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“Le duc d’Aumale et Chantilly“
Photographies du XIXe siĂšcle

au Cabinet d’Arts Graphiques du Chñteau de Chantilly

du 15 octobre 2022 au 26 février 2023

ChĂąteau de Chantilly


Interview de Nicole Garnier-Pelle, conservateur gĂ©nĂ©ral du patrimoine honoraire et commissaire de l'exposition, par Anne-FrĂ©dĂ©rique Fer, Ă  Chantilly, le 12 octobre 2022, durĂ©e 15’28. © FranceFineArt. 

PODCAST –  Interview de Nicole Garnier-Pelle, conservateur gĂ©nĂ©ral du patrimoine honoraire et commissaire de l’exposition,


par Anne-FrĂ©dĂ©rique Fer, Ă  Paris, le 12 octobre 2022, durĂ©e 15’28.
© FranceFineArt.

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Le duc dÕAumale et Chantilly; Photographies du XIXe sicle
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©Anne-Fréderique Fer, voyage et présentation presse, le 12 octobre 2022.

Extrait du communiqué de presse :

 

FrĂšres Ernest (1831-1890) et EugĂšne (1830-1905) Appert. Portrait d’Henri d’OrlĂ©ans duc d’Aumale (1822-1897), 1873. Chantilly, musĂ©e CondĂ©, PH 1038.
FrĂšres Ernest (1831-1890) et EugĂšne (1830-1905) Appert. Portrait d’Henri d’OrlĂ©ans duc d’Aumale (1822-1897), 1873. Chantilly, musĂ©e CondĂ©, PH 1038.
Claudius Couton (1837-1929). Le chùteau de Chantilly avant sa reconstruction, 1872. Chantilly, musée Condé, PH-343.
Claudius Couton (1837-1929). Le chùteau de Chantilly avant sa reconstruction, 1872. Chantilly, musée Condé, PH-343.
Anonyme. Les Grandes Ecuries : le manÚge ou la porte de l'est, vers 1850-1855. Chantilly, musée Condé, PH 291.
Anonyme. Les Grandes Ecuries : le manĂšge ou la porte de l’est, vers 1850-1855. Chantilly, musĂ©e CondĂ©, PH 291.
Alphonse Chalot (Chantilly, 1846-Paris, 1893). Chantilly, la galerie de peinture vue du cÎté de la galerie de la Rotonde. Chantilly, musée Condé, PH-184.
Alphonse Chalot (Chantilly, 1846-Paris, 1893). Chantilly, la galerie de peinture vue du cÎté de la galerie de la Rotonde. Chantilly, musée Condé, PH-184.
Isidore-Alphonse Chalot (Chantilly, 1846-Paris, 1893). Le chùteau de Chantilly aprÚs sa reconstruction, 1885. Chantilly, musée Condé, PH-130.
Isidore-Alphonse Chalot (Chantilly, 1846-Paris, 1893). Le chùteau de Chantilly aprÚs sa reconstruction, 1885. Chantilly, musée Condé, PH-130.
Vicomte Joseph Vigier (1821-1894). Henri d’OrlĂ©ans, duc d’Aumale (1822-1897), septembre, 1852. Chantilly, musĂ©e CondĂ©, Na 961.
Vicomte Joseph Vigier (1821-1894). Henri d’OrlĂ©ans, duc d’Aumale (1822-1897), septembre, 1852. Chantilly, musĂ©e CondĂ©, Na 961.
Anonyme vers 1900. Le Salon d’OrlĂ©ans. Chantilly, musĂ©e CondĂ©, 2016.6.1.43.
Anonyme. Le Salon d’OrlĂ©ans, vers 1900Chantilly, musĂ©e CondĂ©, 2016.6.1.43.
Anonyme, La Rotonde de la Minerve, vers 1900. Chantilly, musée Condé, 2016.6.1.39.
Anonyme, La Rotonde de la Minerve, vers 1900. Chantilly, musée Condé, 2016.6.1.39.

Commissaire : Nicole Garnier-Pelle, conservateur général du patrimoine honoraire.





Dans le cadre du bicentenaire de la naissance du duc d’Aumale (1822-1897), donateur de Chantilly à l’Institut de France.

