🔊 “Secrets de beauté” à la Maison de la culture du Japon, Paris, Second volet de l’exposition, avec un nouvel accrochage d’estampes du 19 mai au 10 juillet 2021
“Secrets de beauté” Maquillage et coiffures de l’Ă©poque Edo dans les estampes japonaises
Ă la Maison de la culture du Japon, Paris
du 7 octobre 2020 au 6 fĂ©vrier 2021 (prolongĂ©e jusqu’au 6 mars 2021)
Second volet de l’exposition, avec un nouvel accrochage d’estampes du 19 mai au 10 juillet 2021
PODCAST – Interview de Philippe Achermann, chargĂ© de communication Ă la Maison de la culture du Japon,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 6 octobre 2020, durée 14’37, © FranceFineArt.
© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 6 octobre 2020.
Extrait du communiqué de presse :
Commissariat de l’exposition :
POLA Research Institute of Beauty & Culture
Du 07 octobre 2020 au 06 fĂ©vrier 2021, la Maison de la culture du Japon Ă Paris prĂ©sente « Secrets de beautĂ©. Maquillage et coiffures de l’Ă©poque Edo dans les estampes japonaises », une exposition inĂ©dite rĂ©unissant près de 150 estampes* et 60 objets permettant de mieux connaĂ®tre la pratique du maquillage, de la coiffure et les canons de la beautĂ© Ă l’époque Edo (1603 – 1868).
Cette exposition est organisée en collaboration avec le POLA Research Institute of Beauty & Culture, institut japonais qui, depuis plus de quarante ans, effectue des recherches et collectionne des estampes sur l’art du maquillage au Japon et en Occident, de l’Antiquité à nos jours.
Le riche parcours présenté à la MCJP invite les visiteurs à porter un nouveau regard sur les estampes japonaises, à en comprendre les détails par le prisme d’une thématique aussi originale que féminine : les secrets de beauté.
Portraits de belles femmes (bijin-ga) aux maquillages et coiffures d’une grande diversitĂ©, scènes de femmes Ă leur toilette, ou encore reprĂ©sentations fidèles d’ustensiles de maquillage… toutes ces estampes sont minutieusement dĂ©cryptĂ©es et tĂ©moignent de l’importance sociale du maquillage dans le Japon d’Edo. De nombreux pinceaux, poudriers, miroirs, peignes et autres Ă©pingles Ă cheveux – rĂ©ellement utilisĂ©s Ă l’époque Edo – sont Ă©galement exposĂ©s aux cĂ´tĂ©s de perruques miniatures aux formes complexes.
Blanc, noir, rouge : le maquillage de l’époque Edo se compose principalement de ces trois couleurs. Exhiber une peau d’une blancheur immaculée étant un point crucial pour les femmes, de la poudre blanche est toujours appliquée sur le visage, le cou et la nuque. Le noir est lié aux rites de passage. Si les femmes du peuple se teignent les dents de noir une fois mariées et se rasent les sourcils à la naissance de leur premier enfant, dans la noblesse de cour et l’aristocratie guerrière, passé un certain âge, elles redessinent leurs sourcils en haut du front. Quant au rouge, rare et précieux, il se pose avec parcimonie sur les lèvres et les joues.
L’art sophistiqué de la coiffure connaît son apogée à l’époque Edo. Les styles de chignons se diversifient rapidement, au point qu’on en aurait compté jusqu’à plusieurs centaines ! Parallèlement se développent les ornements de cheveux qui égaient les chevelures. Tout comme le maquillage, les coiffures sont des indicateurs d’âge, de classe sociale, de statut matrimonial ou encore de profession.
Dans la société hiérarchisée de l’époque Edo, les femmes ne peuvent choisir librement leur maquillage ou leur coiffure. Mais l’inventivité dont elles font preuve sont à l’origine d’un art diversifié de la toilette, l’une des plus belles occasions de se parer magnifiquement étant la cérémonie de mariage.
