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“Paul Mignard“ The Return

Ă  fabre, Paris

du 5 juin au 3 octobre 2021

Alexandra Fau
fabre

Interview de Paul Mignard,
par Anne-FrĂ©dĂ©rique Fer, Ă  Paris, le 4 juin 2021, durĂ©e 18’57. © FranceFineArt.

PODCAST Interview de Paul Mignard,

par Anne-FrĂ©dĂ©rique Fer, Ă  Paris, le 4 juin 2021, durĂ©e 18’57.© FranceFineArt.

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Paul Mignard
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©Anne-Fréderique Fer, visite presse, le 4 juin 2021.

Paul Mignard, L’ExpĂ©dition Z, 2020, 142 x 193 cm, pigments sur toile libre. © Galerie JĂ©rĂŽme Poggi, Paris. Photo : © Nicolas Brasseur.
Paul Mignard, L’ExpĂ©dition Z, 2020, 142 x 193 cm, pigments sur toile libre. © Galerie JĂ©rĂŽme Poggi, Paris. Photo : © Nicolas Brasseur.
Paul Mignard, La boutique de Sorrensen, 2020, 38 x 55 cm, pigments sur panneau d’okumĂ©. © Galerie JĂ©rĂŽme Poggi, Paris. Photo : © Nicolas Brasseur.
Paul Mignard, La boutique de Sorrensen, 2020, 38 x 55 cm, pigments sur panneau d’okumĂ©. © Galerie JĂ©rĂŽme Poggi, Paris. Photo : © Nicolas Brasseur.
Paul Mignard, Par des haies de bambous, 2020, 37 x 60 cm, pigments sur panneau d’okumĂ©. © Galerie JĂ©rĂŽme Poggi, Paris .Photo : © Nicolas Brasseur.
Paul Mignard, Par des haies de bambous, 2020, 37 x 60 cm, pigments sur panneau d’okumĂ©. © Galerie JĂ©rĂŽme Poggi, Paris .Photo : © Nicolas Brasseur.
Paul Mignard, Heureusement, le gardien intervint, 2020, 16 x 27 cm, pigments sur panneau d’okumĂ©. © Galerie JĂ©rĂŽme Poggi, Paris. Photo : © Nicolas Brasseur.
Paul Mignard, Heureusement, le gardien intervint, 2020, 16 x 27 cm, pigments sur panneau d’okumĂ©. © Galerie JĂ©rĂŽme Poggi, Paris. Photo : © Nicolas Brasseur.
Paul Mignard, KhounanKaraArzylangKara II, 2020, 200 x 303 cm, pigments et paillettes sur toile libre. © Galerie JérÎme Poggi, Paris. Photo : © Nicolas Brasseur.
Paul Mignard, KhounanKaraArzylangKara II, 2020, 200 x 303 cm, pigments et paillettes sur toile libre. © Galerie JérÎme Poggi, Paris. Photo : © Nicolas Brasseur.
Paul Mignard, Est : de me voir vieillir entre la vie, 2019, 205 x 300 cm, pigments et paillette sur toile libre. © Galerie JérÎme Poggi, Paris. Photo : © Nicolas Brasseur.
Paul Mignard, Est : de me voir vieillir entre la vie, 2019, 205 x 300 cm, pigments et paillette sur toile libre. © Galerie JérÎme Poggi, Paris. Photo : © Nicolas Brasseur.

Extrait du communiqué de presse :



Curatrice : Alexandra Fau
à l’initiative du projet : Annabelle Ponroy



FABRE est le fruit d’une collaboration inĂ©dite entre une amateur d’art, une commissaire d’exposition, une artiste et son galeriste. FABRE, une nouvelle adresse Ă  proximitĂ© de la Place de la Nation Ă  Paris prĂ©sentera Ă  intervalles rĂ©guliers un environnement artistique, au sens oĂč l’on n’en voit plus ; dans son ajustement Ă  l’espace, son attention portĂ©e au dĂ©tail, son raffinement dans le rapport Ă  l’autre. Dans un appartement haussmannien – à ses heures, cabinet de psychanalyse -, Annabelle Ponroy invitera rĂ©guliĂšrement un crĂ©ateur Ă  renouer avec « l’esprit salon » d’antan dans sa dimension exclusive, mondaine et sociale.




