“Napoléon” à la Grande Halle de La Villette, Paris, du 28 mai au 19 décembre 2021
“Napoléon”
à la Grande Halle de La Villette, Paris
du 28 mai au 19 décembre 2021
© Sylvain Silleran, visite presse, le 26 mai 2021.





Texte de Sylvain Silleran
Napoléon en grandes lettres jaunes, une typo d’affiche de blockbuster sous laquelle on entre comme dans un cinéma. D’ailleurs pour commencer on va nous projeter un petit film. Quelques secondes d’une chanson de Phoenix, Napoleon Says : « je serais ton Bonaparte. Je me fiche de ce que Napoléon dit », puis un court montage nous explique la révolution française et le contexte chaotique de guerre civile dans lequel grandit notre héros.
Napoléon le voilà ! Façon biopic, voici son bureau de l’école de Brienne : y a-t-il gravé ses initiales à la pointe d’un canif ? Non, mais il y a un missel dans lequel il a écrit son nom. Suivons ses premiers succès militaires, la campagne d’Egypte, illustrée d’un dromadaire grandeur nature, de sabres, d’un moulage de la pierre de Rosette. Ici l’habit de Premier consul, son portefeuille, là le fameux tableau de Jacques-Louis David : Bonaparte, Premier consul, franchissant le Grand-Saint-Bernard, le 20 mai 1800. Cette allégorie saisissante nous la connaissons tous, nous avons grandi avec, elle a été reproduite dans tous nos manuels d’histoire. Comme il est impressionnant de se trouver devant cette toile majestueuse, le chef de guerre calme et déterminé, héroïque sur son cheval blanc qui se cabre, la crinière flottant comme un étendard dans le vent terrible de l’histoire.
Un tapis rouge nous emmène vers la salle du trône, c’est le vrai, celui conservé au sénat (on ne peut malheureusement pas s’y asseoir pour faire un selfie avec Joséphine), une bande-son de circonstance joue vivat in aeternum, une recréation de la messe du sacre. Les deux portraits du couple impérial par François Gérard, l’épée du sacre incrustée de diamants ajoutent à la solennité. Tout n’est que luxe et volupté : la vaisselle divinement peinte, le mobilier, le manteau de cour de l’impératrice en soie blanche et velours pourpre. Entre deux statues, un carrosse magnifique, un Napoléon au pont d’Arcole, Lou Doillon coiffée d’une casquette lit quelques extraits des lettres d’amour à Joséphine.
Un canon, la tente de campagne, une carte d’état-major piquée d’épingles témoignent du génie militaire. Dans une vitrine le célèbre costume : la redingote militaire et l’iconique bicorne portés pendant la campagne de Russie ressemblent au costume de scène d’une défunte rock star. Pendant ce temps sur un écran géant les cuirassiers chargent à Eylau dans un tonnerre impressionnant. Les batailles font l’objet de tableaux allégoriques ; ils sont complétés pas des vidéos qui montrent, cartes à l’appui, leur déroulement et les stratégies mises en œuvre. La réalité nous rattrape soudain sous la forme d’un trou de boulet dans une cuirasse, un trou béant et glaçant.
Les reliques historiques se suivent, suscitant des émotions diverses : le brevet de lieutenant décerné par Louis XVI, l’édition originale du code civil de 1804, jusqu’à la plume avec laquelle Napoléon signera son abdication. Ici et là, de brefs extraits d’interviews nous éclairent sur les dessous de la société sous l’empire, les rouages de l’exercice de l’état, la dure vie d’un grognard. Des maréchaux il reste les costumes, œuvres d’art dans des vitrines. Le faste de l’empire est un peu nostalgique, on en feuillette les pages glacées et glamour, sans vraiment rencontrer l’homme pourtant si fascinant. C’est divertissant, mais pas trop, un peu instructif pour les plus patients, parfait pour un dimanche en famille. Au-delà des dorures la leçon reste scolaire mais avec plein d’encarts colorés et des jolies illustrations.
A la fin nous attend un Napoléon malade, la main crispée sur une carte de l’Europe. La statue monumentale comme il se doit pour un empereur est celle d’un vieil homme assis, soutenu par un épais coussin en guise de trône. Derrière lui, un horizon aux couleurs changeantes, un crépuscule illustre ses derniers moments à Sainte-Hélène. Une vie si grande et spectaculaire se suffit-elle comme spectacle ? L’ascension, la grandeur, la gloire et puis la chute : quelle merveilleuse histoire pourtant.
