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🔊 “Rosa Bonheur (1822-1899)” au Musée d’Orsay, Paris, du 18 octobre 2022 au 15 janvier 2023

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“Rosa Bonheur (1822-1899)“ 

au Musée d’Orsay, Paris

du 18 octobre 2022 au 15 janvier 2023

Musée d’Orsay


Interview de Leïla Jarbouai, Conservatrice en chef au musée d’Orsay, et co-commissaire de l'exposition, par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 17 octobre 2022, durée 23’24. © FranceFineArt. 

PODCAST –  Interview de Leïla Jarbouai, Conservatrice en chef au musée d’Orsay, et co-commissaire de l’exposition,


par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 17 octobre 2022, durée 23’24.
© FranceFineArt. 

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Rosa Bonheur (1822-1899)
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©Anne-Fréderique Fer, présentation presse, le 17 octobre 2022.

Extrait du communiqué de presse :

 

Rosa Bonheur (1822-1899), Chevaux sauvages fuyant l’incendie, 1899. Huile sur toile, 126 x 221 cm. Barbizon, musée départemental des peintres de Barbizon, en dépôt à By-Thomery, château de Rosa Bonheur. Photo © Château de Rosa Bonheur.
Rosa Bonheur (1822-1899), Chevaux sauvages fuyant l’incendie, 1899. Huile sur toile, 126 x 221 cm. Barbizon, musée départemental des peintres de Barbizon, en dépôt à By-Thomery, château de Rosa Bonheur. Photo © Château de Rosa Bonheur.
Rosa Bonheur (1822-1899), Barbaro après la chasse, 1858 ca. Huile sur toile, 96,5 x 130,2 cm. Etats-Unis, Philadelphia Museum of Art, Philadelphia Museum of Art: Gift of John G. Johnson for the W. P. Wilstach Collection, 1900, W1900-1-2.
Rosa Bonheur (1822-1899), Barbaro après la chasse, 1858 ca. Huile sur toile, 96,5 x 130,2 cm. Etats-Unis, Philadelphia Museum of Art, Philadelphia Museum of Art: Gift of John G. Johnson for the W. P. Wilstach Collection, 1900, W1900-1-2.
Rosa Bonheur (1822-1899), Le Roi de la forêt, 1817. Huile sur toile, 244,4 x 175 cm. Collection particulière. Photo © Christie’s Images / Bridgeman Images.
Rosa Bonheur (1822-1899), Le Roi de la forêt, 1817. Huile sur toile, 244,4 x 175 cm. Collection particulière. Photo © Christie’s Images / Bridgeman Images.
Rosa Bonheur (1822-1899), Etude de tête et d’oeil de boeuf, n.d. Huile sur toile, 24 x 34 cm. Barbizon, musée départemental des peintres de Barbizon, en dépôt à By-Thomery, château de Rosa Bonheur, Château de Rosa Bonheur. Photo © musée d’Orsay /Alexis Brandt.
Rosa Bonheur (1822-1899), Etude de tête et d’oeil de boeuf, n.d. Huile sur toile, 24 x 34 cm. Barbizon, musée départemental des peintres de Barbizon, en dépôt à By-Thomery, château de Rosa Bonheur, Château de Rosa Bonheur. Photo © musée d’Orsay /Alexis Brandt.
Rosa Bonheur (1822-1899), Etude de cheval blanc de dos, n.d. Huile sur toile, 61,5 x 50 cm, Barbizon, musée départemental des peintres de Barbizon, en dépôt à By-Thomery, château de Rosa Bonheur. Château de Rosa Bonheur. Photo © musée d’Orsay /Alexis Brandt.
Rosa Bonheur (1822-1899), Etude de cheval blanc de dos, n.d. Huile sur toile, 61,5 x 50 cm, Barbizon, musée départemental des peintres de Barbizon, en dépôt à By-Thomery, château de Rosa Bonheur. Château de Rosa Bonheur. Photo © musée d’Orsay /Alexis Brandt.
Rosa Bonheur (1822-1899), Etude de fleurs et plantes, n.d., Huile sur papier, 31,5 x 36 cm. Barbizon, en dépôt à By-Thomery, château de Rosa Bonheur. Château de Rosa Bonheur. Photo Nadège Dauga.
Rosa Bonheur (1822-1899), Etude de fleurs et plantes, n.d., Huile sur papier, 31,5 x 36 cm. Barbizon, en dépôt à By-Thomery, château de Rosa Bonheur. Château de Rosa Bonheur. Photo Nadège Dauga.
Rosa Bonheur (1822-1899), Le sevrage des veaux, 1879. Huile sur toile, 65,1 x 81,3 cm. Etats-Unis, New York, Metropolitan Museum of Art. Catharine Lorillard Wolfe Collection, Bequest of Catharine Lorillard Wolfe, 1887. Photo Metropolitan Museum of Art, New York, domaine public.
Rosa Bonheur (1822-1899), Le sevrage des veaux, 1879. Huile sur toile, 65,1 x 81,3 cm. Etats-Unis, New York, Metropolitan Museum of Art. Catharine Lorillard Wolfe Collection, Bequest of Catharine Lorillard Wolfe, 1887. Photo Metropolitan Museum of Art, New York, domaine public.
Édouard-Louis Dubufe (1819-1883) et Rosa Bon-heur (1822-1899), Portrait de Rosa Bonheur, 1857. Huile sur toile, 130,5 x 97 cm. Dépôt au Musée du château de Versailles. © RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / photo Gérard Blot. Note : La tête du bovin est peinte par Rosa Bonheur.
Édouard-Louis Dubufe (1819-1883) et Rosa Bon-heur (1822-1899), Portrait de Rosa Bonheur, 1857. Huile sur toile, 130,5 x 97 cm. Dépôt au Musée du château de Versailles. © RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / photo Gérard Blot. Note : La tête du bovin est peinte par Rosa Bonheur.