*En raison de la fragilité des estampes, leur présentation sera entièrement renouvelée et se fera en deux temps : 1er volet : 07 octobre – 28 novembre 2020 et 2e volet : 03 décembre 2020 – 06 février 2021
Le parcours
L’exposition de la MCJP est une véritable plongée dans l’intimité et les rituels de beauté des femmes de l’époque Edo et permet de découvrir à travers 4 chapitres thématiques des pratiques et des traditions qui ont parfois encore un écho dans la société japonaise actuelle.
1. Femmes se maquillant – blanc, noir, rouge
Le maquillage de l’époque Edo, plus basique qu’aujourd’hui, se composait principalement de trois couleurs : blanc, noir et rouge. La poudre blanche pour la peau, le noir pour teindre les dents et tracer les sourcils, le rouge pour les lèvres et les joues.
Exhiber un teint le plus blanc possible était un point crucial pour les femmes de cette époque. La blancheur était en effet considérée comme la condition première de la beauté d’une femme. «La blancheur de la peau cache sept défauts»disait un adage célèbre. Les poudres contenaient soit du plomb soit du mercure, et on les faisait fondre dans de l’eau avant de les appliquer au doigt ou au pinceau sur le visage, le cou, la nuque, la poitrine.
Le noir, quant à lui, était profondément lié aux rites de passage de l’existence féminine. Lesfemmes du peuple se teignaient les dents de noir aux alentours du mariage et se rasaient les sourcils quand elles avaient eu un enfant. Dents teintes en noir et sourcils rasés symbolisaient le statut de femme mariée. Dans les classes supérieures en revanche, dans l’aristocratie impériale et la noblesse guerrière, les femmes se rasaient les sourcils une fois parvenues à un certain âge, et l’étiquette voulait qu’elles en redessinent alors la ligne sur la partie supérieure du front.
Le rouge était la seule manifestation de féminité éclatante dans le maquillage d’Edo. Outre son utilisation pour le rouge à lèvres et à joues, il servait parfois aussi à rehausser le coin des yeux ou les ongles. ongles. Extrait en quantités infinitésimales de la fleur de carthame des teinturiers, c’était un produit rare et extrêmement précieux.
2. Femmes à leur coiffure – styles de chignons et ornements de cheveux
L’époque Edo marque un tournant important dans la coiffure des femmes. Depuis Heian (794-1185), elles laissaient traditionnellement pendre leur longue chevelure dans le dos, mais les danseuses de kabuki et les femmes de plaisir commencent à relever et nouer leurs cheveux dès la fin de l’époque Azuchi-Momoyama (1573-1603). Sous Edo, le chignon devient la norme. L’évolution des techniques voit les variations de style se multiplier considérablement : les différents chignons de l’époque Edo se compteraient par centaines. Nihon-gami, terme utilisé aujourd’hui pour désigner la « coiffure japonaise » (par opposition à la « coiffure occidentale »), se réfère à cet art de la coiffure né sous Edo.
La coiffure japonaise comprend quatre parties : frange (maegami), coques sur les côtés (bin), languette allant de l’arrière de la tête jusqu’à la nuque (tabo) et cheveux attachés enroulés en chignon (mage), dont les formes et l’équilibre se modifient en fonction des modes de l’époque.
Les quatre types de chignons de base qui traversent toute la période Edo – hyôgo-mage, shimada-mage, katsuyama-mage et kôgai-mage – répondaient à des règles fixes en fonction notamment de la classe et du rang social, de l’âge, de statut matrimonial, ou encore de la région géographique. Parallèlement à la diversification des coiffures se développent les ornements de cheveux – peignes, piques et épingles. Ces objets élaborés, utilisant des matériaux tels que l’or, l’argent, l’ivoire, l’écaille de tortue, le bois ou la nacre, viennent égayer le noir des chevelures.
3. Statut social et toilette de mariée
Cette section revient sur les règles strictes en matière de maquillage, de coiffure et d’habillement dans une société divisée en classes. Elle permet au visiteur d’apprendre à distinguer une femme mariée d’une jeune fille, une noble d’une bourgeoise ou d’une courtisane de haut rang.
