🔊 “Bourdelle devant Beethoven” au MusĂ©e Bourdelle, Paris, du 19 septembre 2020 au 17 janvier 2021 (prolongĂ©e jusqu’au 12 dĂ©cembre 2021)
“Bourdelle devant Beethoven”Â
au Musée Bourdelle, Paris
du 19 septembre 2020 au 17 janvier 2021 (prolongĂ©e jusqu’au 12 dĂ©cembre 2021)
PODCAST – Interview de Colin Lemoine, responsable des sculptures et commissaire de l’exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 18 septembre 2020, durée 15’36, © FranceFineArt.
© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 18 septembre 2020.
Extrait du communiqué de presse :
Commissaire :
Colin Lemoine, responsable des sculptures
Commissaires associés :
Claire Boisserolles, responsable du service de la documentation, des archives et des bibliothèques
StĂ©phane Ferrand, responsable du cabinet d’arts graphiques et du fonds de photographies
En 2020, Ludwig van Beethoven (1770-1827) aura vu le jour il y a tout juste 250 ans. Un quart de millénaire. Cet anniversaire donne lieu à de nombreuses commémorations européennes, en Allemagne comme en France. Le musée Bourdelle se saisit de cette occasion pour célébrer l’année Beethoven avec un nouvel accrochage. Antoine Bourdelle est assurément l’un des artistes ayant été le plus influencé par la musique, mais aussi par la figure – au sens physique et symbolique –, du compositeur allemand. Fondée sur une identification, cette hantise se traduit par un corpus pléthorique d’oeuvres hétérogènes : Bourdelle a réservé quelque quatre-vingts sculptures à Beethoven, mais aussi une vingtaine de dessins et de photographies.
Le visiteur sera immergé dans deux atmosphères différentes : l’une, claire et lumineuse, le confrontera aux multiples visages sculptés de Beethoven, conçus par Bourdelle comme autant de variations autour d’une face maudite, d’une intériorité souveraine ; l’autre, sombre et dramatique, tentera d’exposer les modalités et les sources de cette incorporation, mais aussi de faire dialoguer sculptures, photographies et dessins afin de pénétrer les secrets et les subtilités de cette identification majeure. Beethoven fut pour Bourdelle plus qu’un père, un frère, un double spéculaire, un compagnon de route dont le chemin déjà sillonné sut lui montrer la voie, à l’heure des doutes et des joies.
Beethoven est un artiste total, maudit, frappé par une surdité que console et sublime une musique enfiévrée. Avec lui, depuis lui, les créateurs auscultent les passions intimes et les noirs profonds, les tourments et les visions, la joie électrique comme l’angoisse métaphysique. Cet avènement du sensible, qui préfigure le romantisme puis bientôt l’expressionnisme, obsède les peintres comme les sculpteurs, tous ces explorateurs de l’âme qui, de l’Autriche au Japon, de la Suède aux États-Unis, revendiquent sans exception la tutelle esthétique du compositeur.
Sous le signe de Beethoven, et notamment de son masque pris « sur le vif » – ce moulage fascinant, réalisé sur le visage du compositeur de son vivant –, les artistes cherchent leur voie, souvent intérieure. Dès ses années de formation toulousaines, alors qu’il n’a pas vingt ans, Antoine Bourdelle (1861-1929) découvre la musique de Beethoven et s’identifie tôt à « l’âme du maître », auquel l’apparentent sa coiffure tempétueuse, sa face sombre et ses hautes aspirations.
Si le sculpteur sacrifie parfois aux mondanités pour aller au concert, il confie écouter Beethoven « pleinement de mémoire », loin de « l’audition constante », préférant l’approcher par les lectures, les croquis, les photographies et, plus encore, les quelque quatre-vingts effigies sculptées du compositeur qu’il réalise de 1888 jusqu’à 1929, l’année de sa mort, comme autant de variations autour d’un leitmotiv entêtant.
Peuplé de sculptures, de photographies, de dessins et d’archives, l’accrochage illustre l’histoire d’une obsession, peut-être même d’une filiation, si l’on veut bien relire l’aveu de Bourdelle lui-même : « À mon tour, avec une préméditation tenace, j’ai pris la parole après lui. »