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🔊 “Julio Le Parc, Dessins au tĂ©lĂ©phone ou pas” Ă  la Maison de l’AmĂ©rique Latine, du 19 mars au 29 juin 2024

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“Julio Le Parc, Dessins au tĂ©lĂ©phone ou pas”
Carte blanche Ă  Julio Le Parc. Dessins 1954-2023

Ă  la Maison de l’AmĂ©rique Latine, Paris

du 19 mars au 29 juin 2024

Maison de l’AmĂ©rique Latine


Interview de Julio Le Parc,  par Anne-FrĂ©dĂ©rique Fer, Ă  Paris, le 18 mars 2024, durĂ©e 10’22, © FranceFineArt. (portrait du dossier de presse, ©DR)

PODCAST –  Interview de Julio Le Parc,


par Anne-FrĂ©dĂ©rique Fer, Ă  Paris, le 18 mars 2024, durĂ©e 10’23,
© FranceFineArt.
(portrait du dossier de presse, ©DR)


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Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
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Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
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Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
Julio Le Parc, Dessins au tŽlŽphone ou pas.
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©Anne-Fréderique Fer, présentation presse avec Julio Le Parc, le 18 mars 2024.
Julio Le Parc, Dessin au téléphone, 10 x 10 cm, 1978.

Julio Le Parc, Dessin au téléphone, 10 x 10 cm, 1978.


Extrait du communiqué de presse :

Julio Le Parc, Dessins Historieta, 29,7 x 42 cm, 1978.

Julio Le Parc, Dessins Historieta, 29,7 x 42 cm, 1978.

Julio Le Parc, Dessin, 30 x 20 cm, 1988.

Julio Le Parc, Dessin, 30 x 20 cm, 1988.

Julio Le Parc, Dessin, 29,7 x 21 cm, 2023.

Julio Le Parc, Dessin, 29,7 x 21 cm, 2023.

Une coproduction Maison de l’AmĂ©rique latine – Atelier Le Parc et son directeur artistique Yamil Le Parc.



La Maison de l’AmĂ©rique latine Ă  Paris, est heureuse de prĂ©senter, au printemps 2024, un nouveau temps fort monographique dĂ©diĂ© Ă  Julio Le Parc, figure majeure de l’art cinĂ©tique et contemporain. Sous l’intitulĂ© de Julio Le Parc, Dessins au tĂ©lĂ©phone ou pas, l’exposition met en lumiĂšre le travail de dessinateur de ce grand et prolifique artiste d’origine argentine, nĂ© en 1928 et naturalisĂ© français depuis les annĂ©es 1980 ; une pratique qu’il n’a jamais cessĂ© d’explorer tout au long de sa carriĂšre. L’exposition fera aussi l’objet de la rĂ©vĂ©lation au public d’un grand mobile inĂ©dit crĂ©Ă© spĂ©cialement pour l’occasion.

Les dessins prĂ©sentĂ©s dans l’exposition, dont les premiers remontent aux annĂ©es d’études de Julio Le Parc Ă  l’école des Beaux-Arts de Buenos Aires, rĂ©vĂšlent l’étendue d’une pratique artistique dont les prĂ©occupations plastiques et idĂ©ologiques ne se limitent pas au domaine strict de l’art cinĂ©tique.

Ainsi, Ă  cĂŽtĂ© d’une importante sĂ©lection d’études rendant compte de son Ă©volution de style Ă  travers le temps (sur une pĂ©riode qui va des oeuvres en noir et blanc de la fin des annĂ©es 1950 jusqu’aux « Alchimies » des annĂ©es 1980-90 et jusqu’à aujourd’hui), le visiteur pourra dĂ©couvrir des dessins qui tĂ©moignent de son activisme politique, notamment dans le cadre des mouvements contestataires de mai 1968 (il participe aux Ateliers populaires) – ce qui lui valut d’ĂȘtre expulsĂ© de France pendant cinq mois. A cela s’ajoutent des caricatures, les dessins au tĂ©lĂ©phone et Ă  main levĂ©e Ă  travers lesquels Julio Le Parc manie le crayon ou le stylo Ă  bille avec finesse et spiritualitĂ©.

