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🔊 “Myriam Mihindou” au musée du quai Branly – Jacques Chirac, du 6 février au 10 novembre 2024

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“Myriam Mihindou” Ilimb, l’essence des pleurs

au musĂ©e du quai Branly – Jacques Chirac, Paris

du 6 février au 10 novembre 2024

musĂ©e du quai Branly – Jacques Chirac


Interview de Sarah Ligner, Conservatrice du patrimoine, responsable de l’unité patrimoniale mondialisation historique et contemporaine au musée du quai Branly – Jacques Chirac, Paris et co-commissaire de l'exposition, par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 5 février 2024, durée 16’34'', © FranceFineArt. (de gauche à droite, Sarah Ligner, Myriam Mihindou et Nathalie Gonthier)

PODCAST –  Interview de Sarah Ligner, Conservatrice du patrimoine, responsable de l’unitĂ© patrimoniale mondialisation historique et contemporaine au musĂ©e du quai Branly – Jacques Chirac, Paris et co-commissaire de l’exposition,


par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 5 février 2024, durée 16’34,
© FranceFineArt.
(de gauche Ă  droite, Sarah Ligner, Myriam Mihindou et Nathalie Gonthier)


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©Anne-Fréderique Fer, présentation presse, le 5 février 2024.

Extrait du communiqué de presse :

Myriam Mihindou, Yend malòngu _Tête de cheval_Courtesy de l’artiste et Galerie Maïa Muller, Paris© Myriam Mihindou.

Myriam Mihindou, Yend malòngu _Tête de cheval_Courtesy de l’artiste et Galerie Maïa Muller, Paris© Myriam Mihindou.

Myriam Mihindou, Lingi, 2022. Encre, carbone, papier coton
Courtesy de l’artiste et Galerie Maïa Muller, Paris. © musée du quai Branly - Jacques Chirac photo Pauline Guyon.© Myriam Mihindou ©. Galerie Maïa Muller

Myriam Mihindou, Lingi, 2022. Encre, carbone, papier coton. Courtesy de l’artiste et Galerie MaĂŻa Muller, Paris. © musĂ©e du quai Branly – Jacques Chirac photo Pauline Guyon.© Myriam Mihindou Â©. Galerie MaĂŻa Muller

Myriam Mihindou, MATSANGA, 2023. Courtesy de l’artiste et Galerie Maïa Muller, Paris.© Myriam Mihindou.

Myriam Mihindou, MATSANGA, 2023. Courtesy de l’artiste et Galerie Maïa Muller, Paris.© Myriam Mihindou.

Commissariat :
Sarah Ligner, Conservatrice du patrimoine, responsable de l’unité patrimoniale mondialisation historique et contemporaine au musée du quai Branly – Jacques Chirac, Paris
Nathalie Gonthier, commissaire d’expositions




Invitation à l’artiste contemporaine Myriam Mihindou, pour une nouvelle série d’oeuvres visuelles et sonores en hommage aux pleureuses punu du Gabon.



Invitée à investir l’espace d’exposition de la galerie Marc Ladreit de Lacharrière, l’artiste franco-gabonaise Myriam Mihindou propose une installation inédite qui « réactive » les collections d’instruments de musique et les archives sonores conservées au musée. Sa réflexion prend pour point de départ la tour de verre qui abrite et donne à voir sur 6 niveaux la collection des 10 000 instruments de musique conservés au musée. Dans une démarche introspective, en référence à sa propre expérience du deuil, elle y associe la larme comme sujet et comme matériau.



Aussi par le biais d’un travail collaboratif, notamment avec le concepteur acousticien Didier Blanchard et la compositrice Annie-Flore Batchiellilys, Myriam Mihindou imagine une mise en présence sonore des pleureuses punu. L’artiste a notamment conçu une sculpture végétale traversant l’exposition qui, activée par le public, émet un champ vibratoire. OEuvres en céramique, vanneries, dessins, sculptures de sel et de bois font ainsi résonner les mémoires et interrogent les manières de les transmettre.



À travers cette exposition, Myriam Mihindou rend hommage aux pleureuses punu, accompagnatrices d’âmes qui guident les défunts vers l’au-delà et les vivants dans leur deuil. Elle réinterroge une pratique ancestrale ainsi que les récits et les mythes qui l’accompagnent et, par son oeuvre plurielle, « totale, performative, organique et corporelle », comme elle aime à le souligner, met en évidence la vertu cathartique des chants et des larmes de ces femmes sur le corps social et individuel.