Commissariat :

Leïla Jarbouai, Conservatrice en chef au musée d’Orsay

Sandra Buratti-Hasan, Directrice-adjointe au musée des Beaux-Arts de Bordeaux, conservatrice des collections XIX-XXe s.

Sophie Barthélémy, Directrice, conservatrice en chef du musée des Beaux-Arts de Bordeaux

Avec la collaboration de Katherine Brault, Présidente du Château de Rosa Bonheur, assistée de Michel Pons.





À l’occasion du bicentenaire de la naissance de Rosa Bonheur à Bordeaux, le musée d’Orsay, Paris et le musée des Beaux-Arts de sa ville natale organisent une importante rétrospective de son oeuvre. Le Château de Rosa Bonheur à Thomery (Seine-et-Marne), où l’artiste vécut près d’un demi-siècle, ainsi que le Musée départemental des peintres de Barbizon sont les partenaires exceptionnels de l’exposition. Le bicentenaire de la naissance de Rosa Bonheur est inscrit au calendrier des commémorations de France Mémoire 2022.


Événement majeur sur le plan national et international, cette exposition met à l’honneur une artiste hors norme, novatrice et inspirante, Rosa Bonheur. Cette artiste connue comme icône de l’émancipation des femmes plaça le monde vivant au coeur de son travail et de son existence. Elle s’engagea pour la reconnaissance des animaux dans leur singularité et chercha par son travail à exprimer leur vitalité et leur « âme ». Par sa grande maîtrise technique, elle sut restituer à la fois l’anatomie et la psychologie animales.


Cette exposition permet de faire (re)découvrir au public la puissance et la richesse de son oeuvre, en rassemblant et choisissant dans l’immense corpus de l’artiste une sélection exigeante d’environ 200 oeuvres (peintures, arts graphiques, sculptures, photographies) issues des plus prestigieuses collections publiques et privées d’Europe et des États-Unis.



La richesse du monde vivant

Issue d’une famille d’artistes, Rosa Bonheur réalisa une oeuvre abondante, fruit de sa cohabitation quotidienne avec les animaux, dans ses ateliers successifs et sur le terrain. Au cours de ses voyages, en Auvergne, dans le Nivernais, dans les Pyrénées, ainsi qu’en Écosse, elle montre une curiosité insatiable pour la diversité des espèces et leur biotope. Elle est également fascinée par la beauté sauvage des grands espaces de l’Ouest américain, et de ses habitants, animaux et humains, même si elle ne put jamais s’y rendre. L’artiste prit un grand plaisir à représenter Buffalo Bill et les acteurs Sioux Lakotas du Wild West Show en 1889.


