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“Pionniùres“
Artistes dans le Paris des Années folles

au Musée du Luxembourg, Paris

du 2 mars au 10 juillet 2022

Musée du Luxembourg


Interview de Camille Morineau, conservatrice du Patrimoine et directrice d’AWARE : Archives of WOmen Artists, Research and Exhibitions et de Lucia Pesapane, historienne de l’art, commissaires de l'exposition, par Anne-FrĂ©dĂ©rique Fer, Ă  Paris, le 28 fĂ©vrier 2022, durĂ©e 15’26. © FranceFineArt.

PODCAST –  Interview de Camille Morineau, conservatrice du Patrimoine et directrice d’AWARE : Archives of WOmen Artists, Research and Exhibitions et de Lucia Pesapane, historienne de l’art, commissaires de l’exposition,

par Anne-FrĂ©dĂ©rique Fer, Ă  Paris, le 28 fĂ©vrier 2022, durĂ©e 15’26.
© FranceFineArt.

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©Anne-Fréderique Fer, vernissage presse, le 28 février 2022.

Texte de Sylvain Silleran




Marie Vassilieff, L’Architecte pour la piĂšce «Le Chateau du Roi», Théùtre du Bourdon, 1928. Tissu, carton peint et bois collection particuliĂšre. © Marie Vassilieff / photo Galerie du Passage - David Atlan.
Marie Vassilieff, L’Architecte pour la piĂšce «Le Chateau du Roi», Théùtre du Bourdon, 1928. Tissu, carton peint et bois collection particuliĂšre. © Marie Vassilieff / photo Galerie du Passage – David Atlan.
Tarsila Do Amaral, La famille, 1925. Huile sur toile, 79 x 101,5 cm. Espagne, Madrid, Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofia. © Tarsila do Amaral Licenciamentos / photo Photographic Archives Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía, Madrid.
Tarsila Do Amaral, La famille, 1925. Huile sur toile, 79 x 101,5 cm. Espagne, Madrid, Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofia. © Tarsila do Amaral Licenciamentos / photo Photographic Archives Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofía, Madrid.
Tamara de Lempicka, Perspective ou Les Deux Amies, 1923. Huile sur toile, 130 x 160 cm. Suisse, GenÚve, Association des Amis du Petit Palais. ©Tamara de Lempicka Estate, LLC / Adagp, Paris, 2022 - photo Association des Amis du Petit Palais, GenÚve / Studio Monique Bernaz, GenÚve.
Tamara de Lempicka, Perspective ou Les Deux Amies, 1923. Huile sur toile, 130 x 160 cm. Suisse, GenĂšve, Association des Amis du Petit Palais. ©Tamara de Lempicka Estate, LLC / Adagp, Paris, 2022 – photo Association des Amis du Petit Palais, GenĂšve / Studio Monique Bernaz, GenĂšve.
Romaine Brooks, Au bord de la mer, 1912. Huile sur toile, 105 x 68 cm. Musée franco-américain du chĂąteau de Blérancourt / dĂ©pĂŽt du Centre Pompidou, MusĂ©e national d’Art moderne / Centre de crĂ©ation industrielle, Paris. © The Romaine Brooks Estate # Pascal Alcan Legrand / photo Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. Rmn-Grand Palais / GĂ©rard Blot.
Romaine Brooks, Au bord de la mer, 1912. Huile sur toile, 105 x 68 cm. Musée franco-américain du chĂąteau de Blérancourt / dĂ©pĂŽt du Centre Pompidou, MusĂ©e national d’Art moderne / Centre de crĂ©ation industrielle, Paris. © The Romaine Brooks Estate # Pascal Alcan Legrand / photo Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. Rmn-Grand Palais / GĂ©rard Blot.

De Montparnasse Ă  Montmartre, tout le monde fredonne Elle s’était fait couper les ch’veux de DrĂ©an. Il s’agit, nous explique un grand panneau, de « remise en cause du modĂšle patriarcal« . Heureusement, les avant-gardes fĂ©minines de l’entre deux guerres ont beaucoup plus de panache, d’ambition et de grandeur. Autour des Librairies d’Adrienne Monnier et de Sylvia Beach, de l’AcadĂ©mie Vassilieff c’est tout un bouleversement artistique qui fleurit dans Paris. Les dialogues de Marlow Moss avec Mondrian font se croiser lignes et doubles lignes, IrĂšne Codreanu cĂ©lĂšbre la nouvelle mode des garçonnes par une tĂȘte sculptĂ©e de Daria Gamsaragan, droite, fiĂšre, fuselĂ©e. Les petites nostalgies de Rita Kernn-Larsen sont de douces aquarelles un peu fleuries, abstraites, des poĂ©sies d’une gĂ©omĂ©trie du rĂȘve.