Fils du roi Louis-Philippe, Henri d’OrlĂ©ans, duc d’Aumale (1822-1897), hĂ©rite en 1830 Ă  l’ñge de huit ans de son grand-oncle et parrain, Louis-Henri-Joseph, duc de Bourbon, prince de CondĂ© (1756-1830), qui possĂ©dait notamment le Palais Bourbon (aujourd’hui notre AssemblĂ©e nationale) et le chĂąteau de Chantilly. Brillant soldat rendu cĂ©lĂšbre par la prise de la smalah d’Abd el-Kader en 1843 Ă  vingt-et-un ans, gĂ©nĂ©ral et gouverneur de l’AlgĂ©rie Ă  vingt-cinq, Aumale voit sa carriĂšre brisĂ©e par la rĂ©volution de 1848. ExilĂ© en Angleterre, rĂ©fugiĂ© avec les siens auprĂšs de sa cousine la reine Victoria Ă  Claremont, le duc d’Aumale achĂšte en 1851 Ă  Twickenham sur les bords de la Tamise une belle demeure, Orleans House, puis une rĂ©sidence de chasse Ă  Woodnorton, ainsi qu’en 1853 un domaine de 6 000 hectares en Sicile, le Zucco.

AgĂ© de dix-sept ans lors de l’apparition de la photographie, militaire ouvert aux techniques nouvelles, Aumale ne peut ignorer le daguerrĂ©otype qui est utilisĂ© en 1842 lors de la pompe funĂ©raire de son frĂšre aĂźnĂ© Ferdinand d’OrlĂ©ans, Prince Royal (Paris, musĂ©e d’Orsay) ; son pĂšre Louis-Philippe sera l’un des premiers souverains Ă  poser devant un objectif. Probablement Aumale est-il convaincu de l’intĂ©rĂȘt de la photographie naissante par son ami de jeunesse et ex-condisciple au collĂšge royal Henri-IV, le vicomte Joseph Vigier, qui rĂ©alise dĂšs 1852 les portraits de toute la famille d’OrlĂ©ans en exil. DĂšs avant la rĂ©volution de 1848, Aumale possĂšde un daguerrĂ©otype reprĂ©sentant Chantilly en 1846 par un certain Guerrier, malheureusement disparu aujourd’hui.

Cette exposition se propose de mettre en regard, Ă  travers les photographies anciennes, la vie mouvementĂ©e du duc d’Aumale et l’ambitieuse reconstruction du chĂąteau de Chantilly qu’il a entreprise.



LE DUC D’AUMALE EN EXIL (1848-1871)

Le long sĂ©jour de vingt-trois ans en Angleterre dĂ©veloppe les liens avec ses cousins la Reine Victoria et surtout son Ă©poux le Prince Albert, qui s’intĂ©resse activement au dĂ©veloppement de la photographie, patronnant en 1857 l’exposition de Manchester oĂč sont exposĂ©es des Ă©preuves de Le Gray et de la plupart des primitifs de la photographie prĂ©sents dans la collection du duc d’Aumale. La reine Victoria se fait photographier en famille avec les siens et offre des tirages Ă  ses proches dont Aumale. Le Prince consort convainc sans peine Aumale de laisser photographier ses dessins de RaphaĂ«l en vue d’un monumental catalogue raisonnĂ© : l’amateur d’art comprend trĂšs tĂŽt les possibilitĂ©s immenses qu’offre la photographie pour la connaissance et la reproduction des oeuvres d’art. DĂšs les origines de la photo, le duc d’Aumale utilise donc la photographie comme l’outil privilĂ©giĂ© du collectionneur, notamment dans le domaine de la bibliophilie qui lui est cher. Nous en avons la preuve avec ses premiers agendas conservĂ©s : en octobre 1864, Ă  Venise, il s’extasie sur un manuscrit : « Ms. Grimani ; admirables Memling ; 1000 ÂŁ » et en acquiert alors les photos comme le font les historiens d’art aujourd’hui, dans un but d’étude et de comparaison. Au dĂ©but de l’exil, le duc d’Aumale semble privilĂ©gier pour ses portraits les photographes français, comme Claudet en 1848, son ami le vicomte Vigier en 1852, Camille Silvy, Adolphe Beau ou F. Joubert. Aumale ne manque jamais de noter dans son agenda quand il se fait photographier, ainsi le 30 juin 1868 : « SĂ©ance chez le photographe Bondonneau » – encore un français. Le duc d’Aumale pose aussi Ă  cheval devant des photographes anglais comme W.T. Deane Ă  Richmond.

