âShirley Jaffe, une AmĂ©ricaine Ă ParisâÂ
Rétrospective
au Centre Pompidou, Paris
du 20 avril au 29 août 2022

PODCAST – Interview de FrĂ©dĂ©ric Paul, conservateur, collections contemporaines, MusĂ©e national dâart moderne et commissaire de l’exposition,
par Anne-FrĂ©dĂ©rique Fer, Ă Paris, le 19 avril 2022, durĂ©e 26â30.
© FranceFineArt.
Extrait du communiqué de presse :



Commissariat :
FrĂ©dĂ©ric Paul, conservateur, collections contemporaines, MusĂ©e national dâart moderne
Peintre amĂ©ricaine installĂ©e Ă Paris depuis les annĂ©es 1950, Shirley Jaffe (1923 – 2016) est une rĂ©fĂ©rence de la peinture abstraite du tournant des 20e et 21e siĂšcles. Non sans provocation, elle affirmait avoir dĂ©couvert Pierre Bonnard Ă New York puis Jackson Pollock et Andy Warhol Ă Paris.
Cette exposition constitue sa premiĂšre rĂ©trospective. Suivant un dĂ©roulement chronologique, lâaccrochage prĂ©sente ses dĂ©buts expressionnistes abstraits, suivis des deux ruptures radicales conduisant Ă lâabandon de la gestualitĂ© Ă la fin des annĂ©es 1960 et aux grandes toiles caractĂ©ristiques de la maturitĂ© par leur formes libres et unies et la prĂ©sence dâun blanc incisif. Il souligne aussi la voie parallĂšle suivie avec ses « gouaches » sur papier, dâexĂ©cution rapide, contrairement aux tableaux, trĂ©pidants comme la vie urbaine, mais toujours longs Ă aboutir. Shirley Jaffe tenait pour elle-mĂȘme un « journal » de ses tableaux en cours. En regard des oeuvres, on dĂ©couvrira ces prĂ©cieuses notes dâatelier et des archives inĂ©dites conservĂ©es Ă la bibliothĂšque Kandinsky.
AprĂšs son dĂ©cĂšs en 2016, un ensemble de douze toiles, versĂ© par dation Ă lâĂtat français, a Ă©tĂ© reçu par le MusĂ©e national dâart moderne en 2019.
Lâexposition est prĂ©sentĂ©e au Kunstmuseum de BĂąle (25 mars – 30 juillet 2023) et au musĂ©e Matisse Ă Nice (11 octobre 2023 – 8 janvier 2024) dans des parcours adaptĂ©s Ă chaque lieu.
#ExpoShirleyJaffe
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NĂ©e en 1923 dans le New Jersey, Shirley Jaffe Ă©tudie Ă Cooper Union, Ă New York, quâelle quitte pour Paris, oĂč elle se fixe en 1949. Proche de Jules Olitski, Al Held, Jean-Paul Riopelle, Sam Francis, elle est rapidement reconnue comme une peintre majeure de la nouvelle abstraction. Elle fait partie de la communautĂ© dâartistes amĂ©ricains installĂ©s en France aprĂšs-guerre. Elle sous-loue lâatelier de Louise Bourgeois dans la mĂȘme rue que Joan Mitchell avec qui elle entretient une dynamique Ă©mulation, notamment Ă la galerie Fournier qui les reprĂ©sente longtemps.
Le Centre culturel amĂ©ricain de Paris lâexpose en trio avec Sam Francis et Kimber Smith en 1958. Puis câest en Suisse Ă Berne et Ă BĂąle quâelle fait ses premiĂšres expositions personnelles en galerie. BĂąle oĂč elle trouvera en la personne dâArnold RĂŒdlinger, directeur de la Kunsthalle, un soutien zĂ©lĂ© et communicatif. Dans les annĂ©es 1960, elle tourne le dos Ă des dĂ©buts prometteurs dans lâesprit de lâExpressionnisme abstrait. Dâabord en 1963-64, grĂące Ă une bourse de la Fondation Ford qui lâĂ©loigne Ă Berlin, puis en 1969 lors de sa deuxiĂšme exposition personnelle chez Jean Fournier, oĂč elle surprend en Ă©vacuant toute gestualitĂ©.
Ă partir des annĂ©es 1970, se dĂ©veloppe son Ă©criture personnelle aux contours ciselĂ©s qui, sans permettre de lâassimiler Ă la vague Hard Edge alors dĂ©clinante, la tient Ă Ă©gale et respectueuse distance de ses anciens pairs expressionnistes amĂ©ricains et des tenants europĂ©ens de lâart concret comme Gottfried Honegger, qui lâadmire. Sa gĂ©omĂ©trie est bien ordonnĂ©e, mais savamment contrariĂ©e, toujours dĂ©voyĂ©e, alĂ©atoire en apparence, mais scrupuleusement dictĂ©e par une exigence implacable. Jaffe rĂ©pugnait Ă voir des paysages naturels dans ses tableaux prĂ©cĂ©dents, les oeuvres sont dĂ©sormais dâinspiration urbaine, damiers et stĂšles dâabord, puis solides blocs mĂ©thodiquement disjoints, isolĂ©s par un ciment blanc de plus en plus insinuant. Depuis quâelle dĂ©couvre le chantier de dĂ©molition de lâancienne gare Montparnasse en 1967, lâidĂ©e de chaos est une mĂ©taphore et un moteur jubilatoire pour cette artiste patiente et organisĂ©e.
En 1969, elle sâinstalle dans le 5e arrondissement, rue Saint-Victor â atelier quâelle ne quittera plus, et oĂč elle peindra jusquâĂ la derniĂšre minute. De nombreux artistes, jeunes ou moins, inconnus ou cĂ©lĂšbres, viennent lui rendre visite dans cet atelier : Polly Apfelbaum, Beatriz Milhazes, Sarah Morris, Bernard Piffaretti, Charline von Heyl, Amy Sillman⊠Elle en retrouvera certains en rejoignant la Galerie Nathalie Obadia Ă la fin des annĂ©es 1990.
PersonnalitĂ© secrĂšte, bien quâhospitaliĂšre, curieuse des autres, mais discrĂšte Ă lâextrĂȘme sur sa vie personnelle, elle ne manifestera jamais publiquement ses convictions fĂ©ministes, malgrĂ© lâamitiĂ© qui la lia plusieurs dĂ©cennies Ă lâhistorienne engagĂ©e Linda Nochlin.
Les publications
Lâexposition est accompagnĂ©e dâun catalogue publiĂ© par Bernard Chauveau Ă©dition en coĂ©dition avec le Centre Pompidou, rĂ©unissant des textes de Svetlana Alpers, Claudine Grammont et FrĂ©dĂ©ric Paul ainsi quâune interview inĂ©dite par Robert Kushner.
AprĂšs les trois volumes respectivement consacrĂ©s Ă Martin BarrĂ©, Simon HantaĂŻ et James Bishop, lâĂ©diteur ER Publishing fera paraĂźtre un Transatlantique – Shirley Jaffe rassemblant, selon la formule de la collection, essais et tĂ©moignages.