L’exposition – vue par Alexandra Fau

“C’est par la couleur que je suis arrivĂ© Ă  l’Alchimie‘. Par cette derniĂšre phrase, s’achĂšve notre entretien avec Paul Mignard (nĂ© en 1989) Ă  quelques mois de l’exposition “The Return“ (5 juin-3 octobre 2021). Elle est rĂ©vĂ©latrice d’une rĂ©flexion puissamment ancrĂ©e dans la pratique picturale, mĂȘme si son inspiration puise Ă  de multiples sources, dans divers domaines (la cartographie, la minĂ©ralogie, le chamanisme (1)
).

Dans son atelier, Paul Mignard est habituĂ© Ă  manipuler des colorants, des poudres, de la feuille d’or et d’argent. Il fait resurgir la figure de l’artisan-artiste d’autrefois ; celui qui prenait part au savant mĂ©lange des pigments et des liants. MalgrĂ© l’invention des pigments synthĂ©tiques, Mark Rothko s’engage dans des expĂ©riences pigmentaires parfois audacieuses aux dommages irrĂ©versibles. Les craquelures sont ainsi une sorte de rançon Ă  l’empirisme expĂ©rimental de l’artiste. Dans les mĂȘmes annĂ©es, Yves Klein inventeur de l’IKB (International Klein Blue) utilise la matiĂšre picturale comme vecteur de poĂ©tique, portĂ© par un ailleurs dĂ©matĂ©rialisĂ© et hypra sensible.

Dans l’appartement, transformĂ© en laboratoire le temps de l’exposition, les Ă©lĂ©ments Ă©pars – colorants et poudres encapsulĂ©es parfois trĂšs toxiques – constituent les diffĂ©rents Ă©tats de ce qui pourrait ĂȘtre le Grand oeuvre en Alchimie. A Fabre, s’officie une sorte de “mĂ©lange“ entre les sons, les odeurs, les couleurs, les matiĂšres et les gestes. Pas de toile montĂ©e sur chĂąssis Ă  proprement parlĂ©. PlutĂŽt des banniĂšres, reprenant la forme de la toile libre du mouvement Support(s)-Surface(s) ou encore les anciennes toiles de dĂ©cor de cinĂ©ma de Jim Shaw pour l’exposition “Left Behind“ au CAPC de Bordeaux en 2010. L’artiste Paul Mignard vient ensuite y dĂ©poser des chapelets, des chiffres Ă©nigmatiques, en guise d’offrandes “sans Dieu“. Ses oeuvres renvoient aux productions mystico-religieuses des premiĂšres annĂ©es de Robert Smithson (Untitled [Pink linoleum center], 1964). De mĂȘme le tĂ©lescopage entre la peinture “la table d’Émeraude“ et la bande son issue du magnĂ©tophone RĂ©vox n’est pas sans rappeler une autre piĂšce de Smithson, Untitled [Record player] 1962.

Pour l’exposition “The Return“ Ă  Fabre, Paul Mignard a en effet imaginĂ© une double partition, spatiale et sonore. La toile peinte recto-verso rejoue en effet le dĂ©coupage initial du double salon parisien – la dĂ©coupe de chacune des piĂšces Ă©tant encore visible avec les deux cheminĂ©es attenantes. Elle offre symboliquement une percĂ©e, un trou dans la vie (2). InspirĂ© du dispositif de la lanterne magique (3), cette traversĂ©e du miroir annonce une bascule possible vers un monde secret, et renvoie plus encore au cabinet de psychanalyse adjacent. Le travail de Paul Mignard est aussi une traversĂ©e sĂ©mantique. Ainsi repĂšre-t-il une divergence notable dans la version arabe extraite du Secret des secrets du pseudo-Aristote (Xe siĂšcle), avec la version latine d’hortulain (XIVe siĂšcle) (4).

