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🔊 “Pastels du musée d’Orsay” de Millet à Redon, au Musée d’Orsay, Paris, du 14 mars au 2 juillet 2023

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“Pastels du musée d’Orsay” de Millet à Redon

au Musée d’Orsay, Paris

du 14 mars au 2 juillet 2023

MusĂ©e d’Orsay


Interview de Caroline Corbeau-Parsons, Conservatrice des arts graphiques au Musée d’Orsay, et commissaire de l'exposition, par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 13 mars 2023, durée 17’35. © FranceFineArt.

PODCAST –  Interview de Caroline Corbeau-Parsons, Conservatrice des arts graphiques au MusĂ©e d’Orsay, et commissaire de l’exposition,


par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 13 mars 2023, durée 17’35.
© FranceFineArt.


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©Anne-Fréderique Fer, présentation presse, le 13 mars 2023.

Extrait du communiqué de presse :

Lucien Lévy-Dhurmer, La Femme à la médaille, En 1896. Pastel et rehauts d'or sur papier contrecollé sur carton, H. 35,0 ; L. 54,0 cm. Musée d'Orsay. © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt.
Lucien LĂ©vy-Dhurmer, La Femme Ă  la mĂ©daille, En 1896. Pastel et rehauts d’or sur papier contrecollĂ© sur carton, H. 35,0 ; L. 54,0 cm. MusĂ©e d’Orsay. © MusĂ©e d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt.
Edgar Degas, Femme à sa toilette essuyant son pied gauche, En 1886. Pastel sur carton. H. 54,3 ; L. 52,4 cm. 1911, legs, comte Isaac de Camondo. © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt.
Edgar Degas, Femme à sa toilette essuyant son pied gauche. En 1886. Pastel sur carton. H. 54,3 ; L. 52,4 cm. 1911, legs, comte Isaac de Camondo. © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt.
Edouard Vuillard, La Table servie, Vers 1915. Pastel sur papier beige, H. 26,7 ; L. 31,9 cm. © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt.
Edouard Vuillard, La Table servie, Vers 1915. Pastel sur papier beige, H. 26,7 ; L. 31,9 cm. © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt.
Mary Cassatt, Mère et enfant sur fond vert ou Maternité, En 1897. Pastel sur papier beige collé sur châssis entoilé, H. 55,0 ; L. 46,0 cm. Musée d'Orsay, Don de Mary Cassatt, 1897. © RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski.
Mary Cassatt, Mère et enfant sur fond vert ou MaternitĂ©, En 1897. Pastel sur papier beige collĂ© sur châssis entoilĂ©, H. 55,0 ; L. 46,0 cm. MusĂ©e d’Orsay, Don de Mary Cassatt, 1897. © RMN-Grand Palais (MusĂ©e d’Orsay) / HervĂ© Lewandowski.

Commissaire :

Caroline Corbeau-Parsons, Conservatrice des arts graphiques au Musée d’Orsay




Le musée d’Orsay exposera au printemps prochain une centaine des pastels de sa collection, riche d’environ 500 oeuvres. La dernière exposition de cette ampleur à avoir été consacrée aux pastels du musée (Le Mystère et l’éclat) datant déjà de 2009, cette nouvelle présentation permettra au public de découvrir ou de redécouvrir ces joyaux de la collection où brillent les oeuvres de Millet, Degas, Manet, Cassatt, Redon, Lévy-Dhurmer et bien d’autres.

Le XVIIIe siècle est traditionnellement considéré comme l’âge d’or du pastel. Médium sans égal pour rendre les effets de matière et le velouté de la carnation, le pastel est d’un usage alors bien souvent restreint au portrait, auquel il se prête particulièrement bien. Si son art passe de mode au moment de la révolution française, il connaît toutefois une véritable réinvention entre la seconde moitié du XIXe siècle et le début du XXe, ce dont témoigne de manière exceptionnelle la collection du musée d’Orsay. La gamme de pastels disponibles s’étend alors aussi considérablement tant en termes de nuances que de textures, ce qui ouvre la porte à tous types d’expérimentations et de pratiques.