Le regard qu’elle porte sur le monde qui l’entoure témoigne d’une vision exceptionnelle de la flore comme de la faune. Fascinée par les animaux, Rosa Bonheur avait rassemblé autour d’elle, dans sa propriété de By, une formidable ménagerie, comptant des dizaines d’espèces différentes, où se côtoyaient notamment chiens, fauves et un cerf. Plaçant les animaux au coeur de sa création artistique au sein de spectaculaires compositions ou en les isolant dans de véritables portraits, Rosa Bonheur sut créer une oeuvre expressive, dénuée de sentimentalisme et d’un extraordinaire réalisme, nourrie des découvertes scientifiques et de l’attention nouvelle portée aux espèces animales des terroirs et à la zootechnie. L’exposition joue sur les ruptures d’échelles, l’artiste ayant peint de très petits formats ou au contraire des oeuvres monumentales, le plus souvent panoramiques et dynamiques, tout autant que des portraits en pied d’animaux. C’est ainsi que Rosa Bonheur dépeint la majesté du cerf du Roi de la forêt (Collection particulière, Etats-Unis), des boeufs travailleurs de la terre dans le célèbre Labourage Nivernais (musée d’Orsay) ou encore la beauté et l’énergie de chevaux sauvages dans son dernier tableau resté inachevé, Chevaux en liberté dit aussi Chevaux sauvages fuyant l’incendie (Barbizon, musée département des peintres de Barbizon, en dépôt à By-Thomery, château de Rosa Bonheur). L’artiste y exalte leur force tellurique.



Une artiste hors du commun

Célébrée dès son vivant des deux côtés de l’Atlantique, cette personnalité fascinante, dont l’exposition se propose de dévoiler des aspects peu explorés, voire méconnus, sut s’imposer aussi bien en tant que femme libre que comme artiste officiellement reconnue dans un siècle très corseté. Première femme artiste à recevoir la Légion d’honneur, Rosa Bonheur a su s’associer aux marchands et collectionneurs les plus éminents pour dominer le marché de l’art et conquérir son indépendance financière et morale. Véritable « star » en son temps, elle organisa sa vie autour de son travail et de la quête incessante de perfectionnement, accompagnée en particulier de sa compagne Nathalie Micas, qui vécut à ses côtés plus de cinquante ans et participa à sa création. La conservation de son atelier et de ses archives est le résultat de l’engagement de sa « soeur de pinceau », la peintre américaine Anna Klumpke, qui vécut au château de By durant les dernières années de la vie de l’artiste.


Rosa Bonheur fut rapidement perçue comme un modèle à suivre dans la quête d’indépendance des femmes, et des artistes plus particulièrement. Articles et revues, françaises, mais surtout anglaises ou états-uniennes, témoignent de cette force inspiratrice pour les générations futures. La diffusion de l’image de l’artiste fut telle, qu’en plus de nombreux portraits peints, photographiés, ou gravés, l’oeuvre de Rosa Bonheur tout comme son portrait, devinrent le sujet de ce que l’on appellerait aujourd’hui des « produits dérivés ».


C’est par son travail que Rosa Bonheur parvint avant tout à s’imposer comme l’artiste aux oeuvres les plus chères de son temps. L’une des originalités de l’exposition consiste à présenter une importante sélection d’études et d’esquisses peintes et dessinées, permettant d’apprécier la part du travail, qui passe par le dessin, dans le processus créatif de l’artiste, virtuose et exigeante. Parmi les récentes découvertes, un dessin sur toile de plus de 4,50m de long provenant du château de Rosa Bonheur à By Thomery sera montré au public pour la première fois.



Une oeuvre qui résonne encore aujourd’hui

200 ans après sa naissance, l’art et la personnalité de Rosa Bonheur font résonner de nombreuses questions sociétales plus que jamais d’actualité : la place des femmes dans l’art et la société, la cause animale et sa place dans la ruralité et l’écologie. Dépassant de loin les clichés qu’elle a contribué à construire, Rosa Bonheur s’avère avant tout une grande créatrice, qui mérite d’être (re)découverte comme telle.


L’exposition est accompagnée d’un catalogue, en coédition musée d’Orsay-Flammarion, sous la direction de Sandra Buratti-Hasan et Leïla Jarbouai, qui est la première publication scientifique depuis le catalogue de 1997 visant à donner une vision d’ensemble des multiples aspects de l’oeuvre de Rosa Bonheur.




Et aussi
À noter, deux expositions au Château de Rosa Bonheur à Thomery By, Le musée des oeuvres perdues (1er mars – 1er septembre 2022) et Rosa Bonheur intime (2 septembre – 31 décembre 2022).  https://www.chateau-rosa-bonheur.fr/

Rosa Bonheur (1822-1899), Deux lapins, 1840, Huile sur toile, 54 x 65 cm. Bordeaux, musée des Beaux-Arts, Legs de François Auguste Hippolyte Peyrol, 1930. © Mairie de Bordeaux, musée des Beaux-Arts, photo F.Deval.
Rosa Bonheur (1822-1899), Deux lapins, 1840, Huile sur toile, 54 x 65 cm. Bordeaux, musée des Beaux-Arts, Legs de François Auguste Hippolyte Peyrol, 1930. © Mairie de Bordeaux, musée des Beaux-Arts, photo F.Deval.
Rosa Bonheur (1822-1899), Chat sauvage, 1850. Huile sur toile, 46 x 56 cm, Suède, Stockholm, Nationalmuseum. Don d’Arvid Kellgren, 1932. Photo : © Erik Cornelius, Nationalmuseum Stockholm, domaine public.
Rosa Bonheur (1822-1899), Chat sauvage, 1850. Huile sur toile, 46 x 56 cm, Suède, Stockholm, Nationalmuseum. Don d’Arvid Kellgren, 1932. Photo : © Erik Cornelius, Nationalmuseum Stockholm, domaine public.