Dans l’appartement, des formes et des signes s’égrĂšnent et s’accumulent. L’antre de Paul Mignard est un peu Ă  l’image de celle de l’architecte Yona Friedman peuplĂ©e de chapelets, gri-gri ou d’élĂ©ments votifs. Quant aux bananes sĂ©chĂ©es, elles sont “une action nĂ©cessaire et pĂ©riphĂ©rique comme de laver ses pinceaux“. Ces Ă©lĂ©ments divers extraits de civilisations variĂ©es, des objets magiques, des formes taillĂ©es, quantitĂ© de minĂ©raux (l’azurite, la malachite et le soufre) contribuent Ă  la recrĂ©ation d’une atmosphĂšre pas si Ă©loignĂ©e de celle qui prĂ©valait au 19Ăšme siĂšcle. L’historien de l’art Pascal Griener parle de “ce qui attire alors les masses tient moins au contenu des musĂ©es qu’à la promesse d’un merveilleux toujours renouvelĂ©, d’expĂ©riences chatoyantes et multiples oĂč le corps, et non l’esprit dĂ©sincarnĂ© joue un rĂŽle dĂ©cisif – reconstitutions de lieux “atmosphĂ©riques“, objets magiques, formes Ă©tranges taillĂ©es par des hommes appartenant Ă  des cultures inconnues“ (5). Dans ce sillage, l’installation Ă  Fabre met le spectateur face Ă  une mise en scĂšne de l’art, de la magie qui laisse place Ă  “une fascination stupĂ©faite“.

Paul Mignard voue un penchant pour la codification et le symbolisme. Ses pentacles – cachĂ©s Ă  la vue Ă  Fabre – sont associĂ©s Ă  7 planĂštes, 7 couleurs et aux 7 jours de la semaine. Mais, la “collision de symboles les annihile tout Ă  la fois“. La logique humaine voudrait pourtant trouver un sens, une vĂ©ritĂ© cachĂ©e ou tout du moins se frayer un passage. Pour autant, l’Ɠuvre ne se donnera jamais pleinement ; elle est cryptĂ©e comme un ancien talisman indĂ©chiffrable. Au spectateur, de la parcourir visuellement, de se perdre dans ses mĂ©andres et ses flux scintillants pour y tracer son propre chemin de traverse, dans une lente dĂ©couverte de soi.

Le travail de Paul Mignard explore la notion d’ésotĂ©rico-gĂ©ographie, l’apprĂ©hension de la gĂ©ographie et de la gĂ©ologie comme des espaces Ă  double dimension : Ă  la fois physique et Ă©sotĂ©rique, rĂ©vĂ©lant un sens profond ; la reprĂ©sentation symbolique d’une expĂ©rience spirituelle, mystique ou Ă©motionnelle. Son installation renvoie Ă  des rituels de la “tente claire – tente sombre“, localisĂ© en SibĂ©rie (6). Quant Ă  la toile “La Table d’Émeraude“, elle s’inspire tout Ă  la fois de la reprĂ©sentation de La Table d’Émeraude d’Heinrich Khunrath (1610) mĂȘlĂ©e au souvenir d’un paysage de crĂȘte le temps d’une randonnĂ©e dans le Vercors, avant de suivre les pas de l’artiste dans un parcours plus urbain, Ă  la DĂ©fense, oĂč il a actuellement son atelier.

Ses vastes compositions sur trois mĂštres de long offrent une vision panoramique ponctuĂ©e de signes divers, d’écritures cartographiques, d’effets de matiĂšres dignes des ForĂȘts de Max Ernst (Lago di Como Lago, 2016), de polyĂšdres, recouverts de pigments et de paillettes. Certaines oeuvres portent l’empreinte d’objets religieux (chapelets) ou traditionnels (dentelles Ă  travers lesquelles l’artiste a soufflĂ© au sol de la poudre de pigment). Ces empreintes forment des lignes qui sont autant de chemins Ă  parcourir fiĂ©vreusement comme si l’énigme de la toile s’y trouvait. Tim Ingold convoque cette histoire des lignes, de celle des chemins de traverse, des dĂ©placements improvisĂ©s par les autistes et Ă©tudiĂ©s par Fernand Deligni, de la ligne sinueuse, imprĂ©visible. Au mĂ©pris des adeptes de la ligne droite, l’oeuvre en appelle Ă  ceux “qui vagabondent, qui ne marchent pas droit mais choisissent dĂ©libĂ©rĂ©ment de zigzaguer, qui se conduisent – comme Le Corbusier l’insinue – comme des Ăąnes ? 
 (les adeptes de la ligne droite) collectent toutes les informations, qu’ils confondent avec la connaissance. Quel besoin ont-ils de questionner le monde, puisqu’ils savent dĂ©jĂ  ? aveuglĂ©s par l’information et Ă©blouis par les images, ils ne voient rien de ce qui se passe sous leurs yeux. (
) En vĂ©ritĂ©, jamais dans l’histoire du monde, autant d’informations n’ont Ă©tĂ© associĂ©es Ă  si peu de sagesse. Il me semble que la sagesse ne suit pas les lignes droites mais qu’elle emprunte plutĂŽt la mĂȘme route que celle des Ăąnes“ (7).