Au fil du parcours, le visiteur pourra Ă©galement dĂ©couvrir l’oeuvre intitulĂ©e Historieta (1997) qui, Ă  la maniĂšre d’un petit thĂ©Ăątre, met en scĂšne avec un humour acerbe des personnages dĂ©coupĂ©s pour dĂ©noncer la « face cachĂ©e de l’art, de l’artiste et de son contexte social ». Suivant un mĂȘme engagement critique, sera aussi donnĂ© Ă  voir un film d’animation expĂ©rimental spĂ©cialement rĂ©alisĂ© pour l’occasion par un des fils de l’artiste, Juan, fondĂ© sur le montage graphique de dessins de pĂ©riodes diverses, dans un esprit satyrique et mordant proche du dadaĂŻsme.

L’espace d’exposition du rez-de-chaussĂ©e de la Maison de l’AmĂ©rique latine accueillera un grand mobile inĂ©dit, illustrant les recherches continues de Julio Le Parc sur l’espace, la lumiĂšre et le mouvement.

L’ensemble des oeuvres rĂ©unies pour la Maison de l’AmĂ©rique latine rĂ©vĂšlent le gĂ©nie pluriel de Julio Le Parc, crĂ©ateur infatigable dont la richesse du langage visuel dĂ©passe les catĂ©gories critiques conventionnelles.


Domitille d’Orgeval, historienne de l’art.




Julio Le Parc, Dessin politique, 21 x 16 cm, 1976.

Julio Le Parc, Dessin politique, 21 x 16 cm, 1976.

Julio Le Parc, Dessins Historieta, 42 x 59,5 cm, 1978.

Julio Le Parc, Dessins Historieta, 42 x 59,5 cm, 1978.


Alchimies transgressives – par Domitille d’Orgeval

L’exposition Julio Le Parc, Dessins au tĂ©lĂ©phone ou pas, qui se tient Ă  la Maison de l’AmĂ©rique latine, met en lumiĂšre l’immense talent de dessinateur de l’artiste, en rĂ©unissant prĂšs de 400 dessins dont les plus anciens remontent aux annĂ©es 1950, quand il Ă©tait alors Ă©tudiant Ă  l’École des Beaux-Arts de Buenos Aires. Cet ensemble trĂšs consĂ©quent, complĂ©tĂ© par la prĂ©sentation d’un grand mobile cinĂ©tique inĂ©dit, la projection du film Historieta rĂ©alisĂ© par Gabriel Le Parc et d’une vidĂ©o, Caricatures au tĂ©lĂ©phone ou pas rĂ©alisĂ©e, par Juancito Le Parc, rĂ©vĂšle l’importance que constitue pour Julio Le Parc la question de l’engagement social et politique. Effectivement, aujourd’hui reconnu comme l’une des grandes figures historiques de l’art cinĂ©tique international, Julio Le Parc est aussi depuis les dĂ©buts de sa carriĂšre un artiste militant ou, selon ses termes, un « plasticien expĂ©rimentateur dans une sociĂ©tĂ© capitaliste1». Partisan de la guĂ©rilla culturelle, il n’a cessĂ© par le biais d’actions collectives, de publications de dessins et de textes rĂ©volutionnaires, de mener des combats pour l’égalitĂ©, la justice et la libertĂ©, dans tous les domaines (culturels, politiques, sociaux…).

Les dessins rĂ©unis pour la Maison de l’AmĂ©rique latine proposent une vĂ©ritable plongĂ©e dans la vie de Julio Le Parc et tĂ©moignent du caractĂšre prolifique de sa crĂ©ation. Qu’ils soient figuratifs ou abstraits, porteurs d’un message politique ou purement plastique, exĂ©cutĂ©s avec la prĂ©cision de l’ingĂ©nieur, l’esprit mordant du caricaturiste ou la sensibilitĂ© du poĂšte, ils montrent comment l’artiste, au fil du temps (et du tĂ©lĂ©phone !), a crĂ©Ă© une calligraphie fine, Ă©lĂ©gante et spirituelle. Rares ont Ă©tĂ© les expositions privilĂ©giant les dessins de Julio Le Parc. L’exercice de style a Ă©tĂ© inaugurĂ© par l’exposition Julio Le Parc Ă  la Serpentine Gallery de Londres en 2014 tandis qu’en 2019, Julio Le Parc, un visionario qui se tenait au Museo Nacional de Bellas Artes de Buenos Aires et cĂ©lĂ©brait les 90 ans de l’artiste fut l’occasion de redĂ©couvrir les dessins figuratifs de jeunesse de l’artiste. En cela l’exposition de la Maison de l’AmĂ©rique latine est inĂ©dite.