La société de l’époque Edo repose entièrement sur un système hiérarchique de classes. Elle abonde en règles diverses dépendant de la couche sociale et du rang, ainsi que de l’âge, de la profession, des étapes de la vie, si bien que les femmes ne peuvent choisir librement leur maquillage ou leur coiffure. La mode ne sert pas seulement à se divertir ou rivaliser d’élégance, elle a une fonction de marquage social qui permet de distinguer le statut d’un individu.
Mais, aussi strict soit-il, ce système n’a pas raison de l’attrait pour la beauté, et l’esprit et l’inventivité dont les femmes font preuve dans le but de concilier règles sociales et élégance, seront à l’origine d’un art diversifié de la toilette.
L’une des plus belles occasions de se parer magnifiquement est la cérémonie de mariage. À une époque où maquillage et coiffure différencient nettement la jeune fille nubile de l’épouse, le mariage est non seulement une cérémonie mémorable, mais un changement de statut marquant dans la vie d’une femme. Le shiromuku, costume entièrement blanc caractéristique de la toilette de mariée, représente le devoir de la mariée d’adopter dorénavant les « couleurs » de la famille de son époux : le seul moment de son existence où une femme est autorisée à porter cette toilette est celui où elle change de statut, passant de celui de célibataire à celui d’épouse.
4. Les cent beautés d’Edo
Les trois séries d’estampes réunies dans la dernière section – Cent belles femmes et sites célèbres d’Edo, Le Gynécée du château de Chiyoda et Trente-deux physionomies d’aujourd’hui – représentent la femme japonaise de l’époque Edo dans son incroyable diversité : femmes du petit peuple, courtisanes, servantes de palais ou encore filles de seigneurs incarnent un style de beauté différent. Les maîtres de l’estampe qui ont signé ces oeuvres font pénétrer le spectateur dans de multiples scènes de la vie quotidienne et subliment par leur talent la beauté et l’élégance de ces femmes.
Parmi les estampes ukiyo-e, les soroimono, séries d’impressions sur un même thème, font figure de genre reconnu. La série des Cent belles femmes et sites célèbres d’Edo d’Utagawa Toyokuni III (1786-1864), aboutissement de l’oeuvre de cet artiste réputé pour ses « peintures de beautés » (bijinga), met en scène des femmes de classes sociales extrêmement variées, depuis les épouses de daimyô (seigneurs de fiefs) aux citadines et aux femmes de plaisir. Cette série compte cent estampes réalisées entre novembre 1857 et mai de l’année suivante. Elles ont pour particularité de réunir sur la même image les deux thèmes populaires : celui des « belles femmes » et celui des « sites célèbres ». Si les « belles femmes » ont été dessinées par Toyokuni lui-même, les paysages à l’intérieur des vignettes sont dus à Utagawa Kunihisa, qui était à la fois son élève et son gendre.
Ichiôsai Kunichika (1835-1900), élève du précédent, est notamment connu pour ses Trente-deux physionomies à la mode, où il substitue aux trente-deux formes de bouddhas de l’iconographie bouddhique des portraits de beautés occupées à différentes activités.
Quant à la série du Gynécée du château de Chiyoda, qui s’attache à décrire les us et coutumes de l’épouse et des concubines du shôgun, elle représente sans doute la quintessence du travail de Yôshû Chikanobu (1838-1912). Il était impossible à quiconque d’observer ce qui se passait dans ce lieu à l’accès très restreint, si bien que cette série constitue une documentation précieuse sur les toilettes et le maquillage des femmes de l’entourage du shôgun à la fin de l’époque Edo, ainsi que sur leur vie quotidienne ou encore les fêtes et rites annuels.
Plusieurs dizaines d’estampes provenant de diverses séries témoignent ainsi non seulement de l’habileté technique des maîtres qui surent peindre ces femmes avec délicatesse, mais aussi de la beauté individuelle de chacune d’entre elles, en fonction de leurs différents attributs.