đ âDes images et des hommesâ Bamiyan 20 ans aprĂšs, au MusĂ©e Guimet, Paris, du 24 fĂ©vrier au 21 juin 2021 (prolongĂ©e jusqu’au 18 octobre 2021)
âDes images et des hommesâ Bamiyan 20 ans aprĂšs
au Musée Guimet, Paris
du 24 fĂ©vrier au 21 juin 2021 (prolongĂ©e jusqu’au 18 octobre 2021)
PODCAST – Interview de Pierre Cambon, conservateur en chef des collections CorĂ©e, Pakistan et Afghanistan du MNAAG, et co-commissaire de l’exposition,
par Anne-FrĂ©dĂ©rique Fer, Ă Paris, le 23 fĂ©vrier 2021, durĂ©e 18’10. © FranceFineArt.
extrait du communiqué de presse :
Commissaires :
Sophie Makariou, présidente du MNAAG, commissaire générale
Pierre Cambon, conservateur en chef des collections Corée, Pakistan et Afghanistan du MNAAG
Le 11 mars 2001, les Talibans qui avaient pris le pouvoir en Afghanistan, organisaient la destruction de deux bouddhas monumentaux de 38 et 55 m de haut, sculptĂ©s dans les roches des hautes falaises de Bamiyan. Des oeuvres dâune valeur universelle, tĂ©moins de lâextraordinaire vitalitĂ© de lâart boudhique de cette vallĂ©e, situĂ©e sur la route de la soie et ouverte Ă toutes les influences, indienne, grecque, romaine⊠DiffusĂ©es par les Talibans, les images de la destruction firent le tour du monde, six mois avant celles des tours jumelles du World Trade Center Ă New York.
Ces deux Ă©vĂ©nements ont marquĂ© notre entrĂ©e dans le 21Ăšme siĂšcle. Lâatteinte Ă la mĂ©moire des hommes, Ă leur patrimoine et la mĂ©moire oĂč ils sâenracinent, est reconnue depuis comme un crime contre lâhumanitĂ©.
20 ans plus tard, le MusĂ©e national des arts asiatiques â Guimet a choisi de commĂ©morer la destruction du site de Bamiyan Ă travers une exposition prĂ©sentant des oeuvres archĂ©ologiques majeures retrouvĂ©es sur cette falaise afghane. Des photographies du plasticien Pascal Convert Ă©clairent la richesse de ce patrimoine de façon contemporaine.
Lâexposition rend hommage Ă Joseph et Ria Hackin, archĂ©ologues de Bamiyan et conservateurs du musĂ©e, disparus il y a 80 ans.
Des oeuvres archéologiques exceptionnelles, en miroir de photographies contemporaines.
Le MNAGG prĂ©sentera une sĂ©rie dâoeuvres archĂ©ologiques uniques retrouvĂ©es dans cette falaise afghane, du Gandhara Ă la pĂ©riode islamique. On y dĂ©couvrira notamment deux mains de bouddhas monumentaux ayant conservĂ© des restes de feuilles dâor.
Accompagnant ces oeuvres, les photographies de Pascal Convert, dont le Panoramique de la falaise de BĂąmiyan et la Grotte sanctuaire de BĂąmiyan dĂ©truite par les Talibans, offriront un regard plus contemporain. Ă travers les vestiges archĂ©ologiques, les relevĂ©s de peintures et vestiges de peintures originales, les crĂ©ations contemporaines de Pascal Convert, les films et les documents dâarchives (documents de fouilles, lettre de ralliement des Hackin au GĂ©nĂ©ral de Gaulle) prĂ©sentĂ©s, lâexposition raconte lâhistoire du site de Bamiyan et sa vitalitĂ© culturelle du VIĂšme au XIIIĂšme siĂšcle, la base doctrinale qui a conduit Ă la destruction du site en 2001 mais aussi la terrible actualitĂ© des faits avec les destructions dâautres sites inscrits au patrimoine de lâhumanitĂ©.
Lâensemble des oeuvres sera installĂ©e au premier Ă©tage du musĂ©e, dans la salle sino-tibĂ©taine amĂ©nagĂ©e pour lâoccasion.
Le rĂŽle majeur de lâĂ©cole archĂ©ologique française.
