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🔊 “Harry Gruyaert” LE BAL, Paris, du 15 juin au 24 septembre 2023

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“Harry Gruyaert” La part des choses

LE BAL, Paris

du 15 juin au 24 septembre 2023

Le Bal


Interview de Diane Dufour, directrice du LE BAL et commissaire de l’exposition, par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 14 juin 2023, durée 15’24. © FranceFineArt.

PODCAST –  Interview de Diane Dufour, directrice du LE BAL et commissaire de l’exposition,


par Anne-FrĂ©dĂ©rique Fer, Ă  Paris, le 14 juin 2023, durĂ©e 16’46,
© FranceFineArt.


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©Anne-Fréderique Fer, présentation presse, le 14 juin 2023.

Extrait du communiqué de presse :

Harry Gruyaert, Égypte, Al Qarnah, Vallée des Rois, 1987 © Harry Gruyaert / Magnum Photos.
Harry Gruyaert, Égypte, Al Qarnah, Vallée des Rois, 1987 © Harry Gruyaert / Magnum Photos.
Harry Gruyaert, Irlande, Comté de Kerry, 1983 © Harry Gruyaert / Magnum Photos.
Harry Gruyaert, Irlande, Comté de Kerry, 1983 © Harry Gruyaert / Magnum Photos.
Harry Gruyaert, Belgique, Trans-Europ-Express, 1981 © Harry Gruyaert / Magnum Photos.
Harry Gruyaert, Belgique, Trans-Europ-Express, 1981 © Harry Gruyaert / Magnum Photos.
Harry Gruyaert, Belgique, Boom, 1988 © Harry Gruyaert / Magnum Photos.
Harry Gruyaert, Belgique, Boom, 1988 © Harry Gruyaert / Magnum Photos.
Harry Gruyaert, URSS, Moscou, 1989 © Harry Gruyaert / Magnum Photos.
Harry Gruyaert, URSS, Moscou, 1989 © Harry Gruyaert / Magnum Photos.
Harry Gruyaert, Belgique, Anvers, 1988 © Harry Gruyaert / Magnum Photos.
Harry Gruyaert, Belgique, Anvers, 1988 © Harry Gruyaert / Magnum Photos.

Commissaire de l’exposition : Diane Dufour, directrice du LE BAL

Photographe né à Anvers en 1941, Harry Gruyaert est un des pionniers de la photographie couleur, au même titre que les grands américains qu’il a très tôt vus et aimés, Joel Meyerowitz, William Eggleston ou Stephen Shore. Loin de sa Belgique natale trop étriquée, le New York du début des années 1970 l’expose au Pop Art et « à regarder autrement la banalité, à accepter une sorte de laideur du monde et à en faire quelque chose ». Ses amitiés avec la nouvelle scène new-yorkaise (Gordon Matta-Clark, Richard Nonas) confortent ce que Le Désert rouge d’Antonioni, « vu mille fois », avait déjà distillé en lui : le besoin d’arpenter le monde, de s’y jeter avidement, non pour le désigner ou nous en informer mais pour le sculpter, le modeler. Transcrire sa perception des choses et non les choses elles-mêmes. Se faire voyant, pas témoin.

Harry Gruyaert a dit cette lutte physique, ce corps à corps avec les choses et les êtres : « Je me jette dans les choses pour éprouver ce mystère, cette alchimie : les choses m’attirent et j’attire les choses ». Dans la bande passante de la vie, alors que tout se dérobe et échappe et pour que « tout tombe en place », il faut être à la fois plus là et moins là, s’oublier soi-même pour saisir la matière, la texture, tout ce qui fait l’ici et le maintenant ; se soumettre, tout en en cultivant la prescience, à un ordonnancement instinctif des formes, couleurs, symboles, lumières, motifs.

Alain Bergala dans Correspondance new-yorkaise distingue deux types de photographes : celui qui croit en la réalité et fait de la photographie un art de la présence et celui qui vit le réel comme impossible et ne fait que fixer l’absence. À l’aune de cette distinction, Harry Gruyaert serait une anomalie, un photographe dont la présence viscérale au monde vise avant tout à en saisir le caractère fugitif, intangible. Des trajectoires isolées, des espaces disjoints, des corps en périphérie, tout concourt dans ses images à rendre l’absurdité du monde, le collage surréaliste de la vie et ses morceaux détachés.

