🔊 “esprit d’atelier” arp et taeuber, vivre et crĂ©er, Ă la Fondation Arp – atelier de jean arp et de sophie taeuber, du 2 fĂ©vrier au 24 novembre 2024 (prolongĂ©e jusqu’au 22 dĂ©cembre 2024)
“esprit d’atelier” arp et taeuber, vivre et créer
à la Fondation Arp – atelier de jean arp et de sophie taeuber, Clamart
du 2 fĂ©vrier au 24 novembre 2024 (prolongĂ©e jusqu’au 22 dĂ©cembre 2024)
Fondation Arp
PODCAST – Entretien avec Mirela Ionesco, secrĂ©taire gĂ©nĂ©rale de la Fondation Arp, et co-commissaire de l’exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Clamart, le 22 juillet 2024, durée 20’25,
© FranceFineArt.
Extrait du communiqué de presse :
Sophie Taeuber-Arp, « Tête », 1937, plâtre, 33 x 20,5 x 20,5 cm. Photographie J. P. Pichon, droits Fondation Arp, Clamart.
Sophie Taeuber-Arp, « Etude (lignes brisées et formes courbes) », sans date, crayon sur papier, 50 x 38,5 cm. Photo G. Abegg, droits Fondation Arp, Clamart.
Jean Arp et Sophie Taeuber-Arp, « Lignes blanches sur fond gris », 1939, huile sur toile, 46 x 33 cm. Photo S. Tardy, droits Fondation Arp, Clamart.
Jean Arp, « Nombril et nombril ailé », 1933, collage, 38,5 x 33 cm. Photo JP Pichon, droits Fondation Arp, Clamart.
Commissaires :
Mirela Ionesco, Chiara Jaeger et SĂ©bastien Tardy
La maison-atelier de Arp et Taeuber à Clamart fut conçue par Sophie Taeuber-Arp (1889-1943), pionnière suisse de l’Avant-garde, dans l’idée que l’art et le quotidien devaient continuellement s’appuyer l’un sur l’autre. Mais quelles différences existent entre un atelier et une maison-atelier ? Et quelles subtilités s’ajoutent quand cette maison-atelier n’est pas celle d’un seul artiste mais celle d’un couple d’artistes ?
Esprit d’atelier, arp et taeuber, vivre et créer, nouvelle exposition de la Fondation Arp présentée du 2 février au 24 novembre 2024, plongera les visiteurs dans l’intimité d’un couple emblématique de l’art du XXe siècle. Ils pourront découvrir comment le lieu a été pensé, comment s’articulent le temps du travail et celui du quotidien des deux créateurs. Les espaces de vie et d’atelier se confondent dans une maison et un jardin dont l’histoire évolue au cours des années. Ces espaces s’agrandissent, les fonctions changent, et l’art se développe également au gré de ces modifications.
Le parcours de l’exposition prĂ©sentera des oeuvres majeures des deux artistes ( sculptures, peintures, dessins, Ă©crits… ) en parallèle d’élĂ©ments inĂ©dits ( esquisses, Ă©bauches, photographies ), tĂ©moignant de l’esprit d’atelier, multiple, qui rĂ©sidait dans cette maison. Tout en Ă©vitant la reconstitution d’ateliers factices, chacun des crĂ©ateurs sera prĂ©sentĂ© dans l’espace qu’il occupait Ă l’origine. D’autres salles seront consacrĂ©es Ă la comprĂ©hension du concept de maison-atelier, par les Ă©lĂ©ments de vie, par les oeuvres en commun de Arp et Taeuber, et par les rencontres et les nombreuses visites de tous les artistes des mouvements avant-gardistes europĂ©ens de l’entre-deux-guerres ( Max Ernst, Tristan Tzara, Kurt Schwitters, Theo van Doesburg, Paul Eluard, Marcel Duchamp, Maurice Ravel… ), si prompts Ă venir rejoindre ce couple le temps d’une journĂ©e, d’un verre, d’une oeuvre…
La Fondation Arp est une fondation d’artiste, dont Jean Arp (1886-1966) avait souhaité la création et esquissé les contours plusieurs années avant sa mort. Créée en 1978 à l’initiative de sa seconde épouse, Marguerite Arp-Hagenbach, la Fondation est dédiée à la diffusion et à la protection de la collection exceptionnelle dont elle est dotée, ainsi qu’à la promotion de l’héritage culturel de Jean Arp et de Sophie Taeuber-Arp, en France et à l’étranger. Longtemps ouverte au public très occasionnellement depuis sa création, la Fondation accueille les visiteurs à horaires fixes depuis 2004. La Fondation Arp est reconnue d’utilité publique, détentrice de l’appellation « musée de France ».