Biographie de l’artiste

 



par Sandra Buratti-Hasan, Conservatrice du patrimoine et Directrice adjointe du musée des Beaux-Arts de Bordeaux

« Je ne me plaisais qu’au milieu de ces bêtes, je les étudiais avec passion dans leurs moeurs. Une chose que j’observais avec un intérêt spécial, c’était l’expression de leur regard : l’oeil n’est-il pas le miroir de l’âme pour toutes les créatures vivantes ? n’est-ce pas là que se peignent les volontés, les sensations des êtres auxquels la nature n’a pas donné d’autre moyen d’exprimer leur pensée ? » Rosa Bonheur

Aujourd’hui peu connue du grand public, Rosa Bonheur fut pourtant l’une des artistes les plus célèbres en son temps. Née à Bordeaux en 1822, elle reçoit l’enseignement de son père, peintre de paysages, et suit un apprentissage avec ses frères et soeur, apprentissage fondé sur le dessin et la pratique de la copie. Lorsque sa famille emménage à Paris, elle arpente inlassablement les salles du Louvre pour étudier les maîtres anciens. Elle pratique le modelage pour perfectionner son dessin et devient également sculptrice. Rosa Bonheur est fascinée par le monde animal.

Très tôt, elle s’entoure de chevaux, de moutons, d’oiseaux, qu’elle chérit et qu’elle prend pour modèles. Elle décide de vouer sa vie à leur représentation. Lectrice des traités de sciences naturelles, elle porte une attention infinie à leur anatomie. Son père, fervent adepte des doctrines de Saint-Simon, la soutient dans sa volonté et l’incite à « dépasser Madame Vigée-Lebrun ». Mais Rosa Bonheur doit surtout compter sur ses propres ressources, alors que son père s’est investi corps et âme au couvent de Ménilmontant et que sa mère peine à subvenir aux besoins de la famille. Rosa Bonheur n’a que 11 ans lorsque sa mère meurt d’épuisement. Sa disparition marqua profondément l’artiste et l’incita à ne dépendre que d’elle-même, aussi bien financièrement que moralement.

En 1841, à l’âge de 19 ans, Rosa Bonheur fait son entrée au Salon avec deux toiles, dont Deux Lapins (Musée des Beaux-Arts de Bordeaux). On perçoit déjà la minutie quasi photographique apportée à la représentation de ces animaux qui caractérise l’art de Rosa Bonheur et où transparaît la technique des animaliers nordiques du XVIIe siècle. En 1845, elle reçoit une médaille de troisième classe, pour une scène de Labourage. Trois ans plus tard, c’est une médaille de première classe pour Taureaux et boeufs (race du Cantal) (non localisé). La critique est unanime et Rosa Bonheur supplante la précédente génération des peintres animaliers.

La toute récente Seconde République lui commande alors un sujet puisé dans la vie rurale : ce sera le Labourage nivernais, le sombrage (Paris, musée d’Orsay), oeuvre acclamée au Salon de 1849. Dès lors, Rosa Bonheur devient l’une des figures majeures de la scène artistique contemporaine.