La photographie est souvent liĂ©e Ă  la mort et au souvenir des disparus. En 1866, les obsĂšques de la reine Marie- AmĂ©lie donnent lieu Ă  d’émouvantes photographies de la famille d’OrlĂ©ans en deuil. Le duc commande de nombreux exemplaires de photos de ses chers disparus qu’il envoie Ă  ses proches, ainsi en mars 1867 aprĂšs la disparition de son fils Louis, prince de CondĂ©, dĂ©cĂ©dĂ© en 1866. AprĂšs la mort de son Ă©pouse Ă  quarante-sept ans en 1869, le duc diffuse Ă  son entourage son portrait officiel par Adolphe Beau.

À partir de 1852, le duc d’Aumale n’a plus le droit de possĂ©der des biens en France. Ne voulant pas se sĂ©parer de l’hĂ©ritage des CondĂ©, il tourne la difficultĂ© en vendant fictivement Chantilly Ă  ses banquiers anglais Antrobus et Marjoribanks, de la banque Coutts. Chantilly est alors louĂ© au colonel anglais Mac Call, comme le montre une photographie du chĂąteau d’Enghien publiĂ©e dans l’album Chemin de fer du Nord de Paris Ă  CompiĂšgne par Chantilly vers 1865 avec la lĂ©gende.: « ChĂąteau de l’Embass.r d’Angleterre » – location qui protĂ©geait le chĂąteau. L’aile principale, ou Grand ChĂąteau, avait Ă©tĂ© rasĂ©e Ă  la RĂ©volution : c’était la partie la plus ancienne du monument Ă©rigĂ© au XIVe siĂšcle par la famille d’Orgemont, transformĂ© par Pierre Chambiges pour les Montmorency au XVIe siĂšcle, puis par les CondĂ© et leurs architectes Jules Hardouin-Mansart au XVIIe siĂšcle, puis Jean Aubert et Jean François Leroy au XVIIIe siĂšcle. Il ne subsistait que l’aile Renaissance Ă©levĂ©e pour Anne de Montmorency par l’architecte Jean Bullant. DĂšs 1847, Aumale avait demandĂ© Ă  l’architecte FĂ©lix Duban de reconstruire l’aile rasĂ©e, mais Louis-Philippe avait dĂ©couragĂ© l’entreprise. Une sĂ©rie de tirages anonymes sur papier salĂ© datant des annĂ©es 1850-1855 rĂ©vĂšle l’état de Chantilly pendant l’exil.




LE RETOUR EN FRANCE DU DUC D’AUMALE (1871). CHANTILLY EN 1872

À son retour en France en 1871, le duc d’Aumale reprend un rĂŽle politique et militaire. Pendant la guerre de 1870, le gĂ©nĂ©ral d’Aumale avait demandĂ© sans succĂšs Ă  pouvoir combattre pour son pays, avec son frĂšre le prince de Joinville et son neveu le duc de Chartres (seul, ce dernier y parviendra sous le pseudonyme de Robert Le Fort, empruntĂ© symboliquement Ă  l’un des premiers souverains capĂ©tiens). Revenu en France, doyen de l’armĂ©e française, Aumale se voit confier le procĂšs de Bazaine, qui nous est connu par un photomontage.

DĂ©putĂ© de l’Oise en 1871, prĂ©sident du Conseil GĂ©nĂ©ral de l’Oise il aurait pu briguer de plus hautes fonctions sous la IIIe RĂ©publique, mais il ne franchira jamais le pas. De cette pĂ©riode, nous conservons des portraits du prince en uniforme. Il cite dans son agenda le 27 septembre 1873 le « photographe Appert » qui rĂ©alise sa photographie officielle en uniforme et en kĂ©pi qui sera publiĂ©e dans la Galerie contemporaine littĂ©raire et artistique le 12 juillet 1878.

Quand il prend le commandement du 5e Corps d’armĂ©e Ă  Besançon, il pose devant Boname, le photographe local qui fait les portraits de groupes des diffĂ©rents dĂ©tachements.