Sylvain Silleran


Extrait du communiqué de presse :
commissariat :
Bernard Chevallier, conservateur général honoraire du Patrimoine ;
Arthur Chevallier, écrivain et éditeur ;
Frédéric Lacaille, conservateur général en charge des peintures du XIXe siècle des châteaux de Versailles et de Trianon ;
Grégory Spourdos, adjoint au chef du département des expositions et de la muséographie et chef du pôle muséographie du musée de l’Armée ;
Hélène Cavalié, conservateur en chef du Patrimoine et directrice adjointe des collections du Mobilier national ;
Jean-Baptiste Clais, conservateur au département des Objets d’art du musée du Louvre ;
Christophe Beyeler, conservateur général du Patrimoine chargé du musée Napoléon Ier et du cabinet napoléonien des arts graphiques du château de Fontainebleau.
exposition coproduite par la Réunion des musées nationaux – Grand Palais, La Villette et Re Re / Adonis avec la participation particulièrement généreuse du musée de l’Armée, du musée national du château de Fontainebleau, du musée du Louvre, du musée national des châteaux de Malmaison et Bois-Préau, du Mobilier national, de la Fondation Napoléon et avec la contribution exceptionnelle du musée national des châteaux de Versailles et de Trianon avec le concours de la Fondation pour la Mémoire de l’Esclavage
L’exposition Napoléon met en scène, à l’occasion du bicentenaire de sa mort, l’invraisemblable destin d’un personnage complexe, qui fut à la fois admiré et controversé, victorieux et défait, héroïque et tragique, dont le romanesque fascine aujourd’hui encore nos contemporains. Elle rappellera ses legs politiques et culturels qui ont durablement marqué certains pays, au premier rang desquels la France, mais aussi les erreurs qu’il a commises.
Du personnage historique à l’homme intime, sa vie sous toutes ses facettes
Cette exposition s’articule autour des parties suivantes : les années d’apprentissage au collège militaire de Brienne ; les campagnes d’Italie (1796) et d’Égypte (1799) ; le coup d’État du 18 brumaire et le Consulat ; l’avènement de l’Empire ; Napoléon intime, ses femmes, Joséphine puis Marie-Louise, son fils légitime, le roi de Rome ; Napoléon, le chef de guerre ; Napoléon et l’Europe, à la tête de laquelle il place ses soeurs et frères ; le déclin de l’Empire, illustré par deux échecs militaires, la campagne d’Espagne (1808) et la campagne de Russie (1812) ; les Cent jours et sa chute définitive après la bataille de Waterloo. Des invités prestigieux s’exprimeront à propos de certains sujets, croisant ainsi leur regard avec celui des commissaires : les moeurs et la religion, avec l’intervention de Jacques-Olivier Boudon, l’exercice du pouvoir avec Thierry Lentz, et la vie et mort des soldats avec François Houdecek. L’espace consacré au rétablissement de l’esclavage et au projet colonial de Napoléon Bonaparte sera conçu par la Fondation pour la Mémoire de l’Esclavage et présentera, entre autres, un court métrage d’animation réalisé par Mathieu Glissant et une vidéo confiée à l’historien Marcel Dorigny.
Les arts et la vie de cour à travers de nombreux chefs-d’oeuvre
Des reconstitutions spectaculaires évoqueront les arts et la vie de cour d’une époque certes brève, seulement quinze ans, mais qui marqua durablement les arts décoratifs. À la suite de la campagne d’Egypte, seront présentés meubles et objets d’art créés dans l’esprit égyptien, tandis qu’un salon montrera l’évolution du style à l’apogée de l’Empire. Une salle du trône côtoiera une table dressée avec les plus riches productions. Ces espaces seront complétés par de magnifiques vêtements de cour, des armes de luxe, des décorations, des porcelaines de Sèvres, des pièces d’orfèvrerie, jusqu’à une monumentale voiture commandée pour son mariage avec Marie-Louise ainsi que le plus modeste char funèbre utilisé pour ses obsèques à Sainte-Hélène. S’y ajouteront des objets personnels de l’empereur ainsi que la spectaculaire tente de campagne avec son mobilier d’origine; la guerre ne sera pas absente avec un canon, un caisson à munitions, plusieurs mannequins et la projection sur un écran géant d’une des plus fameuses charges de cavalerie de l’histoire de France, celle de la bataille d’Eylau. Sans oublier les nombreuses sculptures qu’accompagneront les tableaux réalisés par les plus grands peintres de l’époque comme David, Gros ou Gérard.