L’exposition mettra en avant la singularité du pastel, ni véritablement dessin, ni peinture, et le rapport immédiat avec la matière qui lui est propre. Le pastel est en effet essentiellement constitué de pigments purs, et crée une fleur en suspension sur le grain du papier ou la toile, dont la vibration fait la beauté, mais aussi la grande fragilité. Pour Ernst Juünger, la sensation tactile relayée par l’oeil que suscite le pastel le classe parmi les « arts érotiques, et il y a quelque chose de symbolique dans le fait que son velouté, le prime émail de ses couleurs, soit si prompt à s’effacer ». Multiforme, il permet toutes les modulations, du vaporeux de l’estompe aux hachures les plus vigoureuses, en passant par l’ondulation, la virgule et le pointillé. Il est significatif qu’un artiste comme Degas l’utilise de manière quasi-exclusive à partir de 1888-90, l’élection du pastel marquant l’aboutissement de ses recherches assidues sur le dessin et la couleur.

L’exposition s’articulera autour de huit grands thèmes soulignant le renouveau du pastel à partir de la seconde moitié du XIXe siècle. Les thèmes en question correspondent aux nouveaux sujets et genres auxquels s’étend la technique sous la période. Après une introduction sur le pastel et sa singularité, « mariage d’amour de la couleur et du dessin » (José de Hérédia), la première salle, Sociabilités, s’intéressera au portrait au pastel, dans la continuité du XVIIIe siècle. Terre et mer, où Millet régnera en maître, mettra en lumière en quoi le pastel passe outre les sphères mondaines pour s’atteler à la noblesse de la vie rurale. Au coeur de l’exposition, un espace traversant intitulé Modernités sera consacré aux sujets radicalement nouveaux que la métropole et la transformation de la société inspirent à Degas, Monet, Caillebotte et Boudin. Intérieurs, la plus grande salle de l’exposition, comprendra des scènes d’intérieur et des représentations intimes d’enfants et de la vie familiale, parfois proches de l’instantané, le pastel étant propice aux notations rapides et spontanées. Mary Cassatt, Helleu et Vuillard y seront particulièrement à l’honneur. Dans son prolongement, Intimité sera également conçu comme un espace domestique à l’atmosphère feutrée. Y figureront des nus de Degas, souvent à leur toilette, que lui-même a qualifié de « Suzanne modernes ». Ils dialogueront avec ceux de Manet, entre autres. L’essence de la nature soulignera en quoi, dans la continuité de Boudin, le pastel devient un médium de choix pour le paysage. S’il s’adapte parfaitement à la notation des changements atmosphériques et des effets de lumière, l’éphémère de sa matière peut aussi conférer au paysage un caractère à la fois étrange et éthéré, cher aux symbolistes. Les deux dernières sections de l’exposition s’inscriront en réaction contre Modernités. Arcadies rassemblera des oeuvres d’artistes variés (Fantin-Latour, Osbert, Puvis de Chavannes, Desvallières…) témoignant de la nostalgie d’une symbiose entre l’homme et la nature, en dehors du temps, et loin des transformations radicales éprouvées à la fin du XIXe siècle. Enfin, Âmes et Chimères, dont une partie sera focalisée sur Lévy-Dhurmer et l’autre sur Redon, exposera en quoi pour ces artistes symbolistes l’extraordinaire plasticité du pastel permet, au-delà du réel, d’évoquer le rêve, la vie intérieure, l’imaginaire, et de donner une nouvelle dimension au mythe.

#PastelsOrsay

#Publication – Album, coédition Musées d’Orsay et de l’Orangerie / RMN
Cet ouvrage, qui dévoile près de cent chefs-d’oeuvre conservés dans les collections du musée d’Orsay, comprend deux essais et soixante notices de commentaire des oeuvres, ainsi que des détails mettant en valeur le travail virtuose de la touche des pastellistes. Pastels est le premier opus d’une collection sur les chefs-d’oeuvre emblématiques conservés aux musées d’Orsay et de l’Orangerie.

Parcours de l’exposition

L’exposition, après une introduction, se développe en 8 sections et présente 95 pastels de la collection du musée d’Orsay.

Introduction – Pastels du musĂ©e d’Orsay. De Millet Ă  Redon
Ni véritablement dessin, ni peinture, le pastel est une technique graphique à part unissant la ligne et la couleur. La vibration de la « fleur » des pigments formée à la surface du support offre un rapport direct à la matière et à la couleur pure qui stimule l’oeil et en appelle aux sens. L’art du pastel est multiforme, le trait se faisant ondulation, zébrure, strie, hachure, lorsque le pigment n’est pas concentré en aplat ou fondu par l’estompe. Sa souplesse d’utilisation le rend particulièrement apte à rendre les effets de matière ou le velouté de la peau et à créer des effets de trompe l’oeil. Triomphante au XVIIIe siècle avec Rosalba Carriera, Maurice Quentin de la Tour ou Chardin, qualifiés de « peintres au pastel », la technique passe de mode avant de connaître une véritable renaissance au milieu du XIXe siècle. Elle s’affranchit du portrait et s’étend à tous les sujets, comme le montre cette exposition de quatre-vingt-quinze oeuvres parmi les plus importantes de la collection du musée d’Orsay.