Jean Arp, « Pointé vers les nuages », 1962, bronze, 41 x 22 x 17 cm. Photo JP. Pichon, droits Fondation Arp, Clamart.
Jean Arp au balcon de la maison-atelier, Clamart, vers 1930. Photo Sophie Taeuber-Arp, droits Fondation Arp, Clamart.
Sophie Taeuber-Arp et Jean Arp, Ascona, 1925. Droits réservés.
Parcours de l’exposition
Pour Sophie Taeuber-Arp comme pour Jean Arp, l’art et le quotidien devaient se mêler perpétuellement. En intégrant la vie domestique, l’art permettait à l’esprit de s’élever et de produire un meilleur quotidien. La maison-atelier dessinée par Sophie Taeuber-Arp est construite sur ce principe : un couple d’artistes, deux ateliers, un lieu de vie et de création.
arp en ses ateliers : une constellation d’idées
L’esprit de Dada reste continuellement présent dans la création de Jean Arp. Parfois appuyé des aléas du hasard, c’est souvent par constellation qu’il compose ses oeuvres. Dans des constellations de formes, se juxtaposent des éléments aux lignes caractéristiques de l’artiste, créant ainsi un langage graphique qui lui est unique : à travers un immense catalogue d’éléments découpés, Arp imagine des rapprochements, des compositions nouvelles, avec comme ligne directrice une harmonie d’ensemble, un équilibre serein ; de ces ensembles peuvent naître des pièces majeures de son travail, comme le relief « Selon les lois du hasard IV », dont la numérotation du titre témoigne de séries dans ces constellations. Dans des constellations poétiques, les sens et les sons des mots se relaient : parfois jeu sémantique, parfois jeu phonique, on trouve ici la quintessence de cet esprit dadaïste qui reste attaché à Arp. Mêlant l’humour à la philosophie, les divergences surréalistes à un ancrage à la nature, la poésie constitue une expression où le réfléchi se mêle à l’intime. C’est à ses yeux ce qu’il crée de plus abouti. Dans des constellations de volumes, ses sculptures peuvent naître d’une imbrication d’œuvres antérieures : un fragment géométrique de « Pointé vers les nuages », accolé à la tête élancée d’une « Entité ailée », deux sculptures de 1961, font éclore quelques années plus tard le « Torse enjoué ». Les exemples de ce type sont nombreux dans le travail de Arp. Dans les deux ateliers qu’il fait construire dans les années 1950, il se consacre à sa sculpture, modelée du plâtre. La présentation riche de nombreuses oeuvres de toutes époques permet aux visiteurs de plonger au coeur de cette création protéiforme. Ils y retrouvent cette capacité de l’artiste à revoir dans ses propres constructions une porte ouverte sur un bourgeon de sculpture. Enfin les motifs et thèmes développés par Arp se constellent également. Le nombril, par exemple se retrouve décliné à travers de multiples techniques et matériaux. Apparu dans son esprit avec l’aventure Dada, vers 1915, cet emblème circulaire se retrouve tout au long de sa vie, en sculpture, sur des collages, des estampes, des reliefs, de la poésie. Il navigue entre les formes et les époques, pour réapparaitre régulièrement, comme un compagnon de voyage facétieux. D’autres de ces motifs comme les bourgeons, les nuages, les lutins, participent de ce voyage.
l’atelier de sophie taeuber-arp : jeux d’équilibres et de techniques
La curiosité sans limite de Sophie Taeuber-Arp l’amène à travailler sur toutes les techniques artistiques possibles. Avec un même sens de la composition quel que soit le domaine choisi, et sans aucune hiérarchie entre les arts, sa production s’avère unique en son genre. Les visiteurs découvrent ainsi son travail textile, à travers des grandes étoffes de soie imprimée, ou encore son pantalon de costume cousu de différentes étoffes de 1920-1924. Ils peuvent voir se décliner sa réflexion sur quelques gouaches majeures de l’artiste. La collection de la Fondation est riche de nombreuses esquisses de Sophie Taeuber-Arp. Travaillées individuellement en grand format ou regroupées dans des carnets, elles présentent toutes les facettes graphiques de son travail : lignes courbes, droites, brisées, traits de crayons noirs ou colorés, parfois naturalistes, souvent abstraits. C’est un catalogue exceptionnel de son vocabulaire artistique qui se concentre dans ces dessins.