Des annĂ©es de jeunesse passĂ©es en Argentine tĂ©moignent les dessins de Julio Le Parc rĂ©alisĂ©s Ă  l’École des Beaux-Arts de Buenos Aires (il y entre en 1955).

On mesure l’évolution rapide de l’artiste qui se tourne vers l’abstraction et passe rapidement d’une gĂ©omĂ©trie lyrique, lĂ©gĂšrement surrĂ©alisante, Ă  un langage plus rigoureux. Durant ces annĂ©es oĂč il Ă©volue dans un climat d’émulation intellectuelle intense, en cĂŽtoyant aussi bien Lucio Fontana (qui fut son professeur de modelage) que les mouvements d’avant-garde Arte Concreto-InvenciĂłn et Madí, le jeune Julio Le Parc prend dĂ©jĂ  la voie de l’engagement politique et devient le chef de file d’un mouvement contestataire d’étudiants luttant pour la restructuration de l’enseignement artistique. En 1958, la dĂ©couverte de l’art de Vasarely Ă  l’occasion de l’exposition que lui consacre le MusĂ©e national des Beaux-Arts de Buenos Aires lui ouvre de nouveaux horizons : Julio Le Parc se concentre dans ses Ă©tudes sur l’usage du noir et blanc, privilĂ©gie la ligne droite, Ă©limine tout motif et composition. Dans la foulĂ©e, il dĂ©cide de se rendre Ă  Paris, qui jouit encore du statut de Capitale des arts, pour aller Ă  la rencontre d’un art nouveau plein de promesse. Vasarely, dont il fait la connaissance, le met en relation avec d’autres jeunes artistes aux prĂ©occupations plastiques proches des siennes, comme François Morellet, JoĂ«l Stein, Yvaral, François et Vera MolnĂĄr. Avec ces derniers (sauf les MolnĂĄr) mais aussi ses compatriotes Garcia Rossi et Sobrino venus Ă©galement s’installer Ă  Paris, il fonde le GRAV2 (Groupe de Recherche d’Art Visuel) en 1960. Durant ses sept annĂ©es de vie, ce groupe participe au dĂ©veloppement et Ă  la diffusion de l’art optico-cinĂ©tique dans toute l’Europe. S’érigeant dĂšs le dĂ©but contre la figure de l’artiste inspirĂ©, il met l’accent sur la nĂ©cessitĂ© de pratiquer un art expĂ©rimental, collectif, qui accorde la primautĂ© aux questions de perceptions visuelles (prises de position thĂ©orisĂ©es dans des tracts tels qu’Assez de mystification, distribuĂ© Ă  la Biennale de Paris en 1961). Julio Le Parc, avec ses crĂ©ations cinĂ©tiques d’un genre nouveau, met en interaction dans les trois dimensions de l’espace des matĂ©riaux industriels comme le Plexiglas, le miroir, la lumiĂšre Ă©lectrique, et explore les mĂ©canismes optiques qui favorisent une comprĂ©hension directe de l’oeuvre. De mĂȘme, dans ses gouaches, il met au point un systĂšme de permutation au sein d’une gamme chromatique de 14 couleurs pures, contenant en elles un potentiel de combinaisons quasi infini qu’il continue aujourd’hui encore d’explorer sur tous les types de support.

Le GRAV se signale aussi par son militantisme, son esprit tapageur et transgressif, en concevant des oeuvres faisant appel Ă  la participation active du spectateur : citons le fameux parcours semĂ© d’embĂ»ches du Labyrinthe prĂ©sentĂ© Ă  la Biennale de Paris de 1963 mais aussi des Ă©vĂ©nements comme en avril 1966, Une JournĂ©e dans la rue, oĂč des installations invitaient les passants Ă  interagir pour bousculer leur passivitĂ© routiniĂšre (Julio Le Parc prĂ©senta Ă  cette occasion ses dalles mobiles).