1. Sociabilités
Le pastel prend son essor au XVIIe siècle et gagne ses lettres de noblesse au XVIIIe, traditionnellement considéré comme son âge d’or. Médium sans égal pour rendre les effets de matière et le velouté de la carnation, le pastel est alors presque exclusivement appliqué au portrait. Délaissé sous la révolution française, il revient en force pendant la seconde moitié du XIXe siècle qui renoue avec le genre du portrait dont la bourgeoisie, soucieuse d’asseoir sa nouvelle position dans la société, se montre particulièrement friande. Des pastellistes comme Emile Lévy, Jacques-Emile Blanche, ou encore Louise Breslau s’inscrivent dans la tradition du portrait aristocratique avec de grands formats voués à rivaliser avec la peinture. Ils déploient l’extraordinaire souplesse de la technique pour mettre l’accent sur la richesse des intérieurs ou le raffinement des étoffes, tandis qu’un Manet, par exemple, privilégie les portraits en buste et les lignes épurées pour saisir le type de la « parisienne ».

2. Terre et mer
Au mitan du XIXe siècle, l’usage du pastel s’étend à tous les genres. Jean-François Millet l’utilise pour représenter la noblesse de la vie rurale, comme dans ses peintures. Certains critiques, comme Joris-Karl Huysmans, préfèrent d’ailleurs ses pastels à ses huiles : « dans le pastelliste, peignant la solitude, on trouve un suggestif et douloureux artiste, un maître terrien qui a senti la nature à certaines heures et l’a … gravement, éloquemment rendue. » S’il est un pionnier, Millet n’est toutefois pas seul à s’intéresser aux paysans. Le choix de ces sujets nouveaux coïncide avec une période d’accélération de l’exode rural dans le sillage de la révolution industrielle. Emerge alors la nostalgie d’un mode de vie ancestral qui jusqu’alors semblait éternel. Le travail des moissonneurs et des pêcheurs est tantôt héroïsé, tantôt traité avec pittoresque. Les costumes des bretonnes et leurs coiffes frappent de nombreux pastellistes, qui chercheront à les immortaliser dans tout leur éclat de bleu roi, de jaune vif, et de blanc.

3. Modernités
Le XIXe siècle est pour le poète Émile Verhaeren celui des « Villes tentaculaires », qui se développent à mesure que les campagnes se vident. La population et le paysage urbains, la vie ouvrière, la société de loisirs et le monde du spectacle offrent autant de nouveaux sujets aux impressionnistes. Rejetant la peinture d’Histoire, leur quête du vrai en fait des observateurs du quotidien. Le pastel devient une technique privilégiée pour saisir ce monde en mouvement. Eugène Boudin, dont Monet dira qu’il lui a ouvert les yeux, leur montre la voie avec ses études en plein air, « si rapidement et si fidèlement croquées d’après ce qu’il y a de plus inconstant, de plus insaisissable dans sa forme et dans sa couleur », selon Charles Baudelaire. Degas, s’il a laissé des paysages au pastel, s’intéresse plus encore au travail des femmes, ce qui fait dire aux frères Goncourt, dans leur Journal, que cet « enamouré du moderne » a jeté « […] son dévolu sur les blanchisseuses et les danseuses ». Il les observe inlassablement dans leurs activités quotidiennes, en retrait, et sans porter de jugement sur leur condition.

4. Essence de la nature
Le faible encombrement du pastel le rend facilement transportable et adapté au travail en plein air. Réunissant, dans un même outil, la possibilité de la ligne et de la couleur, il est idéal pour transcrire les changements atmosphériques et les effets de lumière en toute rapidité. Le paysage au pastel trouve sa source au début du XIXe siècle. Lors d’un voyage en Suisse en 1807, charmée par ce pays, Élisabeth Vigée Le Brun, dit y avoir réalisé « environ deux cents paysages au pastel». Delacroix fera lui aussi des pochades de ciels au pastel, et Eugène Boudin, que Corot appellait le « roi des ciels », se placera dans son sillage. Toutefois, à leurs yeux, ces oeuvres ne sont pas vouées à être exposées : elles ont valeur d’études ou de souvenirs. Des pastellistes comme Pierre Prins, Ernest Duez, ou encore Henri Gervex se mettent à l’école de la nature, sur le motif, dans un même souci de vérité que Boudin et les impressionnistes. Ils produisent des pastels très enlevés, traités avec vigueur. Mais la matière même de ce médium, fragile, éphémère, et sa propension à créer des surfaces aériennes peut aussi conférer au paysage un caractère étrange et éthéré qu’exploitent les artistes symbolistes comme Lévy-Dhurmer et Rippl-Ronaï.