#Publication aux Édition musée du quai Branly – Jacques Chirac

Myriam Mihindou, MATSANGA, 2023. Courtesy de l’artiste et Galerie Maïa Muller, Paris.© Myriam Mihindou.

Myriam Mihindou, MATSANGA, 2023. Courtesy de l’artiste et Galerie Maïa Muller, Paris.© Myriam Mihindou.

Myriam Mihindou, Pierre angulaire, 2023. Calque, graphite, soie.
Courtesy de l’artiste et Galerie Maïa Muller, Paris. © Myriam Mihindou. © Galerie Maïa Muller.

Myriam Mihindou, Pierre angulaire, 2023. Calque, graphite, soie. Courtesy de l’artiste et Galerie MaĂŻa Muller, Paris. © Myriam Mihindou. Â© Galerie MaĂŻa Muller.

Myriam Mihindou, Croquis préparatoires. Courtesy de l’artiste et Galerie Maïa Muller, Paris. © Myriam Mihindou.

Myriam Mihindou, Croquis préparatoires. Courtesy de l’artiste et Galerie Maïa Muller, Paris. © Myriam Mihindou.


Parcours de l’exposition

Introduction
« La plus grande pleureuse dans la forĂŞt des gĂ©nies est la chute d’eau »1 scandent les pleureuses lors des rituels d’accompagnement aux morts au Gabon. La langue punu dans le sud du Gabon comporte plusieurs termes pour distinguer le pleur de l’eau, des animaux, des vĂ©gĂ©taux et des instruments de musique. L’oeuvre de Myriam Mihindou (nĂ©e en 1964 au Gabon, Ă  Libreville) puise dans cette dimension polymorphe du pleur. Lors du dĂ©cès de son père, l’artiste a Ă©tĂ© initiĂ©e par les pleureuses punu. Accompagnatrices de l’âme du dĂ©funt, ces veuves qui ont perdu leurs maris veillent aussi sur les vivants, relient l’individu Ă  la sphère collective et structurent les liens avec l’univers et l’au-delĂ . Myriam Mihindou a conçu une sĂ©rie d’oeuvres Ă  partir d’un rituel vĂ©cu et de la connaissance ancestrale qui lui a Ă©tĂ© transmise. Elle a crĂ©Ă© l’ensemble spĂ©cifiquement pour l’exposition, en rĂ©sonance avec le patrimoine matĂ©riel et immatĂ©riel conservĂ© au musĂ©e, et au travers de dialogues et collaborations. Ce rĂ©cit des larmes qu’elle partage, elle l’adresse Ă  tous les sens. L’espace est traversĂ© par un chant vibratoire et se perçoit comme un univers cathartique. Les pleureuses appellent les larmes des proches du dĂ©funt et libèrent le chagrin qui se dĂ©verse. Les oeuvres traduisent ces Ă©motions extrĂŞmes des pleurs du deuil ; ces reprĂ©sentations visent Ă  apaiser la douleur et la tristesse. Ilimb, en punu, signifie la trace qui demeure. La torche dont la flamme vacille dans la nuit lors des rituels pleure des larmes de rĂ©sine qui se dĂ©tĂ©riorent et se transforment. Pareil Ă  la rĂ©sine, le corps laisse aussi des traces. En se rĂ©fĂ©rant Ă  cette trace, on peut croire Ă  une rĂ©surrection. Le chant des pleureuses tourbillonne dans l’air comme la fumĂ©e de la torche : c’est l’essence des pleurs.

1 Ce proverbe est extrait de l’ouvrage écrit par Roger Mabik-ma-Kombil, Ngongo des initiés. En hommage aux pleureuses du Gabon, Paris, L’Harmattan, 2003

Le corps collectif
Myriam Mihindou interroge sa culture d’origine punu. Elle conçoit une oeuvre globale, nourrie de perceptions sensorielles et incarnée. Formes, matières, sons, mettent en évidence les relations qu’elle entretient avec sa matrilinéarité punu et la place des femmes dans cette société. Le cheminement au sein de l’espace ici ouvert engage les corps des visiteurs à ressentir une expérience qui prend ses sources dans une pratique de catharsis collective, celle de la lignée des pleureuses. Les pleureuses, ce sont ces femmes qui soignent les corps, les esprits, les âmes. Celles qui structurent le lien avec l’univers et transmettent les filiations ancestrales et mystiques. Les rituels qu’elles performent accompagnent l’âme des défunts et participent d’une appropriation collective et identitaire. Ce corps collectif se révèle au cours du lingui, ce temps de profonde méditation, d’écoute et d’introspection. C’est là où la place sacrée de l’individu peut se définir dans un rapport au vivant et au groupe qui régénère l’âme, le corps et l’esprit. Les oeuvres créées se font le réceptacle des larmes d’un corps universel et collectif.