A l’issue de cette pĂ©riode particuliĂšrement dense et active, Julio Le Parc, qui est alors reprĂ©sentĂ© par la Galerie Denise RenĂ© (cette collaboration s’arrĂȘtera en 1976), reçoit le Grand Prix international de peinture Ă  la Biennale de Venise. SuccĂ©dant Ă  l’amĂ©ricain Rauschenberg, il devient l’emblĂšme de la revanche de l’Europe sur les États-Unis, c’est « L’Op aprĂšs le Pop », disait-on alors3. Julio Le Parc, qui ne se laisse pas gagner par la vanitĂ© des honneurs, se livre alors Ă  une grande tournĂ©e en AmĂ©rique latine au cours de laquelle il bĂ©nĂ©ficie d’expositions Ă  Buenos Aires, Montevideo, Caracas et AsunciĂłn ; celles-ci sont l’occasion de dĂ©bats intenses sur le rĂŽle de l’intellectuel et de l’artiste dans la sociĂ©tĂ©, mais aussi de rencontres avec un public avide d’échanges et de connaissances. Partant, Julio Le Parc dĂ©cide de poursuivre sa carriĂšre dans une nouvelle perspective, comme il le dĂ©clare dans un de ses textes majeurs, GuĂ©rilla culturelle ? (mars 1968) : « l’intĂ©rĂȘt rĂ©side, non plus dans l’oeuvre d’art (avec ses qualitĂ©s d’expression, de contenu, etc.), mais dans la contestation du systĂšme culturel. Ce qui compte, ce n’est plus l’art, c’est l’attitude de l’artiste4 », anticipant ainsi l’exposition culte d’Harald Szeemann, « Quand les attitudes deviennent formes » (Kunsthalle de Berne, 1969). Julio Le Parc s’engage alors sur tous les fronts des rĂ©voltes, participe activement aux Ă©vĂ©nements de mai 1968, Ă  l’occupation de l’École des Beaux-Arts de Paris, Ă  l’édition d’affiches au sein de l’atelier populaire, faisant ainsi de la figuration critique son outil de communication privilĂ©giĂ©. ArrĂȘtĂ© lors d’une manifestation aux usines Renault de Flins avec quelques autres de ses camarades comme Hugo Demarco, il est expulsĂ© de France pendant cinq mois.

À son retour, Julio Le Parc ne renonce pour autant pas Ă  son activisme social. Ses « jeux-enquĂȘtes tapageurs », conçus Ă  la maniĂšre d’un stand de fĂȘtes foraines, donnent le ton. EncouragĂ© par le slogan « renversez les mythes, choisissez vos ennemis ou frappez les gradĂ©s », le spectateur est incitĂ© Ă  jeter des boules sur des personnages incarnant les archĂ©types du temps comme Mickey, le pape, la figure du dictateur mais celle aussi de l’artiste. DĂ©fiant toute forme de pouvoir institutionnel, Julio Le Parc en avril 1972 n’hĂ©site pas Ă  jouer la rĂ©trospective que lui propose le MusĂ©e d’Art moderne de la Ville Paris Ă  l’exposition 72 / 72 Ă©tiquetĂ©e « Pompidou », aux cĂŽtĂ©s du Front des Artistes Plasticiens (FAP) qui refuse la soumission des artistes Ă  la propagande culturelle du prĂ©sident de la RĂ©publique. Dans le cadre du groupe Denuncia lors du 23e salon de la Jeune Peinture, qu’il crĂ©e avec Gontran Guanaes, Netto, Alejandro Marcos, JosĂ© Gamarra, il dĂ©nonce la torture pratiquĂ©e par les dictatures en AmĂ©rique latine. Un dessin de Julio Le Parc, prĂ©paratoire du grand polyptique en 7 parties exĂ©cutĂ© collectivement, en offre le tĂ©moignage glaçant. Continuant sa rĂ©flexion sur l’arbitraire des politiques culturelles, il prend Ă  ce titre la tĂȘte de la contestation des artistes mobilisĂ©s contre les critĂšres et les valeurs accompagnant la crĂ©ation du Centre Georges Pompidou : de ces combats tĂ©moignent aujourd’hui une sĂ©rie de dessins satiriques montrant Pontus Hulten, directeur fraĂźchement nommĂ©, soumis Ă  l’impĂ©rialisme yankee. En 1978, ces divers Ă©pisodes inspirent Ă  Julio Le Parc l’élaboration d’un rĂ©cit, Historieta5, oĂč il met en scĂšne, Ă  la maniĂšre d’un petit thĂ©Ăątre et avec un humour acerbe, des personnages dĂ©coupĂ©s pour rĂ©vĂ©ler la « face cachĂ©e de l’art, de l’artiste et de son contexte social ». Les diffĂ©rents acteurs du monde de l’art, les mythes qu’il vĂ©hicule, la corruption du systĂšme culturel, sont tour Ă  tour Ă©pinglĂ©s, moquĂ©s, parodiĂ©s (Julio Le Parc ne manque d’ailleurs pas d’interroger les limites de la dĂ©marche de l’artiste contestataire). Ces dessins trĂšs aboutis deviendront en 1988 un film-vidĂ©o rĂ©alisĂ© par Gabriel Le Parc puis seront rĂ©unis dans un ouvrage en 1997. Le film d’animation expĂ©rimental Caricatures au tĂ©lĂ©phone ou pas de Juancito Le Parc, rĂ©sultant de l’assemblage de dessins de pĂ©riode diverses, dans un esprit frondeur et mordant, proche du dadaĂŻsme, s’inscrit dans cette filiation. Durant toutes ces dĂ©cennies, Julio Le Parc, soucieux de ne pas (s)’enfermer dans la « thĂ©ĂątralitĂ© » ou « le militantisme permanent6 », n’a jamais abandonnĂ© ses recherches et expĂ©rimentations de plasticien sur l’espace, la lumiĂšre et le mouvement. De nombreuses Ă©tudes pour les sĂ©ries des Modulations, des Alchimies puis des Sculptures Torsions (initiĂ©e en 1974, 1988 puis au dĂ©but des annĂ©es 2000) en attestent. On y observe les dĂ©ploiements savants de constructions gĂ©omĂ©triques, de machineries imaginaires, de formes tubulaires extravagantes, tracĂ©s avec une grande prĂ©cision, souvent sous forme de petits points (Ă  la maniĂšre des nĂ©o-impressionnistes), en noir et blanc ou dans les couleurs vives de l’arc-en-ciel. C’est lorsqu’il s’adonne Ă  ces dessins de laboratoire que l’artiste trouve le point de dĂ©part de ses projets, qu’il s’agisse de peintures monumentales ou d’installations spectaculaires, comme il le confiait : « c’est parti de lĂ  comme toujours, je me laisse aller, je cherche, je dessine, je trouve des idĂ©es, au fur et Ă  mesure j’essaie de les mettre au point », dĂ©clarait-il dans un entretien Ă  Hans Ulrich Obrist (2013).

