle ajoute que ce sont les objets de lâĂ©motion qui circulent, plutĂŽt que lâĂ©motion en tant que telle(5). Alors, comment reconnaĂźtre ces objets dĂ©rivĂ©s de lâĂ©motion ? Et dans quelle mesure les rĂ©unir pourrait constituer et/ou motiver le point de dĂ©part dâune exposition ? Je ne saurais rĂ©pondre pour lâinstant, mais jâai la certitude que lors des prochains mois, nous parlerons ensemble, avec joie et enthousiasme, de la possibilitĂ© de rĂ©affecter des formes post-minimalistes, du vivant photosensible et dâexistence extra-ovarienne, de nouvelles narrations fĂ©ministes et science-fictionnelles, de collecte de gestes affectĂ©s au sein dâune ambitieuse encyclopĂ©die pratique de la danse, de rĂ©alitĂ©s et subjectivitĂ©s post-binaires, du corps performant telle une archive vivante Ă dĂ©coloniser et enfin de la traduction comme action politique et pourquoi pas sentimentale. Autant de spĂ©culations qui laissent prĂ©sager une exploration collective de lâaffect, en dehors de tout lieu commun, porteur en ce sens de nouvelles expĂ©riences sociales.
Ă travers sa contribution majeure Ă la thĂ©orisation des affects, Lauren Berlant (USA, 1957 â 2021) a constituĂ© un tĂ©moignage fondamental de lâexploitation mais aussi de la marchandisation des affects dans le contexte nĂ©olibĂ©ral particuliĂšrement agressif et capitalocĂšne de lâAmĂ©rique du nord. Ă travers une syntaxe exigeante, il convoque une suite de concepts largement inexplorĂ©s tels que lâabandon, le dĂ©sir, lâamour, lâĂ©puisement, la rĂ©paration, lâattrition dâun fantasme de vie investie collectivement : « the good life » â¶. Sa pensĂ©e accompagne ce projet qui rĂ©sonne par ailleurs comme lâoccasion idĂ©ale de traduire un de ses essais jusquâalors inĂ©dit en langue française. Inspiration directe, elle donne aussi les premiĂšres intentions de cette recherche Ă travers lâannonce de son titre : « Tous les messages sont Ă©motionnels ».
ArlĂšne Berceliot Courtin, Commissaire du 25e Prix Fondation Pernod Ricard
1. Sarah Schulman, Le Conflit nâest pas une agression, rhĂ©torique de la souffrance, responsabilitĂ© collective et devoir de rĂ©paration, Ăditions B42, 2021.
2. Ann Cvetkovich, « Affect ». In B. Burgett & G. Hendler (Eds.) Keywords For American Cultural Studies (pp. 13â15). New York and London, NYU Press, 2007.
3. Yvonne Rainer, Feelings are Facts: A Life, MIT Press, 2006.
4. Affect/Emotion: Orientation Matters, A Conversation between Sigrid Schmitz and Sara Ahmed, Freiburger Zeitschrift fĂŒr GeschlechterStudien, Budrich Unipress, 2014.
5. Sara Ahmed, The Cultural Politics of Emotion, Edinburgh University Press, 2004. 6. Lauren Berlant, Cruel Optimism, Duke University Press, 2011.
Les Artistes
Clémentine Adou
ClĂ©mentine Adou (nĂ©e en 1988 Ă Paris) vit et travaille Ă Paris. Son travail sâinscrit dans une Ă©conomie de production et de moyens, par des procĂ©dĂ©s de soustraction et de recouvrement. Les problĂ©matiques politiques se diffusent ainsi dans le travail de ClĂ©mentine Adou sous des formes qui interrogent les processus de visibilitĂ©. Par des dĂ©placements et mises en Ă©vidence, câest cette mĂ©canique que ses piĂšces rĂ©vĂšlent â autant quâelles appellent Ă un certain exercice de dĂ©sencombrement du regard dans une sociĂ©tĂ© contemporaine structurĂ©e par le pouvoir, la surveillance et la consommation.
Madison Bycroft
Travaillant avec la vidĂ©o, la sculpture et la performance, Madison Bycroft sâintĂ©resse actuellement aux formes de lecture et dâĂ©criture, dâexpression et de refus. Les politiques de lâillisibilitĂ© et de la lisibilitĂ© sont explorĂ©es Ă travers le langage et le matĂ©riel, en se demandant comment le « sens » est encadrĂ© par des contextes historiques, des prĂ©jugĂ©s et des structures de pouvoir. Madison Bycroft sâintĂ©resse Ă la maniĂšre dont nous pourrions rĂ©imaginer la « lecture » (dans son sens Ă©largi) et la comprĂ©hension, non pas comme un objectif orientĂ© vers lâaccomplissement, mais comme une relation qui plane et fait de lâespace : opaque, nâarrivant jamais, non fondĂ©e et flottante. Ici, le flottement est explorĂ© comme une mĂ©thodologie de dĂ©sorientation et une pratique du plaisir qui nâest pas orientĂ©e vers un but, mais plutĂŽt fracturĂ©e, errante, abstraite et planctonique.