la maison-atelier, pour créer à quatre mains
La rencontre entre Arp et Taeuber à Zurich en 1915 fut une révélation mutuelle. Jean découvrit en l’art de Sophie la quintessence de la forme, le juste équilibre entre le monde intérieur et le monde extérieur, quand elle fut portée par son élan révolutionnaire dadaïste. Installés dans la maison-atelier de Clamart en 1929, cet échange va devenir omniprésent, de manière implicite ou assumée. Les oeuvres créées en commun, comme l’emblématique « Jalon » ou les « Lignes blanches sur fond gris », sont le fruit de leur complicité artistique, résultats d’un travail l’un à côté de l’autre et l’un avec l’autre, dans leurs atelier. Le travail unique d’un couple d’artistes, où aucun égo personnel ne prime. Les lignes, les formes, les couleurs qui les composent cherchent à atteindre l’éternité. Entre 1938 et 1940, Sophie Taeuber-Arp travaille à un projet de monographie sur Jean Arp pour Gualtieri di San Lazzaro, directeur de la revue XXe siècle. La maquette de ce magnifique projet, jamais édité, contenant 13 dessins originaux de Arp, et annoté de la main de Sophie Taeuber-Arp est présentée pour la première fois au public. En parallèle, Arp peint des couvertures aux couleurs solaires pour les livres qu’ils affectionnent, comme l’exemplaire de « En avant Dada » de Huelsenbeck (1920), sur lequel Sophie Taeuber-Arp inscrit son propre nom, gage de l’intérêt qu’elle y porte. Pour Arp le dialogue continuera au-delà de la mort, par les créations qu’il a imaginées d’après les oeuvres de Sophie ; d’un collage qu’elle a réalisé en 1916, Arp en tire en 1965 la sculpture « Bonhomme ». Arp citait souvent Héraclite : « c’est toujours la même substance qui est en toute chose, la vie et la mort, la veille et le sommeil, la jeunesse et la vieillesse. Car en se transformant ceci devient cela, et cela en se transformant devient de nouveau ceci ».
la maison-atelier, pour que l’art se mêle au quotidien
Dans la maison-atelier de Clamart, les espaces de vie quotidienne sont réduits et multifonctionnels. Le rez-de-jardin, pièce basse de plafond, accueille à la fois la chaufferie, la cuisine, la salle à manger, et est fréquemment transformé en atelier de plâtres pour Arp. Si aucune trace de ces fonctions ne subsiste aujourd’hui, l’imbrication de l’art et du quotidien se trouve encore dans le mobilier usuel que Arp peignait, pour joindre un geste esthétique au côté fonctionnel. De simples caissons de rangement prennent alors une présence nouvelle, tout en conservant leur fonction première : stocker sculptures, vases, cadres, ou toute autre création. Les visiteurs peuvent découvrir comment le dessin de la maison-atelier a été imaginé par Sophie Taeuber-Arp, et comment le projet a évolué au cours de sa construction, à travers les plans d’architecte déposés avec le permis de construire, et d’autres plans et relevés contemporains. En complément, une maquette de la maison permet de l’observer d’un point de vue normalement inaccessible. Le dernier aspect que découvrent les visiteurs est celui d’un lieu de rencontres. La maison et son jardin accueillaient régulièrement les plus grands noms des avant-gardes artistiques européennes, comme en témoigne la galerie de photographies présentée dans l’exposition : s’y croisent parmi d’autres Jean Arp, Sophie Taeuber-Arp, Max Ernst, James Joyce, Alberto Magnelli, Meret Oppenheim…
à découvrir également : le jardin de sculptures et les ateliers de plâtres
Pour poursuivre cette exposition, la fondation arp présente d’autres aspects du travail sculpté de Jean Arp. Les bronzes du jardin se tournent vers les deux ateliers que l’artiste fait construire dans les années 1950, où il se consacre à sa sculpture, modelée du plâtre. Accrochage dense de formes de toutes époques, les visiteurs peuvent ainsi plonger au cœur de l’oeuvre du sculpteur.