Alors qu’il est cĂ©lĂ©brĂ© dans les plus grands musĂ©es du monde, Julio Le Parc, pour cette exposition que lui consacre la Maison de l’AmĂ©rique latine, a refusĂ© le format classique de la rĂ©trospective. Non sans humilitĂ©, il a prĂ©fĂ©rĂ© mettre en avant, Ă  travers ses dessins, le caractĂšre expĂ©rimental, engagĂ© et visionnaire de son travail. Une maniĂšre de rappeler que l’art procĂšde chez lui d’une attitude gĂ©nĂ©reuse, visant Ă  l’élargissement des consciences, Ă  briser les frontiĂšres entre l’art et la vie.

Domitille d’Orgeval



1-Julio Le Parc, Historieta : petite histoire en images interrogeant la face cachĂ©e de l’art, de l’artiste et de son contexte social, avec un texte de Jean-Louis Pradel, Nantes, Éditions Joca Seria, 1997, n. p.

2-Cf. StratĂ©gies de participation, GRAV – Groupe de Recherche d’Art Visuel. 1960-1968, Grenoble, Le Magasin, 1998 et Mouvement lumiĂšre participation, GRAV 1960-1968, MusĂ©e des Beaux-Arts de Rennes, 2013. Avant le GRAV fut crĂ©Ă© en 1960 le CRAV (Centre de Recherche d’Art Visuel) avec Morellet, François et Vera MolnĂĄr, Servanes, Stein, Yvaral, Le Parc, Sobrino, Garcia Rossi, Demarco, Garcia-Miranda. Les MolnĂĄr ainsi que Servanes, refusant d’exposer tant que n’auraient pas Ă©tĂ© Ă©tablies des lois et des conventions d’un art de masse, dĂ©missionnĂšrent du CRAV quatre mois plus tard.

3-Propos rapportés par Pierre Restany dans « Un arc-en-ciel entre le coeur et la raison » (1995), un texte consultable sur le site internet de Julio Le Parc.

4-Julio Le Parc, « Guérilla culturelle ? », Sois artiste et tais-toi ! Textes, 1959-2017, Exils, Paris, 2017, p. 48-49.

5-Cf. Julio Le Parc, Historieta : petite histoire en images interrogeant la face cachĂ©e de l’art, de l’artiste et de son contexte social, op. cit.

6-Termes employĂ©s par Julio Le Parc lors d’un entretien paru dans Art Press : https://www.artpress.com/2013/03/22/dossier-lumiere-et-mouvement-

julio-le-parc-le-temps-de-la-lumiere.