🔊 “Polaraki” Mille polaroids d’Araki Nobuyoshi, au Musée national des arts asiatiques – Guimet, du 1er octobre 2025 au 12 janvier 2026
“Polaraki”Â
Mille polaroids d’Araki Nobuyoshi
au Musée national des arts asiatiques – Guimet, Paris
du 1er octobre 2025 au 12 janvier 2026

PODCAST –Â Entretien avec
Cécile Dazord,
conservatrice, chargĂ©e de mission pour l’art contemporain, musĂ©e Guimet, et
Édouard de Saint-Ours, conservateur des collections photographiques, musĂ©e Guimet, commissaires de l’exposition,Â
par Anne-FrĂ©dĂ©rique Fer, Ă Paris, 30 septembre 2025, durĂ©e 24’50,
© FranceFineArt.
Extrait du communiqué de presse :

Araki Nobuyoshi, Sans titre, 1990 – 2024 © Nobuyoshi Araki. © Musée Guimet, Paris / Nicolas Fussler, photographe.

Araki Nobuyoshi, Sans titre, 1990 – 2024 © Nobuyoshi Araki. © Musée Guimet, Paris / Nicolas Fussler, photographe.

Araki Nobuyoshi, Sans titre, 1990 – 2024 © Nobuyoshi Araki. © Musée Guimet, Paris / Nicolas Fussler, photographe.

Araki Nobuyoshi, Sans titre, 1990 – 2024 © Nobuyoshi Araki. © Musée Guimet, Paris / Nicolas Fussler, photographe.
Commissariat scientifique :
Cécile Dazord, conservatrice, chargée de mission pour l’art contemporain, musée Guimet
Édouard de Saint-Ours, conservateur des collections photographiques, musée Guimet
Photographe japonais prolifique, obsessionnel et volontiers provocateur, Araki Nobuyoshi est, depuis les années 1960, un protagoniste incontournable de l’histoire de la photographie japonaise et internationale. Issue d’une donation exceptionnelle reçue par le musée Guimet, l’exposition POLARAKI dévoile un aspect essentiel de son oeuvre : l’exploration des possibilités infinies offertes par le Polaroid, source d’expérimentation centrale dans le travail de l’artiste.
L’usage de la photographie à développement instantané constitue un geste quotidien pour l’artiste japonais Araki Nobuyoshi. Né à Tokyo en 1940, il suit des études de photographie avant de travailler pour une firme publicitaire à partir 1963. Devenu indépendant en 1972, il rencontre un succès considérable au Japon puis sur la scène internationale pour son regard nouveau sur l’intime. Il est aujourd’hui plus connu pour ses vues monumentales de fleurs et, dans une démarche qui a fait polémique, ses mises en scène du corps féminin à la frontière entre érotisme et pornographie.
En contrepoint de ces compositions soigneusement élaborées, il adopte dans les années 1990 le Polaroid qui lui permet de saisir son environnement familier à chaque instant. Cette technique alimente dès lors un journal visuel chaotique et poétique autour duquel s’articule l’ensemble de son oeuvre, hanté jusqu’à l’obsession par l’amour, le sexe, la vie et la mort.
En 2025, Stéphane André a fait don au musée Guimet de sa collection de polaroids d’Araki, constituée de près d’un millier de tirages acquis depuis 2000. Donnant à voir pour la première fois l’installation conçue par le collectionneur dans son appartement parisien, l’exposition POLARAKI rend hommage tant à l’importance du Polaroid chez l’artiste qu’à son appropriation par un particulier sous une forme apparentée au cabinet de curiosités.
Le Polaroid comme journal visuel
Le travail d’Araki nourri par son histoire personnelle, comme en témoignent trois séries consacrées à sa vie avec Aoki Yoko entre 1971 et 1992, de leur voyage de noces au décès de cette dernière. Figure centrale du courant shi-shashin (photographie du je), Araki s’empare dans les années 1990 de la photographie à développement instantané. Le procédé, inventé par Edwin Land et commercialisé à partir de 1948 par la marque Polaroid, lui permet de capturer sans relâche son quotidien en produisant une quantité considérable de ces tirages carrés. Le médium offre également de nouvelles opportunités plastiques à Araki, qui intervient sur les images à coups de ciseaux, de feutre ou de pinceau ; découpe, raboute et expose bord à bord ses tirages sous forme de grilles aux dimensions parfois monumentales. Les polaroids d’Araki se succèdent en un flux continu qui brouille les limites entre les sphères intime et publique, anticipant ainsi certains usages contemporains des images photographiques.
Les modèles et le photographe
L’oeuvre d’Araki navigue entre des univers esthétiques variés. Dans les années 1960-1970, ses premiers travaux développent une approche intimiste du corps en rupture avec les stéréotypes publicitaires. Vingt ans plus tard, son usage du Polaroid produit une forme de poésie visuelle fondée sur des rapprochements insolites. Il sert également une esthétique érotique japonisante portée par des marqueurs culturels (kimonos, tatamis, baguettes, cordes) qui encadrent une représentation exotisante et objectifiante du corps des modèles. Le caractère érotique et pornographique des oeuvres d’Araki a parfois été interprété à l’aune de l’histoire de l’art japonais, dans le sillage des estampes érotiques (shunga) et des arts traditionnels de la corde (hojojutsu, kinbaku). Ce rapprochement patrimonial tendait à légitimer l’obscénité et la violence de certaines photographies. Les évolutions récentes du regard sur les rapports femme-homme invitent à reconsidérer des représentations jusqu’ici naturalisées sous couvert de tradition. Le traitement du corps féminin dans l’objectif d’Araki n’échappe pas à cette remise en perspective.
Livres
Araki Nobuyoshi a développé et suscité une activité éditoriale intense, étroitement liée à sa pratique photographique. Dès la fin des années 1960, ses premiers travaux ont été diffusés par le biais de livres composés et imprimés par ses soins sur les photocopieurs de la firme publicitaire Dentsu, dont il était alors employé. On dénombre à ce jour plus de 500 ouvrages consacrés à son oeuvre. À l’occasion de l’exposition POLARAKI, le collectionneur Stéphane André a prêté au musée Guimet huit volumes exclusivement consacrés au polaroid.
Araki’s aradise – 1997-2024, 906 tirages Ă dĂ©veloppement instantanĂ© de type intĂ©gral montĂ©s dans 391 cadres MusĂ©e Guimet, donation StĂ©phane AndrĂ© (2025)
Araki’s aradise rassemble près de mille polaroids de l’artiste acquis par Stéphane André entre 2000 et 2024. Donnés au musée Guimet par le collectionneur en mai 2025, ils sont présentés ici tels qu’ils étaient disposés dans son appartement parisien. La moitié des associations d’images au sein des cadres sont l’oeuvre d’Araki. L’autre moitié a été composée par Stéphane André, qui a aussi choisi l’emplacement de chaque cadre dans une grille prolongeant le système de poésie visuelle élaboré par l’artiste. Afin de respecter la volonté de deux anciens modèles, qui ne souhaitent pas que leurs photographies soient exposées, le musée Guimet a décidé, en accord avec l’artiste, de laisser vacant l’espace occupé par les cadres concernés.
 » Les polaroids [d’Araki] ne représentent pas seulement des fleurs, à foison. Ils sont des fleurs. La photographie Polaroid, c’est l’éclore. Mais contrairement aux fleurs, et contrairement à sa réputation artificiellement entretenue, sa fraîcheur est inaltérable. » Stéphane André