Photographier peut donc aussi être cela : communier avec un état de solitude et dire un mensonge plus vrai que la vérité.

Diane Dufour

« Je me dis parfois qu’il serait tellement plus simple de mettre en scène mes images, de repeindre tel mur comme Antonioni, ou de demander à tel personnage de s’habiller autrement. Mais je crois que j’y perdrai ce miracle instantané de l’inattendu qui coupe le souffle, de ce phénomène très physique de la photo qui soudain s’inscrit. » – Harry Gruyaert

« Pas d’idées sinon dans les choses », écrit le poète américain William Carlos Williams ; pas d’idée qui ne s’incarne en des choses fluctuantes, juxtaposées. « Le poète pense avec son poème. En cela réside sa pensée, et cela seulement est sa profondeur. »

Les photographies de Harry Gruyaert m’ont toujours semblé des images de choses, même quand elles représentent des êtres. Mais de choses évanescentes qui s’éloignent rapidement et perdent vite leur symétrie première comme les pensées. Ce sont des photographies du changement, pas du mouvement. Ce sont des images non d’instants privilégiés ou d’états intermédiaires, mais plutôt les traces acérées d’un changement imparable. Elles ne ressemblent pas vraiment à la vie, et pas davantage au rêve. Elles ressemblent aux pensées : totalement closes, et néanmoins déroutantes ; étrangement ambiguës, et pourtant ordinaires dans leurs juxtapositions extraordinaires. Jamais elles ne sont questions ni réponses. Jamais elles ne sont même information. Elles sont des fragments complexes du monde qui s’incrustent dans ma conscience, blocs en suspens, qui n’ont pas encore « pris », en pleine métamorphose, mais totalement là.

Cela est en partie dû à la couleur. Et en partie aussi à l’impression fugace d’une modification explosive à la lisière du cadre. Mais surtout, c’est l’étrange rapport des choses entre elles qui me touche ; le sentiment inconfortable de choses qui se bousculent, informant et déformant le monde. Dans ces photographies, les choses ont le poids et le mouvement des êtres, tandis que les êtres ont la permanence obtuse et le côté prévisible des choses. Mais par-dessus tout, ces photographies sont acides, acérées ; elles ont un arrière-goût de dissociation, de connexion légèrement hors de contrôle. Elles ont la force et la tension du sens inachevé. Elles sont marquées du sceau de l’irrésolution. Ce sont des photographies d’événements qui n’ont pas encore eu lieu, qui vont avoir lieu, qu’on ne peut empêcher d’avoir lieu.

Ces photographies ne montrent pas l’apparence ou l’essence d’autres existences. Au contraire, elles témoignent de notre incapacité à comprendre vraiment ces existences ; ce sont des images qui montrent un point de vue extérieur à ces existences – point de vue vaguement sinistre, un peu triste, presque drôle, troublé. Ce sont des photographies – comme les pensées – de ce que nous ne pouvons retenir. Ce sont des images du monde qui s’enracine dans les objets de tous les jours et qui se dérobe à notre approche. Ce sont des images de cette part du monde que seul l’art peut atteindre.

Richard Nonas

L’exposition réunit pour la première fois 80 tirages d’époque réalisés de 1974 à 1996 selon le procédé Cibachrome qui se distingue par la netteté de l’image, l’intensité des couleurs et la saturation des aplats. Ce procédé, inventé par Bela Gaspar, un chimiste hongrois en 1933 puis commercialisé à partir de 1963, permet d’obtenir un tirage à partir d’une diapositive (procédé dit positif-positif) par destruction des pigments incorporés aux couches sensibles du papier exposé puis développé. Ces tirages devenus rares ont été réunis exceptionnellement au BAL grâce aux prêts de plusieurs collectionneurs et de la Gallery FIFTY ONE à Anvers.