5. Intérieurs
Parmi les nouveaux sujets investis par les pastellistes dans les dernières décennies du XIXe siècle figure l’univers domestique. Le portrait devient aussi plus intime, plus informel, reflétant un état d’âme. Le foyer et la vie familiale étant au coeur des valeurs bourgeoises, les artistes se tournent vers les scènes de genre et les intérieurs. Ces sujets semblent particulièrement privilégiés par les artistes femmes qui, dans le contexte de l’époque, restent encore largement associées à cette sphère. Ce phénomène est accentué par la réputation de « propreté » et de facilité d’usage du pastel, considéré encore comme un art d’agrément convenant tout particulièrement aux femmes, jusqu’aux années 1880 – moment où il jouit d’une popularité sans précédent chez les artistes, tous sexes confondus : « Le pastel peut se prendre et se quitter, gardant tout au long du travail toute la fraîcheur de son éclat et la fleur de son velouté » (la Grande Encyclopédie, 1885). Il devient le médium de choix pour créer des instantanés de la vie quotidienne.

6. Intimité
Le pastel semble plus apte que tout autre médium à rendre le velouté de la peau et les teintes subtiles de sa carnation. Cette qualité explique naturellement sa grande popularité dans l’art du portrait, mais aussi dans celui du nu. Édouard Manet, Maurice Denis et Émile-René Ménard jouent de l’estompe pour donner un aspect poudreux et lumineux à la chair de leurs modèles, tandis que Degas utilise une grande variété de traits et des couleurs franches pour donner du relief à ses baigneuses aux postures prosaïques, sans idéaliser de leur corps. Degas entre dans l’intimité de ces femmes à leur toilette sans qu’elles se sachent observées, ce qui l’amène à les comparer à des consoeurs modernes de Suzanne au bain, cette héroïne de l’Ancien Testament secrètement regardée par des vieillards. Si certaines de ses baigneuses semblent observées par une porte entrouverte, d’autres font l’objet d’hardies plongées. Les nus en buste de Manet et d’Aman-Jean sont tout-autre, soutenant notre regard dans le premier cas, et ayant conscience d’être observé pour le second.

7. Arcadies
Le XIXe est un siècle d’instabilité politique et de profonds changements sociétaux. La révolution industrielle et l’expansion rapide des chemins de fer bouleversent le rapport au temps et à l’espace. Vers la fin du siècle émerge la crainte d’un effondrement de la civilisation, comparable à celui de l’Empire Romain. En réponse à cette crise des valeurs et en réaction contre le matérialisme ambiant, certains artistes rejettent les sujets contemporains pour se tourner vers un idéalisme arcadien, rêve antique d’une vie simple, en harmonie avec la nature, hors du temps. Un artiste comme Osbert, qui souhaite « arriver à la Simplicité même, au grand Silence », développe une vision panthéiste et mystique peuplée de muses sur laquelle s’édifie son oeuvre. Dans l’art de Degas, au contraire, le thème des baigneuses dans l’herbe et d’une possible symbiose avec la nature est une véritable rareté. Enfin, chez Desvallières et Rothenstein, la terre idyllique de l’Arcadie n’est pas sans présenter un caractère étrange voire menaçant, comme ébranlée par les secousses du XXe siècle approchant.

8. Âmes et Chimères
La voie menant à une Arcadie utopique n’est pas la seule qu’aient empruntée les artistes peu enclins à tendre un miroir au monde transfiguré du XIXe siècle. Odilon Redon et Lucien Lévy-Dhurmer, tous deux en quête d’une réalité intérieure, adoptent le pastel pour donner corps à un imaginaire foisonnant, avec un vocabulaire visuel propre à chacun. Après Millet et Degas, ce médium « caméléon » est une nouvelle fois renouvelé par ces deux grands pastellistes symbolistes à la fin du siècle. Pour Lévy-Dhurmer, l’exploration de la vie intérieure passe souvent par le portrait et la figure humaine, y compris dans la représentation d’êtres hybrides comme sa célèbre Méduse. Redon exploite quant à lui l’extraordinaire plasticité du pastel pour donner forme à son imaginaire et insuffler une dimension personnelle au mythe, loin de l’allégorie. Son art repose sur l’indéterminé, avec une volonté de se laisser guider par le matériau.