À peine revenu en France, le duc d’Aumale reprend le projet qu’il n’avait pu mener Ă  bien avant la rĂ©volution de 1848 : reconstruire Chantilly. Avant de commencer les travaux du Grand ChĂąteau, il commande en 1872 des photographies du site au jeune « peintre photographe » auvergnat Claudius Couton (1837-1929), actif Ă  Clermont- Ferrand. Claudius Couton rĂ©alise une couverture photographique complĂšte du domaine de Chantilly. La plupart des Ă©preuves se prĂ©sentent dans des encarts ovales, justifiĂ©s sans doute par la nĂ©cessitĂ© technique de fournir une image nette sur l’ensemble des vues. Couton se prĂ©sente comme « artiste Peintre Photographe », dĂ©finissant la photographie comme un art. Il ajoute parfois dans ses photographies des dĂ©tails techniques : une chambre et un chĂąssis posĂ©s au premier plan, voire le laboratoire ambulant, et peut-ĂȘtre mĂȘme des portraits de son assistant ou de lui mĂȘme : un personnage rĂ©current, coiffĂ© d’un chapeau melon, donne l’échelle. Il travaille au collodion humide et le laboratoire ambulant lui est nĂ©cessaire pour prĂ©parer les plaques de verre dans le noir total avant de les exposer, puis pour les dĂ©velopper ensuite rapidement.

Antoine François Jean Claudet (La Croix-Rousse, 1797-Londres, 1867). Henri d’OrlĂ©ans, duc d’Aumale (1822-1897) et François d’OrlĂ©ans, prince de Joinville (1818-1900) Ă  Claremont, 1848. Chantilly, musĂ©e CondĂ©, 2015.1.1, acquis avec le soutien des Amis du musĂ©e CondĂ©.
Antoine François Jean Claudet (La Croix-Rousse, 1797-Londres, 1867). Henri d’OrlĂ©ans, duc d’Aumale (1822-1897) et François d’OrlĂ©ans, prince de Joinville (1818-1900) Ă  Claremont, 1848. Chantilly, musĂ©e CondĂ©, 2015.1.1, acquis avec le soutien des Amis du musĂ©e CondĂ©.
Camille Silvy (Nogent-le-Rotrou, 1834-Saint-Maurice, 1910) Henri d’OrlĂ©ans, duc d’Aumale (1822-1897), en pied, bras croisĂ©s, Ă  cĂŽtĂ© d’une bibliothĂšque, entre 1859 et 1867. Chantilly, musĂ©e CondĂ©, 2007.6.1.14.
Camille Silvy (Nogent-le-Rotrou, 1834-Saint-Maurice, 1910), Henri d’OrlĂ©ans, duc d’Aumale (1822-1897), en pied, bras croisĂ©s, Ă  cĂŽtĂ© d’une bibliothĂšque, entre 1859 et 1867. Chantilly, musĂ©e CondĂ©, 2007.6.1.14.

LA RECONSTRUCTION DE CHANTILLY (1875-1886) ET LE LEGS DE 1884

Depuis 1847, le duc d’Aumale souhaitait reconstruire Ă  Chantilly le Grand ChĂąteau, mutilĂ© depuis la RĂ©volution. L’architecte FĂ©lix Duban Ă©tant mort en 1870, c’est HonorĂ© Daumet qu’il charge de relever Chantilly. À son retour en France, Aumale commence par restaurer les appartements historiques des princes de CondĂ© situĂ©s dans l’aile Renaissance, ainsi que les siens et ceux de sa dĂ©funte Ă©pouse, situĂ©s au rez-de-chaussĂ©e du Petit ChĂąteau, pouvant ainsi Ă©crire avec satisfaction en 1876 : « Dormi chez moi ».

À partir de 1875, HonorĂ© Daumet reconstruit l’aile absente, en grande partie Ă  partir des plans dessinĂ©s en 1847 par FĂ©lix Duban pour le duc d’Aumale. NĂ©anmoins, le projet initial du prince avait Ă©tĂ© modifiĂ© dĂšs 1872 par la mort de son dernier fils, François d’OrlĂ©ans, duc de Guise (1845-1872) Ă  l’ñge de dix-huit ans : ce n’est plus un palais qu’.Aumale fait reconstruire, mais un musĂ©e destinĂ© Ă  accueillir ses collections. De façon surprenante, on ne connaĂźt pas de photographies du chantier en cours.; on sait pourtant que la pierre de taille provenant des carriĂšres situĂ©es sous la Pelouse Ă©tait amenĂ©e par wagonnets au moyen d’un chemin de fer ceinturant les douves.