La mode se saisit de cette modernitĂ©, Marie Laurencin peint une Mademoiselle Chanel en nymphe, une peinture libre, indĂ©pendante. Une magnifique robe de Sarah Lipska semble sculptĂ©e comme un bijou dans un bloc de bronze. Le costume rĂ©trĂ©cit pour devenir habit de poupĂ©e, de marionnette. Au petit théùtre de Marie Vassilieff, anges et musiciens, Ăąne et architecte, Saint François d’Assise fusionnent mode, design, peinture. Alice Halicka fabrique des petites scĂšnes en mĂ©langeant papiers dĂ©coupĂ©s et collĂ©s, tissus cousus, fil et rubans. Un couple aux courses, une famille Ă  la plage, ces tableaux s’affranchissent de tous les codes de la reprĂ©sentation, ils sont un art direct, populaire, mĂ©langeant avec un bonheur simple le folklore et le chic, la dĂ©coration et le jouet.



Les reprĂ©sentations de la femme changent. Suzanne Valadon propose une odalisque au corps solide, rustique, dĂ©sinvolte, en pyjama et la clope au bec, elle contemple un instant quelques livres Ă  ses pieds. Cette pause ne dure pas bien longtemps, car dans cette Ă©poque folle, tout s’accĂ©lĂšre comme une danse de JosĂ©phine Baker. Son sourire Ă©claire tout Paris de sa joie et de la promesse que demain sera mieux, plus moderne, plus joyeux, et avec style! La scĂ©nographie confronte avec bonheur les points de vue les plus opposĂ©s : une mĂšre et son enfant de Tamara de Lempicka, dĂ©licate et soyeuse comme une icĂŽne fait face aux maternitĂ©s de Maria Blanchard, ses femmes robustes comme des locomotives, forgĂ©es dans un acier industriel. Le nu debout de Natalia Gontcharova, terrestre, oppose son ocre de glaise Ă  la femme couchĂ©e de Jacqueline Marval, papillonnante, aĂ©rienne, dĂ©ployant de longues plumes roses. 



Les sculptures rondes, noires, lisses de Chana Orloff sont douces et maternelles comme des galets attendris par des siĂšcles de marĂ©es. A l’opposĂ©, le nu surrĂ©aliste de Marie Vassilieff, si garçonne qu’elle devient un homme Ă©trange, s’est assis dĂ©libĂ©rĂ©ment entre les deux genres. Car tout se mĂ©lange, les genres et les sexualitĂ©s s’envolent dans une effervescence de champagne. Mela Muter peint une femme qui s’abandonne librement, dĂ©tournant le cubisme pour rĂ©intĂ©grer sa fĂ©minitĂ©. Tamara de Lempicka caresse les courbes sensuelles d’une amante alanguie, sa chair est lissĂ©e jusqu’Ă  ce que son corps devienne l’incarnation de la modernitĂ©, du mouvement, la carrosserie d’un bolide lancĂ© Ă  toute allure. Gerda Wegener avec les portraits de Lily, son mari transsexuel, ouvre le champ de la transition d’un sexe Ă  l’autre. Une transition souriante, tendre et fleurie mais dont le regard parfois mĂ©lancolique trahit le courage. Tout semble dĂ©sormais possible, les lendemains chantent dĂ©jĂ .



Tout irait pour le mieux si le cahier des charges idĂ©ologique ne dĂ»t ĂȘtre respectĂ© Ă  la lettre comme un bon devoir universitaire. « La diversité », le mot-clĂ© est lĂąchĂ©. Puisque ces parisiennes s’Ă©mancipent il faut bien trouver plus opprimĂ©es qu’elles, quoi de mieux qu’un voyage en Afrique, en AmĂ©rique du Sud? Les voyages de Lucie Cousturier, les tĂȘtes sculptĂ©es de Anna Quinquaud sont de belles Ɠuvres, mais elle nous emmĂšnent dans le documentaire anthropologique, tout comme la peinture naĂŻve de Tarsila Do Amaral et son folklore brĂ©silien. Le soufflĂ© qui Ă©tait si bien montĂ© retombe. Nous voilĂ  loin de Paris, loin des AnnĂ©es folles, loin de cette danse qui emporta un instant le monde dans un rĂȘve de bonheur et de progrĂšs. Rendez-nous JosĂ©phine! Tamara! Suzy Solidor! C’Ă©tait mieux avant !