La France est particuliĂšrement liĂ©e Ă la prĂ©servation de lâarchĂ©ologie et de la mĂ©moire de lâAfghanistan, pays oĂč elle a crĂ©Ă© en 1922 la dĂ©lĂ©gation archĂ©ologique – devenue Direction ArchĂ©ologique de lâAfghanistan, et aujourdâhui encore seul institut archĂ©ologique Ă©tranger implantĂ© de façon permanente en Afghanistan.
Dominant la vallĂ©e, les falaises de Bamiyan sont situĂ©es sur lâune des plus importantes routes de commerce reliant lâAsie centrale au sous-continent indien. Comme celles de Dunhuang en Chine, elles sont constituĂ©es de loess, matĂ©riau qui se prĂȘte Ă la sculpture – ou plus exactement au modelage sur une armature – dâeffigies monumentales dont la surface Ă©tait, Ă lâorigine, dorĂ©e.
Dans ce lieu dâart et de culture exceptionnel, les premiĂšres fouilles ont Ă©tĂ© françaises. Alfred Foucher, historien de lâart et spĂ©cialiste du monde bouddhiste, Ă©tudia le site dĂšs 1922. AndrĂ© Godard, architecte, archĂ©ologue et historien de l’art français, et son Ă©pouse Edda sâattĂšlent ensuite aux premiers relevĂ©s des peintures au cours de lâhiver 1923, en dĂ©pit du froid atroce qui sĂ©vissait dans la vallĂ©e. Lâexposition dĂ©ploie un certain nombre de leurs relevĂ©s.
ConservĂ©s au MNAAG et jamais montrĂ©s, ils rĂ©vĂšlent la vivacitĂ© de couleurs et lâaccomplissement esthĂ©tique de la peinture bouddhique Ă Bamiyan. Les Godard poursuivront leurs travaux en 1924 avec Joseph Hackin* alors conservateur au musĂ©e Guimet et publieront la premiĂšre Ă©tude sur lâart bouddhique de Bamiyan, Ă©ditĂ©e en 1928.
De nouvelles fouilles auront lieu en 1930 sous la conduite de Joseph Hackin, dĂ©sormais directeur du musĂ©e Guimet, et accompagnĂ© de son insĂ©parable ami lâarchitecte Jean Carl. De retour Ă Paris, Hackin travaillera Ă une nouvelle publication sur Bamiyan en 1933.Revenu en Afghanistan en 1934, il sâĂ©tablit Ă Kaboul avec son Ă©pouse Ria, Ă©galement archĂ©ologue, et rĂ©dige alors le premier guide de visite du site, dĂ©sormais consacrĂ© comme un des hauts lieux de lâart bouddhique. Joseph et Ria Hackin**, unis Ă la ville et dans le travail, se rallient dĂšs la premiĂšre heure au gĂ©nĂ©ral de Gaulle depuis lâAfghanistan. A Londres, Joseph et Ria sont investis dâimportantes responsabilitĂ©s. Câest lors dâune mission confiĂ©e par le GĂ©nĂ©ral que les Hackin trouvent une fin tragique dans le torpillage de leur bateau, le 24 fĂ©vrier 1941.
*Joseph Hackin (nĂ© en 1886 et mort le 24 fĂ©vrier 1941, en mer lors du torpillage de son bateau prĂšs des Ăźles FĂ©roĂ©) est un archĂ©ologue français dâorigine luxembourgeoise, rĂ©sistant, compagnon de la LibĂ©ration. En 1907, il est secrĂ©taire de lâindustriel Ămile Guimet. Il apprend le sanscrit et tibĂ©tain Ă lâĂcole Pratique des Hautes Ătudes dont il est diplĂŽmĂ©. En 1912, il est nommĂ© conservateur adjoint au MusĂ©e Guimet et en 1923, aprĂšs avoir poursuivi ses travaux de recherche il en deviendra conservateur.
**Ria Hackin (nĂ©e en 1905 sous le nom de Marie Parmentier, morte le 24 fĂ©vrier 1941) est une archĂ©ologue et rĂ©sistante française de la Seconde Guerre mondiale. Officier des Forces Françaises libres, elle participe Ă lâorganisation du Corps des Volontaires françaises au sein de la France libre. Disparue en mer avec son mari, Ă la suite dâun torpillage elle est faite compagnon de la LibĂ©ration Ă titre posthume et reçoit la croix de guerre 1939-1945 avec palme.