En 1884, alors que les travaux s’achĂšvent, le duc d’Aumale tombe gravement malade et reste alitĂ© prĂšs de six mois. Il dĂ©cide de lĂ©guer le chĂąteau de Chantilly et ses collections Ă  l’Institut de France dont il est membre depuis 1871, signe son testament le 3 juin 1884, et est Ă©lu Ă  l’acadĂ©mie des beaux-arts. Ce testament commence par ces mots : Le legs contient cependant de lourdes contraintes : il interdit de prĂȘter Ă  l’extĂ©rieur les collections du duc d’Aumale et d’en modifier la prĂ©sentation. Le duc d’Aumale va mĂȘme jusqu’à donner Ă  ses exĂ©cuteurs testamentaires le dĂ©tail des amĂ©nagements Ă  rĂ©aliser aprĂšs sa mort.

« Voulant conserver Ă  la France le domaine de Chantilly dans son intĂ©gritĂ© avec ses bois, ses pelouses, ses eaux, ses Ă©difices et tout ce qu’ils contiennent, trophĂ©es, tableaux, livres, archives, objets d’art, tout cet ensemble qui forme comme un monument complet et variĂ© de l’art français dans toutes ses branches et de l’histoire de ma patrie Ă  des Ă©poques de gloire, j’ai rĂ©solu d’en confier le dĂ©pĂŽt Ă  un corps illustre qui m’a fait l’honneur de m’appeler dans ses rangs Ă  un double titre et qui, sans se soustraire aux transformations inĂ©vitables des sociĂ©tĂ©s, Ă©chappe Ă  l’esprit de faction, comme aux secousses trop brusques, conservant son indĂ©pendance au milieu des fluctuations politiques. »

La photographie accompagne bien sĂ»r cette premiĂšre phase de la crĂ©ation du musĂ©e CondĂ©. Alors que le duc d’Aumale est Ă  la tĂȘte du 5e Corps d’ArmĂ©e Ă  Besançon, il se fait photographier en uniforme dit « petite tenue » par le photographe local Alfred Boname qui fait les portraits de groupes rĂ©gimentaires. Le dimanche 1er avril 1883, Aumale se rend Ă  Paris chez le « Photogr(aph)e Chalot, 18 rue Vivienne » selon son agenda. Ce dernier est le successeur de Franck, pour qui Aumale a posĂ© quelques annĂ©es auparavant.

Il existe deux portraits par Chalot du duc en uniforme, l’un en buste avec la grand-croix de la LĂ©gion d’honneur et l’autre en pied devant une tapisserie. Or le jeune photographe est cantilien d’origine : en tant qu’ « enfant de Chantilly.», Chalot photographie le chĂąteau reconstruit, dĂ©posant en 1885 et 1886 de nombreux clichĂ©s Ă  la BibliothĂšque nationale de France, et cherchant mĂȘme Ă  obtenir l’exclusivitĂ©. Chalot rĂ©alise une couverture photographique de Chantilly aprĂšs sa reconstruction et rĂ©pondait le 25 octobre 1886 : « Comme enfant de Chantilly et entiĂšrement dĂ©vouĂ© Ă  la Famille (comprenons : d’OrlĂ©ans), j’avais Ă  coeur de reproduire toutes les merveilles du ChĂąteau et grĂące Ă  la bienveillante obligeance de Son Altesse, j’ai pu accomplir en partie le programme que je m’étais tracĂ©. »

Chalot publie les photographies des vitraux de PsychĂ© provenant d’Écouen. Cependant, le duc d’Aumale avait aussi recours au photographe local.: l’.«.atelier de photographie » de Chantilly. P. Michelon, place de la Machine, avait dĂ©jĂ  fourni le 5 novembre 1879 des photos des vitraux de PsychĂ© pour 560 francs.