Sylvain Silleran


Extrait du communiqué de presse :




Maria Blanchard, Maternité, 1922. Huile sur toile, 117 x 73 cm. Suisse, GenÚve, Association des Amis du Petit Palais. © Association des Amis du Petit Palais, GenÚve / Studio Monique Bernaz, GenÚve.
Maria Blanchard, Maternité, 1922. Huile sur toile, 117 x 73 cm. Suisse, GenÚve, Association des Amis du Petit Palais. © Association des Amis du Petit Palais, GenÚve / Studio Monique Bernaz, GenÚve.
Marcelle Cahn, Composition abstraite, 1925. Huile sur toile, 72,4 x 49,7. Musée de Grenoble. © Droits réservés / photo Ville de Grenoble /Musée de Grenoble, J.L. Lacroix.
Marcelle Cahn, Composition abstraite, 1925. Huile sur toile, 72,4 x 49,7. Musée de Grenoble. © Droits réservés / photo Ville de Grenoble /Musée de Grenoble, J.L. Lacroix.
Suzanne Valadon, Jeune femme aux bas blancs, 1924. Huile sur toile, 73 x 60 cm. Nancy, Musée des Beaux-Arts. © musée des Beaux-Arts, Nancy / photo G. Mangin.
Suzanne Valadon, Jeune femme aux bas blancs, 1924. Huile sur toile, 73 x 60 cm. Nancy, Musée des Beaux-Arts. © musée des Beaux-Arts, Nancy / photo G. Mangin.
Claude Cahun, Autoportrait, 1929. Tirage sur papier au gĂ©latino-bromure d’argent brillant France, Nantes, musĂ©e d’Arts de Nantes. © Droits rĂ©servĂ©s / photo RMN-Grand Palais / GĂ©rard Blot.
Claude Cahun, Autoportrait, 1929. Tirage sur papier au gĂ©latino-bromure d’argent brillant France, Nantes, musĂ©e d’Arts de Nantes. © Droits rĂ©servĂ©s / photo RMN-Grand Palais / GĂ©rard Blot.

Commissariat gĂ©nĂ©ral : Camille Morineau, Conservatrice du Patrimoine et directrice d’AWARE : Archives of WOmen Artists, Research and Exhibitions

Commissaire associĂ©e : Lucia Pesapane, historienne de l’art




TrĂšs longtemps marginalisĂ©es et discriminĂ©es tant dans leur formation que dans leur accĂšs aux galeries, aux collectionneurs et aux musĂ©es, les artistes femmes de la premiĂšre moitiĂ© du XXeme siĂšcle ont nĂ©anmoins occupĂ© un rĂŽle primordial dans le dĂ©veloppement des grands mouvements artistiques de la modernitĂ© sans pour autant ĂȘtre reconnues de leur vivant en tant que telles. Ce n’est que rĂ©cemment que leur rĂŽle dans les avant-gardes est explorĂ© : de fait il est Ă  prĂ©voir que lorsque le rĂŽle de ces femmes sera reconnu Ă  leur juste valeur, ces mouvements seront profondĂ©ment changĂ©s. Cette exposition nous invite Ă  les rĂ©inscrire dans cette histoire de l’art en transformation : du fauvisme Ă  l’abstraction, en passant par le cubisme, Dada et le SurrĂ©alisme notamment, mais aussi dans le monde de l’architecture, la danse, le design, la littĂ©rature et la mode, tout comme pour les dĂ©couvertes scientifiques. Leurs explorations plastiques et conceptuelles tĂ©moignent d’audace et de courage face aux conventions Ă©tablies cantonnant les femmes Ă  certains mĂ©tiers et stĂ©rĂ©otypes. Elles expriment de multiples maniĂšres la volontĂ© de redĂ©finir le rĂŽle des femmes dans le monde moderne. Les nombreux bouleversements du dĂ©but du XXeme siĂšcle voient s’affirmer certaines grandes figures d’artistes femmes. Elles se multiplient aprĂšs la rĂ©volution russe et la PremiĂšre Guerre mondiale qui accĂ©lĂšrent la remise en cause du modĂšle patriarcal pour des raisons pratiques, politiques et sociologiques. Les femmes gagnent en pouvoir et visibilitĂ© et les artistes vont donner Ă  ces pionniĂšres le visage qui leur correspond.



