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“Fu Site” Jeux de créatures, à la galerie PARIS-B, Paris, du 8 janvier au 19 février 2022

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“Fu Site” Jeux de créatures

à la galerie PARIS-B, Paris

du 8 janvier au 19 février 2022

galerie PARIS-B


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© Sylvain Silleran, présentation presse, le 8 janvier 2022.


Fu Site, Two Figures, 2021. Acrylique sur toile, 97x130cm. © Fu Site, courtesy PARIS-B.
Fu Site, Two Figures, 2021. Acrylique sur toile, 97x130cm. © Fu Site, courtesy PARIS-B.
Fu Site, Storm is coming, 2021. Acrylique sur toile, 90 x 116 cm.  © Fu Site, courtesy PARIS-B.
Fu Site, Storm is coming, 2021. Acrylique sur toile, 90 x 116 cm. © Fu Site, courtesy PARIS-B.

Fu Site, Fairy Tale, 2021. Acrylique sur toile, 146 x 114 cm. © Fu Site, courtesy PARIS-B.
Fu Site, Fairy Tale, 2021. Acrylique sur toile, 146 x 114 cm. © Fu Site, courtesy PARIS-B.
Fu Site, Dialogue, 2021. Acrylique sur toile, 90 x 116 cm. © Fu Site, courtesy PARIS-B.
Fu Site, Dialogue, 2021. Acrylique sur toile, 90 x 116 cm. © Fu Site, courtesy PARIS-B.
Fu Site, Ceremony, 2020, Acrylique sur toile, 97 x 130 cm. © Fu Site, courtesy PARIS-B.
Fu Site, Ceremony, 2020, Acrylique sur toile, 97 x 130 cm. © Fu Site, courtesy PARIS-B.
Fu Site, Woman in black, 2021. Acrylique sur toile, 116 x 90 cm. © Fu Site, courtesy PARIS-B.
Fu Site, Woman in black, 2021. Acrylique sur toile, 116 x 90 cm. © Fu Site, courtesy PARIS-B.
Fu Site, Emperor, 2021. Acrylique sur toile, 100 x 80 cm cm.  ©Fu Site, courtesy PARIS-B
Fu Site, Emperor, 2021. Acrylique sur toile, 100 x 80 cm cm. ©Fu Site, courtesy PARIS-B

Texte de Sylvain Silleran



Dans l’espace rosé, gris, flottent des coquilles d’œuf, des pelures de citron qui se déroulent, se déploient. Des drapés oniriques lents et paresseux sont les couches successives d’un monde qui se défait et se refait. Il y a chez Fu Site du surréalisme bien de chez nous qui rencontre les mythologies d’Asie, les dieux et démons animaux. Des corps sans tête démesurément alanguis, un plat d’huîtres et de coques, le climat est à la pluie mais il y a une part de tarte colorée dans un coin discret. Il y a tant de chose apparente ou cachées, tant de choses qui ne sont pas là non plus… Le visible et l’invisible partagent la même palette, sont tracés de la même brosse.



Des chiens, un cheval au galop, un cygne prend son envol, un singe avec un masque croisent un homme avec une cravate. Il est là, mais il a presque disparu, il s’efface. Les animaux sont des silhouettes, une histoire de théâtre d’ombres, des marionnettes devant une tenture. La transparence n’est pourtant pas un jeu, elle est un état, une suspension de l’expérience dans un intermédiaire délicieux où tout est possible, la douceur comme la sauvagerie. L’animal sait attendre sagement ou bien bondir et dévorer en meute. Parfois une forme est découpée sur la toile, il y apparait autre chose, une révélation incongrue au milieu de la scène. Un autre monde qui apparait dans une déchirure du réel.



Fu Site plonge dans nos racines classiques, il y pêche des bruns rembrandtiens qui tracent des boucles souples et sensuelles, des ailes d’archange Gabriel. Une silhouette esquissée d’un trait vif et nerveux comme du fusain, une vague de griffures sèches menacent le délicat équilibre et puis une douceur de crème vient apaiser ce rêve. Des poissons rouges s’échappent d’une nature morte d’une ondulation dansante des nageoires. Un chien se hâte de rejoindre son maître, une Victoire de Samothrace dont les ailes sont des cristaux noirs. Ailleurs des plumes blanches tissent une peau. Des viscosités d’insecte glissent sur du plâtre sec et poudreux.



La peinture est lisse et soyeuse, puis devient épaisse, drue, orageuse. Fu Site a digéré Dali, Matisse, Picasso, Bacon, il mélange tout comme un virtuose, et ça virevolte, c’est musical, aérien. Un sol, un horizon sont posés comme une scène, alors peut commencer le ballet, une chorégraphie des passions. La chair raide, un peu grise et triste de chez Pina Bausch se liquéfie en une matière fluide et abstraite. Sa forme est saisie par le pinceau mais s’échappe déjà. Un corps-façade fragile, un château de sable château de cartes caressé par le vent.