Paul Mignard a consciemment ou non parlĂ© Ă  plusieurs reprises de “chambre d’échos“. La profusion des signes et des symboles convoquĂ©s dans ses oeuvres relaie notre sentiment de vivre confusĂ©ment le monde, de cheminer Ă  l’aveugle, en dĂ©veloppant par nĂ©cessitĂ© de nouvelles formes de croyances.

Alexandra Fau

1. Voyager dans l’invisible, techniques chamaniques de l’imagination, Charles StĂ©panoff, prĂ©face de Philippe Descola, La DĂ©couverte, 2019.
2. Jean-Pierre Criqui, Un trou dans la vie. Essais sur l’art depuis 1960, collection “Arts et EsthĂ©tique“, DesclĂ©e de Brower, 2002.
3. La lanterne magique est une boite percĂ©e d’une ouverture par laquelle pĂ©nĂštre la lumiĂšre extĂ©rieure, ou bien munie d’une source lumineuse interne. La lumiĂšre se rĂ©flĂ©chit sur un miroir et vient frapper une plaque de verre peinte qui est installĂ©e Ă  l’envers Ă  l’opposĂ© de la source lumineuse. Par un phĂ©nomĂšne optique, la lumiĂšre passe par une lentille et rĂ©tablit les images Ă  l’endroit qui sont projetĂ©es sur un mur ou un drap.
4. HermĂšs TrismĂ©giste, La Table d’Émeraude et sa tradition alchimique, prĂ©face de Didier Khan, Les Belles Lettres, 2017
5. Pascal Griener, La RĂ©publique de l’oeil. L’expĂ©rience de l’art au siĂšcle des LumiĂšres, Paris, Odile Jacob, 2010, p188.
6. Un dispositif dans lequel l’assistance est Ă©clairĂ©e par le feu ou plongĂ©e dans l’obscuritĂ© totale alors que le chamane use de technique pour faire entendre sons et voix.
7. Tim Ingold, Faire – anthropologie, archĂ©ologie, art et architecture, Ă©ditions Dehors, 2017, p.298.



PAUL MIGNARD est nĂ© en 1989. Il vit et travaille Ă  Paris, France. Ces peintures revisitent le genre du paysage depuis les profondeurs de la psychĂ© et du temps. Il travaille avec des pigments et poudres de mĂ©taux, qu’il tamise ou souffle directement sur la surface non tendue de ses toiles, parfois imprimĂ©es au prĂ©alable et toujours exposĂ©es sans chĂąssis. Ses compositions forment des palimpsestes visuels qui Ă©voquent des cartes mentales ; reliant des motifs empruntĂ©s au corps humain et Ă  la nature, Ă  la gĂ©omĂ©trie et Ă  divers mythes ancestraux. ProfondĂ©ment inspirĂ© par la marche, qu’il mĂšne rĂ©guliĂšrement ; Paul Mignard suggĂšre ainsi la transformation rĂ©ciproque de l’ĂȘtre et de son environnement Ă  travers la description de paysages intĂ©rieurs, dans lesquels le prĂ©sent et le passĂ©, le rĂ©el et l’imaginaire, ou encore le sacrĂ© et le profane ne sont pas sĂ©parĂ©s mais irrĂ©vocablement connectĂ©s.

Paul Mignard est diplĂŽmĂ© de l’École nationale supĂ©rieure des Beaux-Arts de Lyon depuis 2011. Il a reçu la prestigieuse Bourse RĂ©vĂ©lations Emerige en 2018. Ses oeuvres ont Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©es dans plusieurs expositions, dont Outside Our Ă  la Villa Emerige (Paris, Fr) ; Le temps des assassins Ă  la galerie Michel Journiac (2018, Paris, France); et Rappelle-toi de la couleur des fraises au CrĂ©dac (2017, Ivry-sur-Seine, France). Un ciel tout vert Ă  la Galerie Poggi (2019, Paris, Fr). Il est reprĂ©sentĂ© par la galerie JĂ©rĂŽme Poggi.


Pour visiter l’exposition, uniquement sur rendez-vous via le mail contact@fabredeglantine.com
Adresse : 20 rue Fabre d’Eglantine – 75012 paris