Un siĂšcle aprĂšs, il est temps de se remĂ©morer ce moment exceptionnel de l’histoire des artistes femmes. Les annĂ©es 1920 sont une pĂ©riode de bouillonnement et d’effervescence culturelle, d’oĂč sera tirĂ© le qualificatif d’annĂ©es folles. Synonymes de fĂȘtes, d’exubĂ©rance, de forte croissance Ă©conomique, cette Ă©poque est aussi le moment du questionnement de ce que l’on appelle aujourd’hui les «rĂŽles de genre», et de l’invention ainsi que de l’expĂ©rience vĂ©cue d’un «troisiĂšme genre». Un siĂšcle avant la popularisation du mot «queer», la possibilitĂ© de rĂ©aliser une transition ou d’ĂȘtre entre deux genres, les artistes des annĂ©es 20 avaient dĂ©jĂ  donnĂ© forme Ă  cette rĂ©volution de l’identitĂ©.



La crise Ă©conomique, la montĂ©e des totalitarismes, puis la Seconde Guerre mondiale vont Ă  la fois restreindre la visibilitĂ© des femmes, et faire oublier ce moment extraordinaire des annĂ©es 20 oĂč elles avaient eu la parole. L’euphorie avant la tempĂȘte se joue surtout dans quelques capitales oĂč Paris tient un rĂŽle central, et plus prĂ©cisĂ©ment les quartiers latin, de Montparnasse et de Montmartre.



L’exposition PionniĂšres. Artistes dans le Paris des AnnĂ©es folles prĂ©sente 45 artistes travaillant aussi bien la peinture, la sculpture, le cinĂ©ma, que des techniques/catĂ©gories d’objets nouvelles (tableaux textiles, poupĂ©es et marionnettes). Des artistes connues comme Suzanne Valadon, Tamara de Lempicka, Marie Laurencin cĂŽtoient des figures oubliĂ©es comme Mela Muter, Anton Prinner, Gerda Wegener. Ces femmes viennent du monde entier, y compris d’autres continents oĂč certaines exporteront ensuite l’idĂ©e de modernitĂ© : comme Tarsila Do Amaral au BrĂ©sil, Amrita Sher Gil en Inde, ou Pan Yuliang en Chine.



AprĂšs les “femmes nouvelles” du XIXeme siĂšcle liĂ©es Ă  la photographie, ces « nouvelles Eves », sont les premiĂšres Ă  avoir la possibilitĂ© d’ĂȘtre reconnues comme des artistes, de possĂ©der un atelier, une galerie ou une maison d’édition, de diriger des ateliers dans des Ă©coles d’art, de reprĂ©senter des corps nus, qu’ils soient masculins ou fĂ©minins, et d’interroger ces catĂ©gories de genre. Les premiĂšres femmes Ă  avoir la possibilitĂ© de vivre leur sexualitĂ©, quelle qu’elle soit, de choisir leur Ă©poux, de se marier ou pas et de s’habiller comme elles l’entendent. Leur vie et leur corps, dont elles sont les premiĂšres Ă  revendiquer l’entiĂšre propriĂ©tĂ©, sont les outils de leur art, de leur travail, qu’elles rĂ©inventent dans tous les matĂ©riaux, sur tous les supports. L’interdisciplinaritĂ© et la performativitĂ© de leur crĂ©ation ont influencĂ© et continue d’influencer des gĂ©nĂ©rations entiĂšres d’artistes.




Exposition organisĂ©e par la RĂ©union des musĂ©es nationaux – Grand Palais.

Organisation spatiale en neuf chapitres





L’exposition se veut aussi foisonnante que ces annĂ©es 1920, convoque artistes et femmes de l’art, amazones, mĂšres, androgynes Ă  leurs heures et rĂ©volutionnaires presque toujours, qu’elle rassemble dans neuf chapitres thĂ©matiques Dans certaines salles/chapitres une sĂ©lection d’extraits de films, chansons, partitions, romans, revues Ă©voquent les grands personnages fĂ©minins dans les domaines du sport, de la science, de la littĂ©rature, de la mode.


En introduction, « Les femmes sur tous les fronts » examine comment la guerre a promu les femmes engagĂ©es volontaires comme infirmiĂšres au front, mais aussi remplaçant les hommes dĂ©cimĂ©s par une guerre meurtriĂšre partout oĂč leur prĂ©sence Ă©tait nĂ©cessaire.