Le souffle
La lignée des pleureuses, c’est celle des destinées, celle qui rencontre l’amour, la mort, la naissance. C’est le Moñu, la matrice qui traverse l’espace. Il implique la vie en toute vie, celle des hommes, des végétaux, des animaux. Une sculpture végétale, sonore et tactile capture et retransmet le souffle créateur de Mam, la terre mère. Elle convoque les ancêtres. L’acousticien Didier Blanchard, en collaboration avec Myriam Mihindou, fait exister ce paysage sonore et vibratoire. Ils invitent à faire un geste : en caressant délicatement la sculpture, les récits et les mythes prennent vie. Le Moñu, c’est aussi le corps de l’artiste qui respire et qui performe toujours. Ici est réinterrogée une pratique ancestrale. La présence du souffle donne vie aux formes et aux matières. La larme et ses vertus cathartiques agissent de façon curative, provoquant une dimension thérapeutique. Annie Flore Batchiellilys, autrice également invitée par Myriam Mihindou, a composé la complainte « Tsiengui Milangu ». Elle reprend le souffle inhérent aux rituels et son chant croise le rythme immémorial mikékili des bâtons frappés par les mains des pleureuses.

Retourner Ă  la terre
Myriam Mihindou transpose en céramique des harpes sacrées du Gabon conservées dans la réserve des instruments de musique du musée. Elle les colore d’oxyde de fer du Gabon. C’est la peau des villages, c’est le goût de la terre rouge, de l’eau, du sol, c’est l’odeur des feux du foyer et des cérémonies de passage. Dans les pots des pleureuses Matsanga, emplis de toutes les larmes de la vie, on retrouve les traces de particules blanchâtres de kaolin (argile blanche). C’est le Pemba qui recouvre les masques et le corps des initiés pour faciliter le voyage céleste entre le monde des vivants et celui des morts. Dans le sud Gabon, les enfants sont initiés par les pleureuses. C’est un enseignement fondamental, l’incarnation d’un savoir à la fois mystique, scientifique et thérapeutique. Il s’agit de faire vivre et circuler ces savoirs et de les traduire, au sein de l’espace d’exposition. Cette transmission mémorielle est essentielle. Elle passe par la permanence des pratiques. Les mots de la langue reviennent, réapparaissent dans les complaintes. Le passé, le présent et le futur se confondent. Myriam Mihindou a choisi des titres en punu pour ses oeuvres. Sa langue prend pour elle une dimension résonnante au coeur de visions rêvées et de mémoires revisitées. Ces mots, ces sons, ces formes, sont des archives. Celles d’une langue, celles des relations fondamentales à la vie, à la mort, au souffle des ancêtres et aux relations sociales apaisées.

L’expérience du lieu
Myriam Mihindou a éprouvé le lieu muséal, celui des réserves qui conservent les objets et les instruments de musique qui l’intéresse. Elle a senti le nzumbili, cette odeur de fumée qui se dégage des harpes sacrées. Cette expérience olfactive participe à la levée des amnésies et revivifie les souvenirs. À partir de cette expérience, elle convoque des sens trop souvent atrophiés au sein des espaces muséaux. Olfactifs, tactiles ou auditifs, tous lui semblent indispensables pour faire percevoir les relations qui prennent corps sur ce plateau ouvert dont l’espace abolit les distances et assure la pollinisation des oeuvres. Celles-ci se chargent de la présence vibratoire des pleureuses et agissent sur les consciences. Elles forment un ensemble, un corps sensoriel et intuitif. Des socles ont été conçus sur mesure pour les oeuvres de l’exposition, respectant l’intensité de la pesanteur. Ils forment ainsi des berceaux pour les oeuvres. Cette réflexion fait partie de la scénographie dans son ensemble. Myriam Mihindou se réfère à Roger Mabik-Ma-Kombil, artiste pleureur gabonais qui, le premier, a écrit sur l’importance du rôle social des pleureuses punu. Le théâtre initiatique et mystique des pleureuses accompagne l’âme et l’esprit des défunts, il conte les mémoires et permet d’exister face à la mort. La force de ces complaintes c’est Mutodi, la parole en devenir, celle que l’on retrouve dans le geste graphique de l’artiste. Ses dessins sont les empreintes d’un savoir immatériel. Elle interroge les mémoires et les transmissions entre générations, investit dans l’énergie vitale qui anime les êtres et les éléments naturels, et fait du lieu d’exposition un espace initiatique in situ ancré dans un présent, qui est lui-même en lien avec le passé et l’avenir.