Un verre d’eau tombe. Le temps de la chute, l’eau soudain libre s’échappe et quelque chose s’incarne dans sa forme, juste un instant avant que le contact brutal avec le sol ne fasse tout exploser. La peinture de Fu Site raconte cet espace fugitif. Elle suit le lièvre jusqu’au fond de son terrier. Le temps s’inverse, les morceaux éparpillés façon puzzle s’élèvent, se rapprochent. Le monde va bientôt être remis en ordre, c’est promis.




Sylvain Silleran


Extrait du communiqué de presse :


PARIS-B annonce sa première exposition de l’année, qui dévoile les nouveaux travaux du peintre Fu Site — une série de toiles vibrantes aux accents oniriques. Ici, composants naturels, corps, créatures et formes fictives se rencontrent sur la toile ; entre coexistence et anarchie, l’artiste nous invite à déceler, au coeur de l’image et au-delà de son chaos apparent, des connexions entre chaque élément. Peintre virtuose plusieurs fois récompensé, il obtient le premier prix Canson en 2013, et expose son travail, entre autres, à Shanghaï, Los Angeles, Paris et Bruxelles.




Extrait du texte de Chris Cyrille, De l’autre côté du miroir

« J’ai vu plusieurs miroirs dans les peintures de Fu Site, comme dans cette toile Mirror Variation (2016)…

Lorsque nous suivons, comme ça, le déroulage de ses peintures depuis plusieurs années, on sent que la narration (disons théâtrale) s’est de plus en plus éloignée pour laisser place, petit à petit, à un rapport de matières (de textures) que nous aurions du mal à démêler.

« La narration est le corrélat de l’illustration. Entre deux figures, toujours une histoire se glisse ou tend à se glisser, pour animer l’ensemble illustré » — Gilles Deleuze sur Francis Bacon.

Peut-être, que les miroirs du début avaient pour fonction de narrer tout un récit autour des fastes du pouvoir en Occident, de sa représentation qui est, entres autres choses, une longue histoire de sang qui gicle, rouge et violacé. Et puis la scène, disparue, la matière a crié son abolition — au cours de batailles décisives, forçant les décrets — et le tout a fui les navires de la loi de causalité. Comme Alice, l’image est passée de l’autre côté du miroir pour vivre dans un espace-temps où cette grande pièce de théâtre, mal jouée, qu’on nous dit être le « réel » est renversée.

« Le pan de mur est en face, pour conjurer le cercle de ton rêve. Mais l’image pousse son cri. » — Saint-John Perse.

Comment l’image arrive, face aux murs qu’est notre propre perception, à pousser son cri ? À n’en avoir rien à foutre des berceuses de l’art qui frôlent à peine le travail d’art et feignent une lecture ? Comment arrive-t-elle, hein, à arracher nos yeux et à toucher l’horizon du bout des doigts ? Je pense à la toile Two Figures (2021) de Fu Site où, entre virtuel et actuel, les matières ne sont pas encore des corps ni des figures distinctes, elles ne sont ni fichées ni déterminées.

Elles peuvent donc crier leur relative indépendance maintenant libérées du pro-gramme photoshop, là d’où elles viennent. Elles sont, elles aussi, passées de l’autre côté du miroir, dans un autre plan où elles chercheraient à se libérer, non seulement du grammatique (ce qui serait relatif à une sorte de grammaire de l’image qui nous dirait comment la lire), mais aussi du bruit bleu des images-écrans qui habituent notre rétine et nous aveuglent littéralement — je fantasme probablement, mais ce n’est pas bien grave…

C’est peut-être que là qu’une politique se joue pour un peintre comme Fu Site, celle où il travaille à empêcher tout discours d’accoster. (…) »



À propos de l’artiste

Assemblage complexe d’ombres et reflets, présences humaines, images d’intérieurs et paysages naturels, le langage pictural de Fu Site emprunte les codes de l’univers onirique pour donner vie à des scènes qui ouvrent le champ de l’interprétation. Par de subtiles incrustations d’images fragmentées et la superposition des plans narratifs Fu Site sait provoquer une ambiguïté dans la perception du temps, privant la scène de toute cohérence logique. Ses énigmatiques antihéros semblent se réfléchir sur les surfaces troubles comme des souvenirs ou des apparitions: ils habitent l’espace sans jamais vraiment y appartenir.

Fu Site est né dans le Liaoning (Chine) en 1984. Il est diplômé de l’Université Tsinghua/Beijing (2006), de l’École des Beaux-Arts de Versailles (2011) et de l’École Supérieure d’Art du Nord Pas de Calais (2014). Il a remporté de nombreux prix et récompenses, dont le premier prix Canson (2013).