LE PREMIER AMÉNAGEMENT DU MUSÉE CONDÉ (1880-1886)

SitĂŽt le gros oeuvre construit, le duc d’Aumale commence l’installation de ses collections en liaison Ă©troite avec son architecte Daumet qui devient Ă©galement architecte d’intĂ©rieur et scĂ©nographe. Les rĂ©unions ont lieu sur place, ne donnant lieu Ă  aucun Ă©change Ă©crit entre les deux hommes, et laissent donc peu de traces dans les archives. Pour comprendre l’amĂ©nagement de Chantilly, il faut regarder les oeuvres, essayer de comprendre ce qu’elles reprĂ©sentaient pour le duc d’Aumale. Il a souhaitĂ© que son accrochage reste inchangĂ©, car pour lui il avait du sens : reflet de l’art et de l’histoire, il retrace surtout les origines du prince, attachĂ© Ă  la mĂ©moire des Montmorency et des CondĂ©. C’est une sorte de gĂ©nĂ©alogie illustrĂ©e, par exemple dans la Galerie de Peinture oĂč les tableaux italiens provenant de sa famille maternelle (sa mĂšre Marie-AmĂ©lie de Bourbon-Siciles, sa cousine germaine et Ă©pouse Marie- Caroline, son oncle le prince de Salerne) font face aux tableaux français illustrant l’histoire de France et en particulier celle des familles de CondĂ© et d’OrlĂ©ans : outre Gabrielle d’EstrĂ©es, Louis XV et Marie-Antoinette, on y voit les portraits des cardinaux-ministres Richelieu et Mazarin provenant du Palais-Royal, et les tableaux orientalistes Ă©voquant la colonisation de l’AlgĂ©rie sous Louis-Philippe par son frĂšre le Prince Royal et lui-mĂȘme (Vernet, Fromentin) ainsi que l’histoire militaire rĂ©cente (Meissonier pour le Premier Empire, Alphonse de Neuville pour la guerre de 1870). Cet accrochage est dense comme il est de rĂšgle Ă  l’époque : cadre contre cadre, les tableaux couvrent le mur du haut en bas de la cimaise. Le premier accrochage, conçu aprĂšs l’achĂšvement du chantier, de 1875 Ă  1885, est encore plus chargĂ© qu’aujourd’hui, car les salles dites du Logis, construites symboliquement Ă  l’emplacement de l’ancien appartement du roi au temps des princes de CondĂ© sous l’Ancien RĂ©gime, sont alors rĂ©servĂ©es Ă  l’appartement de l’hĂ©ritier du trĂŽne, son neveu le comte de Paris.



LES DERNIÈRES ANNÉES DU DUC D’AUMALE (1886-1897). LE SECOND EXIL (1886-1889) ET LA DONATION (1886)

En 1886, Ă  l’occasion du mariage de sa fille la princesse AmĂ©lie, petite-niĂšce du duc d’Aumale, avec l’hĂ©ritier du trĂŽne de Portugal, le comte de Paris donne des rĂ©ceptions d’un faste excessif, se comportant en quasi chef d’État. OffusquĂ©e d’une telle arrogance, la IIIe RĂ©publique exile alors les chefs des anciennes maisons rĂ©gnantes, ce qui ne concerne pas directement le duc d’Aumale, mais la loi d’exil retire aux princes de ces maisons leur grade militaire : cette mesure injuste atteint le prince qui a servi fidĂšlement la RĂ©publique depuis quinze ans. Il Ă©crit alors au prĂ©sident de la RĂ©publique une trĂšs belle lettre qu’il diffuse largement et dans laquelle il lui rappelle que « les grades militaires sont au-dessus de son pouvoir » et qu’il « reste le gĂ©nĂ©ral Henri d’OrlĂ©ans, duc d’Aumale ». Sans illusion sur les consĂ©quences de son geste, il quitte alors Chantilly, emportant avec lui ses deux petits panneaux de RaphaĂ«l, pour se rĂ©fugier dans sa propriĂ©tĂ© du Nouvion-en-ThiĂ©rache (Aisne) oĂč l’atteint le surlendemain la lettre d’expulsion : de lĂ , il passe en Belgique chez son neveu le roi des Belges, pensant ne plus jamais pouvoir revenir en France. Craignant la confiscation de ses biens privĂ©s et l’annexion de ses collections aux musĂ©es nationaux, il signe le 25 octobre 1886 une donation immĂ©diate sous rĂ©serve d’usufruit de Chantilly et de ses collections Ă  l’Institut de France. Il dĂ©cide alors de transformer le musĂ©e CondĂ© : son neveu le comte de Paris ne pouvant plus rentrer en France (les OrlĂ©ans devront attendre pour cela le gĂ©nĂ©ral de Gaulle dans la seconde moitiĂ© du XXe siĂšcle), il rĂ©amĂ©nage Ă  distance l’aile dite du Logis : cette aile avait Ă©tĂ© initialement construite par Daumet pour abriter les appartements du comte de Paris lĂ  oĂč symboliquement se trouvait l’appartement du roi au temps des Montmorency et des CondĂ©. Le duc fait alors amĂ©nager le cabinet de Clouet, la salle Caroline, ainsi nommĂ©e en l’honneur de sa dĂ©funte Ă©pouse, la salle Isabelle en l’honneur de sa niĂšce la comtesse de Paris, le salon d’OrlĂ©ans alors dĂ©diĂ© aux portefeuilles de dessins et d’estampes, le cabinet des antiques, la rotonde de la Minerve et enfin la salle de la Smalah oĂč le duc fait disposer par Daumet ses souvenirs militaires d’avant 1848.