La réserve des instruments de musique
La collection d’instruments de musique aujourd’hui conservĂ©e au musĂ©e du quai Branly – Jacques Chirac provient du musĂ©e national des arts d’Afrique et d’OcĂ©anie et du dĂ©partement d’ethnomusicologie du musĂ©e de l’Homme. Elle comprend près de 10.000 instruments. Ă€ la crĂ©ation du musĂ©e du quai Branly, l’architecte Jean Nouvel a imaginĂ© de les dĂ©ployer dans une rĂ©serve, visible Ă  tous les niveaux du musĂ©e. Ce cylindre de verre est un lieu de conservation et de travail sur la collection, organisĂ©e par grandes familles instrumentales et par ensembles culturels. Ă€ l’intĂ©rieur de la tour, certains instrument plus fragiles sont disposĂ©s dans des boĂ®tes ou dans des tiroirs. Dans le cadre de la prĂ©paration de son exposition, l’artiste Myriam Mihindou s’est rendue Ă  plusieurs reprises dans cette rĂ©serve, qui est pour elle le choeur du musĂ©e. Elle a choisi de transposer en cĂ©ramique neuf harpes sacrĂ©es du Gabon qui sont des instruments fondamentaux dans les rituels d’initiation. PrĂ©sentĂ©es dans l’exposition, les neuf harpes crĂ©Ă©es par l’artiste traduisent l’énergie du son, ainsi transfigurĂ©. Ces harpes ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©es au CRAFT de Limoges. L’artiste a bĂ©nĂ©ficiĂ© du savoir faire technique de GaĂ©tan Monceret (technicien cĂ©ramiste).



Exposition conçue en collaboration avec l’artiste Myriam Mihindou et la Galerie Maïa Muller, Paris.

Biographie de l’artiste

NĂ©e en 1964 Ă  Libreville au Gabon, Myriam Mihindou est une artiste francogabonaise formĂ©e Ă  l’École supĂ©rieure des beaux-arts de Bordeaux. Elle vit et travaille majoritairement en France, mais a vĂ©cu et sĂ©journĂ© sur plusieurs continents. Elle demeure très attachĂ©e au Gabon et Ă  la culture punu Ă  laquelle appartient son père. Myriam Mihindou dĂ©veloppe dans toute son oeuvre un langage plastique pluridisciplinaire, travaillant aussi bien la photographie que la performance, la vidĂ©o, le dessin ou la sculpture, utilisant de nombreux matĂ©riaux. Son expĂ©rience personnelle y dialogue avec l’histoire des lieux et des corps, ainsi que les processus de domination et d’exploitation qui s’y exercent, pour faire entrevoir des mĂ©moires occultĂ©es. Les notions de soin, de guĂ©rison et de rituel figurent au coeur de son oeuvre. Le travail de Myriam Mihindou a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ© Ă  deux reprises au musĂ©e du quai Branly – Jacques Chirac, dans l’exposition Les MaĂ®tres du dĂ©sordre en 2012, avec plusieurs photographies de la sĂ©rie « DĂ©chouKaj » (2006), puis dans l’exposition Ex Africa. PrĂ©sences africaines dans l’art d’aujourd’hui en 2021 avec l’œuvre « TrophĂ©e » (2020) commandĂ©e pour l’exposition, ainsi que l’installation « Transmissions », constituĂ©e de neuf cannes de pouvoir en cĂ©ramique (2018). Les oeuvres de Myriam Mihindou ont Ă©tĂ© exposĂ©es en France et Ă  l’étranger, notamment au Centre Pompidou (Paris), au Transpalette Centre d’Art contemporain (Bourges), Ă  la chapelle Saint SĂ©verin (Paris), Ă  la chapelle Picasso-MusĂ©e national Pablo Picasso–La Guerre et la Paix (Vallauris), Ă  la Fondation Dapper (Paris), au Centro Atlántico de Arte Moderno (Las Palmas, Canaries), Ă  la Verrière-Fondation d’entreprise Hermès (Bruxelles), au Museo Reina Sofia (Madrid), au Museum fĂĽr Moderne Kunst (Francfort), au Contemporary Arts Center (Cincinnati, États-Unis). En 2022 Myriam Mihindou est laurĂ©ate du prix Nouveau Regard AWARE.