Rosa Bonheur a de grandes ambitions. Elle souhaite donner à la peinture animalière le même statut que la peinture d’histoire, le grand genre par excellence. Pour cela, elle n’hésite pas à choisir des formats monumentaux et à dépasser les limites que la société impose aux femmes. L’artiste souhaite frapper les esprits et représenter la puissance des chevaux dans une scène contemporaine. Elle obtient de la préfecture un permis de travestissement qui l’autorise à porter le pantalon pour étudier les bêtes au plus près, notamment dans les abattoirs. En 1853, elle présente au Salon Le Marché aux chevaux de Paris, qui est perçu comme une frise du Parthénon contemporaine. Le tableau obtient un succès considérable. Il est acheté par le marchand d’origine belge Ernest Gambart et est envoyé en tournée triomphale au Royaume-Uni, où la reine Victoria elle-même demande à voir le tableau. Rosa Bonheur assure la promotion de son oeuvre outre-Manche où elle se rend notamment en 1855 et en 1856. Elle est acclamée partout où elle se rend. Les commandes affluent, des Etats-Unis également, et les oeuvres circulent, par le biais de leur reproduction gravée. Le Marché aux chevaux passe entre plusieurs mains avant d’être offert par le millionnaire Cornelius Vanderbilt II au Metropolitan Museum à New York. Grâce à son succès financier, Rosa Bonheur fait l’acquisition du château de By à Thomery, le « Domaine de la parfaite amitié », en lisière de la forêt de Fontainebleau. Elle s’y installe avec Nathalie Micas, son amie depuis l’adolescence, et la mère de celle-ci. Forte de son indépendance financière et morale, Rosa Bonheur instaure ici un véritable matrimoine, où les femmes s’allient pour asseoir leur liberté. Pour sa réussite, son courage et son audace, Rosa Bonheur est rapidement perçue comme un modèle et une icône du féminisme. En 1865, elle est la première femme artiste à recevoir la Légion d’honneur, remise à son atelier par l’impératrice Eugénie.

By devient le refuge de Rosa Bonheur. Elle peut échapper aux mondanités auxquelles son succès la contraint à Paris, même si elle continue d’accueillir de nombreux amis, écrivains et musiciens. Elle dispose de la place nécessaire pour choyer ses modèles, qui deviennent de plus en plus nombreux et divers : « à certains moments, c’est une véritable arche de Noé que j’ai eue là. On y a vu des mouflons, des cerfs, des biches, des isards, des sangliers, des moutons, des chevaux, des boeufs et même des lions. » Rosa Bonheur travaille inlassablement, avec l’aide de sa compagne Nathalie Micas qui prépare les toiles, reporte les calques. Elle produit de nombreuses études sur le motif qui constituent un répertoire d’une richesse inouïe dans lequel elle puise jusqu’à la fin de sa vie. Elle utilise également la photographie, dessine et peint à l’aquarelle sur certains tirages. Elle n’hésite pas à explorer des techniques auxquelles on ne l’associe guère, tel que le cyanotype, comme on en a découvert récemment dans les greniers du château.

En 1889, Nathalie Micas s’éteint, laissant Rosa Bonheur désespérée et incapable de peindre. Après plusieurs mois de torpeur, elle trouve néanmoins un nouvel élan dans la fougue du Wild West Show qui attire les foules à Paris. Elle fait la connaissance de Buffalo Bill, dont elle réalise le portrait et qui l’autorise à séjourner au camp. Elle peut y croquer les bisons et les acteurs autochtones qui la fascinent.

En 1889, Nathalie Micas s’éteint, laissant Rosa Bonheur désespérée et incapable de peindre. Après plusieurs mois de torpeur, elle trouve néanmoins un nouvel élan dans la fougue du Wild West Show qui attire les foules à Paris. Elle fait la connaissance de Buffalo Bill, dont elle réalise le portrait et qui l’autorise à séjourner au camp. Elle peut y croquer les bisons et les acteurs autochtones qui la fascinent.

Rosa Bonheur passe la dernière année de sa vie avec une portraitiste américaine, Anna Klumpke, qui s’installe à ses côtés à By. Rosa Bonheur apprécie son éducation féministe et s’adresse à elle en ces termes : « … j’admire les idées américaines en ce qui concerne l’éducation des femmes. Car vous n’avez pas, comme chez nous, le sot préjugé que les jeunes filles sont exclusivement destinées au mariage. » Rosa Bonheur propose à Anna Klumpke de recueillir ses souvenirs et d’écrire sa biographie selon ses directives. À la mort de l’animalière en 1899, Anna Klumpke devient sa légataire universelle et hérite du château et de toutes les oeuvres qui y étaient conservées, au grand dam de la famille de l’artiste. Elle organise la vente de l’atelier en 1900 à la Galerie Georges Petit et fait don d’oeuvres importantes aux musées nationaux. Elle perpétue la mémoire de Rosa Bonheur et contribue à ce que le château de By, que l’on peut de nouveau visiter aujourd’hui, reste le « sanctuaire » que chérissait Rosa Bonheur.

Revoir l’oeuvre de Rosa Bonheur nous invite à changer de perspectives, à mieux regarder le vivant dans sa singularité. L’engagement artistique de Rosa Bonheur, son indépendance et sa liberté d’être au monde constituent aujourd’hui encore de précieux compagnons de route.

« Je n’ai jamais voulu aliéner ma liberté afin de mieux m’acquitter de la mission sainte que je m’étais donnée. J’ai toujours voulu relever la femme. » Rosa Bonheur