Connus par la photographie, ces nouveaux amĂ©nagements resteront en place jusqu’à ce qu’au milieu du XXe siĂšcle les conservateurs du musĂ©e CondĂ©, alarmĂ©s de voir les dessins se dĂ©grader devant les atteintes de la lumiĂšre, ne les dĂ©crochent, remaniant l’accrochage. En 1889, l’Institut de France Ă©lit le duc d’Aumale Ă  l’acadĂ©mie des Sciences morales et politiques afin qu’il puisse rentrer en France : il est en effet de rĂšgle qu’un nouvel acadĂ©micien aille se prĂ©senter au prĂ©sident de la RĂ©publique. DĂ©sormais revenu chez lui, Aumale procĂšde Ă  ses derniĂšres grandes acquisitions : Le Concert champĂȘtre de Corot, puis les 40 Fouquet et le cassone des ScĂšnes de l’histoire d’Esther par Botticelli et Lippi, amĂ©nageant le Santuario pour les installer.

Dans ses derniĂšres annĂ©es, le duc recourt Ă  la photographie documentaire pour la reproduction d’oeuvres d’art. Le 15 mars 1887 Ă  Florence, il admire ainsi La Calomnie d’Apelle de Botticelli dont il pense possĂ©der le dessin prĂ©paratoire (en fait, une simple copie) et veut en acheter la photographie : « Il [lui] semble que la gravure le rend mal ». Collectionneur moderne, Aumale prĂ©fĂšre la photographie Ă  la gravure d’interprĂ©tation, jusqu’alors le mode de diffusion privilĂ©giĂ© des chefs-d’Ɠuvre.

En 1891 et 1892, le duc se prĂ©occupe de la reproduction photographique de ses collections et prend un premier contact le 30 juillet 1891 : « Visite aux galeries de Braun le photographe ». Les 6 avril et 6 mai 1892, le nom de Braun est associĂ© Ă  celui de son ami Gruyer qui lui conseille probablement d’avoir recours Ă  cette sociĂ©tĂ© en plein dĂ©veloppement.: «.Gruyer et les photographies Braun », « Gruyer et Braun photographies ». Le 12 septembre 1892, il note seulement : «.Braun photographe » et fait reproduire ses tableaux par le fameux procĂ©dĂ© inaltĂ©rable au charbon.

Les photographies les plus personnelles du duc d’Aumale datent de la fin de sa vie. Le duc d’Aumale partage dĂ©sormais sa vie entre Chantilly et Paris oĂč il loue un appartement rue Montalivet, se rend au printemps en Sicile dans ses trois rĂ©sidences : le palais d’OrlĂ©ans, les entrepĂŽts de Terrasini et la propriĂ©tĂ© viticole du Zucco. C’est peut-ĂȘtre en Sicile que sont rĂ©alisĂ©es les plus Ă©mouvantes photographies du duc, dans des lieux qui lui sont chers et oĂč il reçoit des personnalitĂ©s comme l’impĂ©ratrice EugĂ©nie ou son neveu le roi Ferdinand de Bulgarie. C’est au Zucco qu’il meurt d’une crise cardiaque le 7 mai 1897 avant d’ĂȘtre enseveli Ă  Dreux dans la chapelle funĂ©raire des OrlĂ©ans.