Pourquoi Paris? Paris, c’est la ville des AcadĂ©mies privĂ©es oĂč les femmes sont bienvenues ; la ville des librairies d’avant-garde, des cafĂ©s oĂč les artistes croisent les poĂštes et romanciers dont les livres sont traduits et diffusĂ©s dans des librairies uniques au monde, oĂč le cinĂ©ma expĂ©rimental s’invente
. Tous ces lieux sont tenus ou remplis, par des femmes ; elles sont dans toutes les avant-gardes et toutes les formes d’abstraction. Comment les avant-gardes se conjuguent au fĂ©minin.


Pour ces femmes libĂ©rĂ©es et autonomes, Vivre de son art est un impĂ©ratif essentiel : elles dĂ©veloppent des ponts entre l’art et les arts appliquĂ©s, la peinture et la mode, inventent des espaces intĂ©rieurs et des architectures ou mĂȘme des dĂ©cors de théùtre, et enfin inventent de nouvelles typologies d’objet comme des poupĂ©es/portraits, des marionnettes/sculptures, des tableaux en textile. Sonia Delaunay aura sa boutique ainsi que Sarah Lipska.


Non contentes de rĂ©inventer le mĂ©tier d’artiste, elles se saisissent du temps de loisir et reprĂ©sentent le corps musclĂ©, sous le soleil, voire sportif, transformant le sport masculin en un Ă©quivalent fĂ©minin Ă  la fois Ă©lĂ©gant, ambitieux et dĂ©contractĂ©, inventant ce qui deviendra un poncif du XXIeme siĂšcle. La garçonne dĂ©couvre les joies de ne rien faire au soleil (l’hĂ©liothĂ©rapie), s’inscrit aux Jeux Olympiques ou promeut son cĂ©lĂšbre nom grĂące Ă  des produits dĂ©rivĂ©s, pratiquant aussi bien le music hall la nuit, que le golf la journĂ©e : elle s’appelle JosĂ©phine Baker.


Tandis que le corps se dĂ©ploie librement sous le soleil dans des poses nouvelles, il se rĂ©invente aussi Chez soi, sans fard. Ces odalisques modernes se reprĂ©sentent dans leurs intĂ©rieurs avec naturalisme. Plus besoin de paraĂźtre ni de faire semblant : la maternitĂ© peut-ĂȘtre ennuyeuse et fatigante ; les poses de nues excentriques, le dĂ©shabillage une Ă©chappatoire aux diktats du regard du monde.


Ainsi s’élabore dans les annĂ©es 20 ce nouveau point de vue complexe et informĂ© de femmes Ă©duquĂ©es et ambitieuses, dĂ©terminĂ©es Ă  reprĂ©senter le monde telles qu’elles le voient, Ă  commencer par leur corps. C’est lĂ  que leur regard s’affute, se mesure au passĂ©, rĂȘve un autre futur. Le female gaze des annĂ©es 20 s’emploie Ă  reprĂ©senter le corps autrement.


Parmi les tropes que ces annĂ©es folles inventent et surtout mettent en pratique au grand jour, celui des « deux amies » dĂ©crit une amitiĂ© forte entre deux femmes sans la prĂ©sence d’hommes, ou une histoire d’amour, ou un mĂ©lange d’amitiĂ© et de dĂ©sir qui permet aux femmes une bisexualitĂ© assumĂ©e. Les deux amies sont une invention des annĂ©es 20 que la peinture, la littĂ©rature et la sociĂ©tĂ© cosmopolite vont reprĂ©senter, accueillir et dont elles transmettront la mĂ©moire.


Ni les garçonnes qui succombent Ă  la mode de se couper les cheveux, ni les amazones qui ne dĂ©daignent pas d’endosser des costumes masculins, ni les travestis occasionnels ou bals masquĂ©s courants, ne recouvrent l’essentielle Ă©mergence d’un « troisiĂšme genre », ancĂȘtre de notre fluiditĂ© des genres et en particulier de la possibilitĂ© de ne pas s’en assigner.


Pour conclure, l’exposition rappellera que ces artistes furent aussi des voyageuses : d’un continent Ă  l’autre pour se former et lancer des avant-gardes dans leur pays ; ou exploratrices de pays inconnus, ou peintres et sculpteuses Ă  la dĂ©couverte d’un « autre » dont elles tentent de saisir l’identitĂ© sans les poncifs du regard colonial. Ces PionniĂšres de la diversitĂ© souffraient de l’invisibilitĂ© dans leur pays : elles Ă©taient Ă  mĂȘme de comprendre d’autres identitĂ©s mises Ă  l’écart : elles ont beaucoup Ă  nous apprendre.