HaYoung
Né·e en 1993 en CorĂ©e du Sud, iel a Ă©tudiĂ© lâĂ©conomie Ă lâUniversitĂ© de SĂ©oul avant dâarriver en France et de rejoindre la Villa Arson oĂč iel obtient son DNSEP en 2021. Quâil sâagisse dâemployer la vidĂ©o, le dessin, lâinstallation ou encore le parfum, iel dĂ©cortique les langages et les systĂšmes physiques comme numĂ©riques en incarnant les caractĂšres dont leurs histoires tĂ©moignent dâidentitĂ©s intermĂ©diaires, de leurs luttes et de leurs relations. AprĂšs Artagon Marseille et Moly Sabata, iel continue sa recherche de la matiĂšre et de lâidentitĂ© amorphe en lien avec lâinfrastructure digitale Ă Jan Van Eyck Academie en 2023-2024 en parallĂšle au CIRVA. Ses travaux ont Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©s notamment au Frac des Pays de la Loire, Ă la Ferme du Buisson, Ă la Fondation Pernod Ricard, Ă MĂ©cĂšnes du Sud, au cipM, au SISSI club, au MusĂ©e International de la Parfumerie, au Het Nieuw Institute, Ă 100% Villette ou encore, au International Short Film Festival dâOberhausen.
Charlotte Houette
Les peintures de Charlotte Houette capturent le regard et lâentraĂźnent dans un tourbillon perceptif, oĂč gestualitĂ© picturale et gĂ©omĂ©tries Ă©tranges se tĂ©lescopent Ă des Ă©lĂ©ments mobiles construits Ă mĂȘme la structure du tableau. En 2016, elle a co-fondĂ© lâĂ©cole expĂ©rimentale The Cheapest University, au sein de laquelle elle crĂ©e, avec Clara Pacotte, la revue EEAPES, consacrĂ©e Ă la traduction collective de textes de science-fiction fĂ©ministe. Elle est reprĂ©sentĂ©e par la galerie High Art.
Lenio Kaklea
Lenio Kaklea est une danseuse, chorĂ©graphe, artiste et metteuse en scĂšne nĂ©e Ă AthĂšnes, en GrĂšce. Elle vit et travaille Ă Paris. Elle a Ă©tudiĂ© au Conservatoire National de Danse Contemporaine dâAthĂšnes (SSCD), oĂč elle se forme au ballet classique et aux techniques et rĂ©pertoires modernes amĂ©ricains tels que Martha Graham, Merce Cunningham et Jose Limon. Depuis 2009, Lenio Kaklea utilise diffĂ©rents mĂ©diums : la chorĂ©graphie, le texte et la vidĂ©o. Sa pratique artistique sâinspire du fĂ©minisme, et de la pensĂ©e post-coloniale. Dans son travail, elle explore la production de la subjectivitĂ© par la transmission organisĂ©e des mouvements et rĂ©vĂšle les espaces intimes dans lesquels nous construisons notre identitĂ©. ParallĂšlement Ă son travail chorĂ©graphique personnel, elle sâengage dans des collaborations avec dâautres artistes.
Paul Maheke
Paul Maheke est diplĂŽmĂ© de lâĂcole nationale supĂ©rieure dâarts de Cergy et du Open School East Ă Londres/Margate. Ă travers un corpus variĂ© et souvent collaboratif comprenant dessins, performances, installations, son et vidĂ©o, Maheke se penche sur le potentiel du corps comme archive afin dâexaminer comment se forment et se constituent la mĂ©moire et lâidentitĂ©. Ses oeuvres ont Ă©tĂ© exposĂ©es Ă la Tate Modern Ă Londres, la Biennale de Venise, The Renaissance Society Ă Chicago, Centre Pompidou, Palais de Tokyo, Bourse de Commerce â Collection Pinault et Lafayette Anticipations Ă Paris, MO.CO, Montpellier, Triangle France Ă Marseille, Baltic Triennial 13, Manifesta 12, Palerme, Cabaret Voltaire, Zurich, Chisenhale Gallery et The South London Gallery Ă Londres, entre autres. Il a Ă©tĂ© nominĂ© au 21e Prix de la Fondation dâEntreprise Ricard en 2019 et au Future Generation Art Prize en 2021.
Mona Varichon
Mona Varichon est artiste et traductrice. Elle a Ă©tudiĂ© la sociologie Ă lâUniversitĂ© Paris Descartes et les beaux-arts au San Francisco Art Institute et Ă ArtCenter Ă Los Angeles. Ses photos, vidĂ©os et performances fonctionnent comme archives, hommages et mises en perspective de moments marquants de lâactualitĂ©, ou dâexpĂ©riences intimes quâelle capture ou met en scĂšne afin de les partager. Son travail circule sur YouTube, dans des commerces, des boĂźtes aux lettres, des intĂ©rieurs, des cinĂ©mas et des espaces dâart. Elle a exposĂ© Ă la Fondation Van Gogh Ă Arles, au Capc Ă Bordeaux, au cinĂ©ma lâEtna Ă Montreuil, Ă la Villa Arson Ă Nice, Ă lâEgyptian Theatre, REDCAT, Bel Ami et Kristina Kite Ă Los Angeles, aux Chichas de la PensĂ©e, Ă Air de Paris et au Centre Pompidou Ă Paris. Elle a traduit en français les textes des catalogues de Pippa Garner, Betye Saar, Christina Ramberg et CĂ©cile B. Evans et les mĂ©moires des artistes Ă©tatsuniens George & Mike Kuchar.